Texas : Fin de la prise d’otages dans la synagogue, les 4 otages sains et saufs
Le preneur d'otages, qui réclamait la libération d'Aafia Siddiqui, est mort pendant l'assaut donné par la police

Quatre otages retenus dans une synagogue du Texas aux Etats-Unis ont été libérés sains et saufs dans la nuit de samedi à dimanche et leur ravisseur, qui réclamait la libération d’une Pakistanaise condamnée pour terrorisme, est mort pendant l’assaut donné par la police.
La prise d’otages dans la synagogue de Colleyville qui a duré dix heures a profondément affecté la communauté juive aux Etats-Unis et suscité également l’inquiétude du gouvernement israélien.
« L’équipe de libération d’otages a pris d’assaut la synagogue » samedi soir et « le suspect est mort », a déclaré le chef de la police locale Michael Miller au cours d’une conférence de presse.
Tous les otages – quatre adultes – ont été libérés sains et saufs, avait auparavant annoncé le gouverneur du Texas Greg Abbott.
Exclusive footage of the hostages being rescued after the end of a nearly 12-hour hostage situation at a synagogue in Colleyville.#HostageSituation#BethIsraelSynagogue pic.twitter.com/X9QfOrjnSe
— LockharTVMedia (@LockharTVMedia) January 16, 2022
Un agent spécial du FBI, la police fédérale américaine, à Dallas, Matt DeSarno, a déclaré que les quatre otages – parmi lesquels un rabbin local respecté, Charlie Cytron-Walker – n’avaient pas besoin de soins médicaux et seraient bientôt réunis avec leurs familles.
« Il ne leur a pas fait de mal », a-t-il dit.
Selon des journalistes présents sur place, une forte explosion et des coups de feu ont retenti dans la synagogue juste avant l’annonce de M. Abbott.
Quelques heures plus tôt, alors que d’âpres négociations avaient lieu entre la police et le ravisseur, un premier otage avait été libéré indemne.

La chaîne ABC News, citant une source sur place, a rapporté avant la libération du premier otage que le suspect était armé et affirmait avoir placé des bombes à des emplacements inconnus.
La prise d’otages est survenue dans la synagogue de la congrégation Beth Israël à Colleyville, ville d’environ 23 000 habitants située à une quarantaine de km de Dallas.
La voix d’un homme par moments agité pouvait être entendue sur la retransmission de l’office religieux en direct sur Facebook, consultée par l’AFP avant son interruption.
« Il y a quelque chose qui ne va pas avec l’Amérique », avait notamment lancé cet homme.

« Je vais mourir », avait-il aussi dit, demandant à plusieurs reprises à un interlocuteur non identifié que « sa soeur » lui soit passée au téléphone.
Le suspect, selon ABC News, réclamait la libération d’Aafia Siddiqui, une scientifique pakistanaise condamnée en 2010 par un tribunal fédéral de New York à 86 ans de prison pour avoir tenté de tirer sur des militaires américains alors qu’elle était détenue en Afghanistan.
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Aafia Siddiqui est actuellement détenue dans un hôpital-prison à Fort Worth, près de Dallas. Des mouvements jihadistes avaient par le passé réclamé sa libération.
Aafia Siddiqui « n’est absolument pas impliquée » dans la prise d’otages, a cependant assuré dans une déclaration à la chaîne CNN son avocate. Elle a confirmé que l’homme n’était pas le frère de Mme Siddiqui, tout en assurant que sa cliente condamnait ces actions.

Des experts ont pour leur part souligné que le mot employé par l’homme en arabe était figuratif et signifiait « sœur » dans la foi islamique.
« Choquant et horrifiant »
La police de Colleyville avait évacué les habitants des alentours, et a demandé à la population d’éviter la zone.
Le FBI a ouvert une enquête sur le ravisseur, qui a été identifié, a indiqué l’agent Matt DeSarno, sans toutefois révéler le nom du suspect décédé.

