Sous haute protection, des milliers de personnes en route vers un avant-poste illégal
Le rassemblement, auquel participeront les ministres d'extrême-droite Smotrich et Ben Gvir, se rendra à Evyatar dans le cadre d'une campagne visant à légaliser l'avant-poste
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Sous haute protection, des milliers de résidents d’implantations et de membres d’organisations d’extrême-droite, ainsi que des ministres de haut rang, ont entamé lundi après-midi une marche vers l’avant-poste illégal d’Evyatar, en Cisjordanie.
Les organisateurs ont déclaré que cette marche visait à renforcer le mouvement d’expansion de la présence juive et à faire pression sur le gouvernement pour qu’il autorise le repeuplement de l’avant-poste.
Certains des principaux ministres du gouvernement, dont le ministre des Finances Bezalel Smotrich et le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, ont annoncé participer à la marche contre la politique de leur propre gouvernement, de même que quatre des principaux rabbins de la communauté nationaliste religieuse.
Cette manifestation s’inscrit dans le contexte d’une vague d’attentats terroristes palestiniens perpétrés ces derniers jours, d’émeutes sur le mont du Temple et à l’intérieur de la mosquée al-Aqsa à Jérusalem, et de salves de roquettes tirés depuis le Liban, la Syrie et la Bande de Gaza.
Dimanche, les responsables de la sécurité ont prévenu que la marche vers Evyatar augmenterait la pression sur les forces de sécurité déjà « dispersées » par la situation sécuritaire en Cisjordanie et les menaces provenant d’autres fronts.
Le porte-parole de Tsahal, le lieutenant-colonel Richard Hecht, a déclaré que l’armée avait approuvé la marche, précisant qu’elle serait « hautement surveillée et hautement protégée ».
Le député Ohad Tal (HaTzionout HaDatit) a déclaré qu' »il n’y avait aucune raison au monde d’annuler la marche ». « Nous devons envoyer un message – le message que nous n’avons pas l’intention de céder et que nous sommes là pour rester », a-t-il déclaré à la radio de l’armée.
Cependant, le député Elazar Stern (Yesh Atid) a déclaré que la marche ne devrait pas avoir lieu. « Un grand nombre de ministres du gouvernement pensent que l’État est une sorte de jouet et qu’ils peuvent jouer avec notre sécurité à tous », a déclaré Stern au site d’information Ynet.
Un responsable de la sécurité a déclaré, sous couvert d’anonymat, dimanche à la Douzième chaîne qu’étant donné que le pays connaissait actuellement une vague d’attentats terroristes, « la marche exigera des forces de sécurité qu’elles y consacrent des officiers qui sont censés être affectés à d’autres missions ».
Ce même responsable a précisé que, parmi leurs autres tâches, les forces de sécurité s’efforçaient de lutter contre l’augmentation du nombre de crimes nationalistes perpétrés par des Israéliens contre des Palestiniens en Cisjordanie, de peur qu’un tel incident n’aggrave l’escalade.
Selon un article du quotidien Haaretz, un bataillon entier de Tsahal sera détourné de la chasse à l’homme pour retrouver les auteurs de l’attentat terroriste meurtrier de la vallée du Jourdain qui a tué des soeurs israélo-britanniques le week-end dernier, afin de sécuriser la marche des résidents d’implantations. En règle générale, l’armée n’autorise pas les grands rassemblements de Palestiniens en Cisjordanie, qu’elles considèrent comme des troubles à l’ordre public.
Les activistes et les fonctionnaires marcheront sur 1,7 kilomètre depuis le carrefour de Tapuach, dans le nord de la Cisjordanie, jusqu’à Evyatar ; ils entreront dans l’avant-poste et y mèneront diverses activités récréatives au cours de la journée.
Un bataillon de Tsahal a été chargé de sécuriser la zone pendant la marche, tandis que les forces de la police des frontières assureront elles-mêmes la sécurité des marcheurs.
L’armée a déclaré qu’elle s’attendait à ce que 10 000 à 15 000 activistes participent à l’événement.
Selon les organisateurs, l’objectif de la marche est de « renforcer les implantations », mais plus largement de faire pression sur le gouvernement pour qu’il autorise le repeuplement d’Evyatar, conformément aux accords de coalition signés entre le parti ultra-nationaliste HaTzionout HaDatit et le Likud.
Evyatar a été établi pour la première fois en 2013, mais a été détruit et reconstruit à plusieurs reprises, jusqu’à ce qu’il soit rétabli pour la dernière fois en 2021. Dans le cadre d’un accord avec le gouvernement Netanyahu sortant, les résidents d’Evyatar ont accepté de quitter l’avant-poste en attendant que le gouvernement examine les terres et s’engage à le légaliser, et à condition que les bâtiments du site ne soient pas démolis.
Le gouvernement Bennett-Lapid n’a pas donné suite à l’accord, mais le parti HaTzionout HaDatit a exigé la légalisation d’Evyatar comme l’une des conditions sine qua non de son accord de coalition avec le Likud dans le gouvernement actuel.
Dans un récent accord avec les Palestiniens négocié par les États-Unis, Israël a toutefois accepté de ne pas faire avancer la légalisation des avant-postes de Cisjordanie pendant six mois.
« Nous appelons le peuple juif à venir participer à cet important événement pour renforcer les implantations », a déclaré Tzvi Elimelch, directeur du mouvement pro-implantation Nachala, qui a rétabli Evyatar en 2021 et organise la marche.
Il a félicité les ministres et les députés d’avoir annoncé leur participation à l’événement et d’avoir « compris l’importance stratégique de l’avant-poste d’Evyatar ».
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.