Un animateur américain aux antécédents antisémites obtient une émission de radio à l’échelle nationale
Anthony Cumia, qui a diffusé des posts antisémites, racistes et pro-hitlériens sur les réseaux sociaux, s'est abstenu d'attaquer les Juifs lors de son retour sur les ondes dont il avait été chassé, il y a dix ans
JTA — Alors qu’il venait à peine de lancer sa première émission de radio depuis plus de dix ans, Anthony Cumia a déploré le fait qu’il ne pouvait plus se permettre de dire des choses offensantes à l’antenne.
« C’est la foule en colère de tous ces gens qui possèdent des téléphones, qui ont la possibilité d’envoyer des courriels à leur patron, à leur conseil d’administration et à tous les autres pour leur dire que vous avez dit quelque chose qui les a offensés », a-t-il dit dimanche dernier, quatorze minutes après le début de son émission de deux heures, une émission diffusée sur la station de radio conservatrice 77 WABC à New York.
« Maintenant qu’on a toutes ces plaintes sur le dos, il devient très difficile d’être provocateur dans les studios », a-t-il ajouté, faisant référence aux animateurs de radio particulièrement féroces.
Cumia a une expérience directe de la cancel-culture. Il avait été renvoyé de sa dernière émission, « Opie & Anthony », une émission qui était diffusée sur les ondes de Sirius XM, en 2014, après s’être lancé dans une tirade, sur les réseaux sociaux, contre une femme afro-américaine – un « animal », avait-il écrit.
Toutefois, si Cumia devait réellement penser qu’il n’y a aujourd’hui plus de tribune d’où il peut partager ouvertement et en toute sécurité son fanatisme, peut-être serait-il judicieux de lui conseiller, pour se rassurer, de s’attarder sur son propre fil d’actualité sur X. Au cours des deux dernières années – y compris ces derniers mois, avant qu’il ne prenne son nouveau poste – Cumia a publié un torrent de messages antisémites, racistes et pro-hitlériens qui, cette semaine, étaient toujours visibles par tous.
L’homme est un fan de Sid Rosenberg, l’animateur juif de droite qui anime également une émission sur WABC. Cumia éprouve également une vive admiration pour Nick Fuentes, un influenceur suprémaciste blanc et négationniste, qui avait dîné en 2022 avec le président américain Donald Trump – qui n’était alors pas en fonction.

Le 30 mars dernier, au-dessus d’un post qui était consacré à la Journée de la visibilité transgenre, il avait tweeté : « Il est proclamé par la présente que le lundi 22 avril 2024 est dorénavant la Journée de la visibilité d’Adolf Hitler ». Au mois de juin, au-dessus d’une photo du leader juif de la minorité au Sénat américain Chuck Schumer, Cumia avait écrit en légende : « Selon la rumeur, 6 000 000 d’hamburgers ont été cuits ce jour-là ».
Le 20 décembre, il avait publié un court message sur X : « Dans le passé, l’Allemagne a eu un vrai leader ». Cinq jours plus tard, à l’occasion de Hanoukka et au-dessus d’une photo du président américain de l’époque, Joe Biden, qui montrait ce dernier en train d’allumer une menora en bois, Cumia s’était demandé si la menora avait été « fabriquée avec le même bois que celui utilisé pour les portes de ces chambres », faisant apparemment référence aux chambres à gaz de la Shoah.
Cumia admire également les antisémites contemporains, dont Fuentes. Ainsi, il avait accueilli le négationniste dans un podcast en 2022 et il avait diffusé une photo où il apparaissait à ses côtés, les deux hommes souriants, au mois de juin.
« J’ai commencé à regarder ton émission il y a un an environ et je l’adore, mec », avait dit Cumia à Fuentes alors qu’ils étaient assis à une table, en train d’enregistrer l’épisode du podcast de 2022. « C’est drôle, c’est instructif, c’est pertinent par rapport à ce qui se passe, et c’est courageux – j’ai aussi envie de le dire ».