Ellen Smith, une fidèle de la synagogue, a décrit auprès de CNN une situation « choquante et horrifiante ». Elle a cependant dit ne pas être surprise que cette agression ait visé la communauté juive.
« Les cas d’antisémitisme ont augmenté ces derniers temps », a-t-elle confié. « On se sent presque sans espoir. »
Le président Joe Biden s’est engagé à « faire face à l’antisémitisme et à la montée de l’extrémisme dans le pays », saluant le travail des forces de sécurité.
« Grâce au travail courageux des autorités et de la police locales, de l’état et fédérales, quatre Américains qui étaient retenus en otages dans une synagogue du Texas vont rapidement retourner chez eux, aux côtés de leur famille. Je fais part ici de ma reconnaissance à l’égard des forces chargées de faire respecter la loi qui, par leur travail sans relâche et à tous les niveaux, ont su coopérer et secourir courageusement les otages. Nous faisons aussi part de notre amour et nous envoyons toute notre force aux membres de la congrégation Beth Israel, à Colleyville et à la communauté juive. Nous en saurons davantage, dans les jours à venir, sur les motivations du preneur d’otage. Mais je vais le dire clairement à tous ceux qui comptent continuer à propager la haine – nous nous opposerons à l’antisémitisme et à l’essor de l’extrémisme dans le pays. C’est dans notre identité et ce soir, ces hommes et ces femmes des forces de l’ordre ont fait notre fierté, à nous tous, » a déclaré Biden.
L’ambassadeur d’Israël aux États-Unis, Michael Herzog, s’est pour sa part dit « reconnaissant » que tous les otages aient été libérés sains et saufs. Le Premier ministre israélien Naftali Bennett avait lui aussi indiqué surveiller de près la situation.
Le ministre des Affaires de la diaspora, Nachman Shai, a affirmé que l’attaque montre la nécessité d’une « protection adéquate » pour les communautés juives du monde entier. « La libération des otages au Texas est un soulagement béni et Israël est reconnaissant aux services de sécurité et au gouverneur pour le succès de l’opération. Cet incident démontre une fois de plus les dangers auxquels les communautés juives de la diaspora peuvent être confrontées et la nécessité de leur fournir une protection adéquate », a tweeté Shai.

« Nul ne devrait avoir peur de se rassembler dans son lieu de prières », a affirmé le Conseil des relations avec la communauté juive, un organisme basé à San Francisco.
« Celui qui me hait aujourd’hui vous haïra demain. Donc cela peut commencer avec les Juifs, mais cela ne s’arrêtera pas aux Juifs », a mis en garde Joseph Potasnik, vice-président du Conseil des rabbins de New York.
Quant au Conseil des relations américano-islamiques (CAIR), il a condamné la prise d’otages et a déclaré être en contact avec la communauté juive de Colleyville pour « apporter toute l’aide possible ».
Le groupe a récemment suscité la controverse parce que la dirigeante de son bureau de San Francisco avait dit aux personnes réunies lors d’une conférence pro-palestinienne, le mois dernier, de ne pas négliger les « synagogues sionistes » dans la lutte contre la haine anti-musulmans. « Quand on parle d’islamophobie, on pense très souvent aux fascistes violents », avait expliqué Zahra Billoo. « Mais je veux aussi attirer l’attention sur les Sionistes, qui ne font pas de vague. Les mêmes qui disent : ‘Partageons cette miche de pain’. » « Ce ne sont pas vos amis », avait-elle conclu.
Ces propos avaient largement été considérés comme antisémites et condamnés dans la foulée par un certain nombre d’institutions juives. La vaste majorité des Juifs américains disent entretenir un lien avec Israël et que ce lien est important dans leur identité juive. Le CAIR avait alors défendu Billoo après les critiques des groupes juifs, notamment de l’Anti-Defamation League (ADL).
L’organisation a aussi réclamé de manière répétée la libération d’Aafia Siddiqui car elle estime qu’elle a été incarcérée de manière injuste.

L’ambassadeur israélien aux Nations unies, Gilad Erdan, a déclaré dimanche après la prise d’otages qui a eu lieu au Texas que les leaders américains devaient agir contre l’antisémitisme. « Cet incident horrible nous rappelle que les responsables américains doivent passer à l’acte dès aujourd’hui. Il y aura une catastrophe si des actions sérieuses ne sont pas entreprises contre l’antisémitisme », a dit Erdan.
La communauté juive américaine, forte de plus de 5 millions de personnes, selon certaines estimations, et qui s’est longtemps sentie en sécurité aux Etats-Unis, est la cible de plus en plus fréquente de harcèlement et d’agressions, verbales et physiques.
Le 27 avril 2019, un homme de 19 ans se revendiquant comme antisémite et islamophobe, a tué Lori Gilbert-Kaye et fait trois blessés, dont un rabbin, en attaquant à l’arme automatique une synagogue près de San Diego, en Californie, au dernier jour de Pessah. Le tireur, John Earnest, qui avait revendiqué dans un texte la suprématie de la « race blanche » et était déjà poursuivi pour avoir mis le feu à une mosquée un mois plus tôt, a été inculpé de 109 chefs d’accusation fédéraux.
Le 27 octobre 2018, Robert Bowers, camionneur de 46 ans, fait irruption dans la synagogue « Tree of Life » de Pittsburgh, en Pennsylvanie, armé de trois pistolets et d’un fusil d’assaut semi-automatique, tuant onze personnes en plein office de Shabbat. C’est l’attaque la plus sanglante commise contre des juifs aux Etats-Unis.