Au mois de juin 2024, il avait écrit un post, sur X, à l’intention de Fuentes : « Hey ! Laisse-moi m’occuper des Noirs [sic] , Nick. Tu as déjà les mains pleines avec les Juifs [sic] ».
Et en effet, son animosité à l’égard des Afro-américains est une thématique récurrente dans ses messages diffusés sur les réseaux sociaux.
« À Beaufort, en Caroline du Sud. Beaucoup d’Histoire ici. Je regarde chaque vieille branche d’arbre et je me demande si l’une d’entre elles a ‘aidé’ la cause à l’époque », avait-il écrit sur X au mois de novembre, faisant référence aux lynchages suite auxquels les noirs étaient pendus sur les branches des arbres. La chanson « Strange fruit », qui était initialement un poème, aborde ces lynchages.
Puis, utilisant un terme désignant la guerre de Sécession – un terme populaire auprès des sympathisants de la Confédération – il avait ajouté : « Voici un canon qui, je l’espère, a déchiqueté quelques Yankees pendant la guerre d’agression dans le Nord ».
Alors que les médias américains se sont fragmentés et qu’il se sont radicalement transformés au cours des dernières décennies, la radio AM est toujours restée un bastion des conservateurs – une version sur les ondes des émissions en continu qui sont devenues un pilier du discours d’extrême droite. La WABC a su profiter de cette tendance, son propriétaire, John Catsimatidis – ancien candidat à la mairie de New York – ayant mis en place une programmation qui, selon l’audimat, a su séduire les auditeurs qui l’écoutent plus de six heures par semaine en moyenne.

Cumia ne dissimule pas son goût pour les propos offensants – un penchant qu’il attribue à son métier. Lors de sa première émission sur la chaîne WABC, dimanche, il a évoqué son métier d’animateur de radio provocateur en disant qu’il nécessitait de devenir « le pire de ce qu’il y a dans l’être humain ».
« Ces provocateurs sont tout simplement irritants et odieux », a-t-il dit. « Tout ce dont ils parlent, c’est d’allusions au sexe, ils parlent des fonctions corporelles, ils font des blagues raciales, des blagues misogynes… C’est censé être – voici le mot – choquant ».
Il n’y a pas eu d’expressions d’antisémitisme manifestes dans son émission de dimanche – même s’il y a eu des références passagères aux « mondialistes » et à la manière dont le chef de la mafia Tony Soprano traitait un associé juif dans la célèbre émission de HBO « Les Sopranos ».
Alors qu’il expliquait pourquoi il pensait que l’attention récemment portée par le ministère américain de la Justice à Jeffrey Epstein était une perte de temps, il a aussi parlé longuement de ce délinquant sexuel et de la façon dont les célébrités d’Hollywood exercent une influence politique considérable.
Les posts écrits sur X par Cumia ne semblent pas avoir entamé son amitié avec Rosenberg, autre animateur de la même veine qui avait pris la parole lors du rassemblement de campagne qui avait été organisé par Trump au Madison Square Garden, l’année dernière – et qui a lui-même été licencié, dans le passé, pour ses propos racistes. Ainsi, Cumia a remercié et félicité Rosenberg à plusieurs reprises lors de son émission de dimanche.

À un moment donné, alors qu’il plaisantait en adoptant la voix des propriétaires de la station, Cumia a déclaré : « Attendez, mais de quoi pouvons-nous nous inquiéter alors que nous avons cette ordure de Sid Rosenberg qui travaille pour nous ? Comment Anthony pourrait-il être aussi mauvais ? C’est un saint si on le compare à Sid ».
« Sid sait que je l’aime. Je l’adore », a-t-il ajouté.
Un sentiment qui est réciproque. La semaine dernière, avant sa première apparition sur les ondes, Cumia a participé à l’émission de Rosenberg, qui a vanté le « style brillant » de Cumia, disant que « nous sommes très, très chanceux de vous avoir ».
Ni 77WABC ni sa société mère, Red Apple Media, n’avaient répondu à nos demandes de commentaires au moment de la publication de cet article. Mais tout porte à croire qu’ils sont satisfaits de leur nouveau poulain : mardi, la société a annoncé que son émission serait distribuée au niveau national.
Chad Lopez, président de Red Apple et de WABC, a pour sa part fait savoir dans un communiqué que « la station de radio veut clairement Anthony Cumia ».
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.