Un entrepreneur chinois finance l’immigration de 162 Éthiopiens en Israël
Le 6e vol de l’opération “Tzur Yisrael”, financé par un entrepreneur et le Keren Hayessod, a atterrit en Israël : la ministre salue "le retour de nos fils et filles à la maison"
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Des dizaines de nouveaux immigrants d’Éthiopie sont arrivés à l’aéroport Ben Gurion vendredi au petit matin, dans l’air vif de l’hiver, pour commencer leur nouvelle vie en tant que citoyens israéliens. Arborant des drapeaux israéliens, certains passagers se sont agenouillés pour embrasser le sol après être descendus de l’avion.
L’avion d’Ethiopian Airlines transportait 162 passagers. C’est le sixième vol de l’opération Tzur Yisrael, qui vise à amener en Israël dans les mois qui viennent 2 000 Ethiopiens de la communauté de Falash Mura qui vivent dans des camps de transit.
La cérémonie prévue pour accueillir les immigrants a été abandonnée à cause des restrictions israéliennes du coronavirus.
Le vol a été financé par Keren Hayessod – l’Appel Unifié pour Israël, l’organisme officiel de collecte de fonds pour Israël. Il a été soutenu financièrement par Peter Wang, un entrepreneur chinois chrétien.
« Le fait que des dizaines de nouveaux olim célèbrent ce Shabbat sur la terre d’Israël me remplit de fierté et de satisfaction », a déclaré la ministre de l’Intégration et de l’Immigration, Pnina Tamano-Shata, dans un communiqué. « Aujourd’hui, un long et éprouvant voyage, dans l’attente de retrouver leur famille, est terminé, et je suis heureuse de diriger le retour de nos fils et filles chez eux en Israël. »
En octobre, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé son intention de faire venir 2 000 membres de la communauté dans le pays. La proposition prévoyait 370 millions de shekels pour l’immigration de masse, avait alors déclaré le cabinet du Premier ministre.
Le projet initial était d’amener les 2 000 immigrants éthiopiens en Israël d’ici la fin de 2020. Le Keren Hayessod s’efforce de collecter des fonds pour aider Israël à achever la mission d’ici la mi-2021, a déclaré le président de l’organisation, Sam Grundwerg, au Times of Israel.
Bien que plusieurs milliers d’autres personnes attendent de faire le pas, les personnes approuvées ont reçu un statut prioritaire, principalement au nom du regroupement familial.
Les immigrants seront mis en quarantaine dans des installations spécialement aménagées avant de commencer à étudier l’hébreu, à suivre une formation professionnelle et à être scolarisés.
Des retrouvailles très attendues
Les familles ont attendu des années avant de s’installer en Israël. Tedplach Bitao, 28 ans, a passé plus de 12 ans à Gondar. Elle a atterri vendredi avec son mari et ses deux enfants, avec son frère aîné Shagau et sa famille.
Les membres de la famille de Bitao ont rejoint Israël séparément au fil des ans – quatre de ses frères et sœurs en 2010 et leur mère âgée a pris l’avion il y a deux ans, et vit dans le centre d’intégration de Beit Alfa.
Bitao a parlé de son excitation d’avoir l’occasion d’embrasser à nouveau sa mère, et a dit que son rêve est de s’acclimater en Israël, d’apprendre l’hébreu et de travailler pour amener le reste de la communauté juive éthiopienne en Israël.
Son frère Amana doit arriver sur un vol la semaine prochaine avec sa famille.
Dieu a entendu leurs cris
Wang, l’homme d’affaires chinois qui a financé le vol, a déclaré au Times of Israel que son soutien à l’alyah (l’immigration en Israël) vient de sa profonde foi chrétienne.
« Même si vous êtes exilés dans le pays le plus lointain sous les cieux, de là le Seigneur votre Dieu vous rassemblera et vous ramènera », a dit Wang, en citant le Deutéronome.
« Les frères et sœurs juifs d’Ethiopie prient depuis des siècles pour retourner sur la terre de leurs ancêtres », a poursuivi Wang, citant sa préoccupation quant à la situation précaire dans laquelle ils se trouvent. « Je crois que Dieu a entendu leurs cris de détresse et a vu leur désir de revenir vers la terre promise ».
Wang était en Israël en 2018 pour les cérémonies marquant le 70e anniversaire d’Israël. Il a déclaré que cette visite lui a permis de faire l’expérience « d’une manière profonde de la manière dont Dieu est avec Israël ».
Grundwerg a déclaré au Times of Israel qu’il y a eu un soutien particulièrement important des chrétiens évangélistes dans le monde entier au cours de la dernière décennie.
« Nous avons eu des chrétiens qui ont soutenu l’alyah de l’ancienne Union soviétique, de l’Ukraine, et même du Mexique », a déclaré M. Grundwerg. « Mais il y a quelque chose de spécial que beaucoup de chrétiens associent à l’alyah éthiopienne. »
Le Keren Hayessod travaille en étroite collaboration avec l’Agence juive, qui gère les relations avec le gouvernement éthiopien, et dont le personnel est sur le terrain à Gondar et à Addis-Abeba.
M. Grundwerg a estimé le coût du vol à environ 320 000 dollars. Une partie de cette somme a été consacrée aux préparatifs du vol, notamment aux précautions sanitaires liées à la pandémie et autres vaccinations.
La majeure partie du financement du gouvernement israélien est destinée aux coûts à long terme, comme le logement et la formation professionnelle, laissant à d’autres institutions israéliennes et sionistes le soin de prendre en charge le reste des coûts préparatoires ainsi que les vols eux-mêmes.
Pour Grundwerg, dont les grands-parents ont survécu à la Shoah et dont les arrière-grands-parents ont été assassinés, aider les autres à immigrer en Israël revêt un caractère particulièrement personnel.
« Pour moi, qui ai fait l’alyah il y a 30 ans par choix, et de pouvoir ensuite être à la tête d’une organisation dont le but premier depuis 100 ans est d’aider à faire venir les olim, la boucle est absolument bouclée pour moi », a-t-il déclaré.
Des milliers de personnes sont en route, mais beaucoup d’autres attendent encore
En novembre 2015, le gouvernement israélien a pris la décision de mettre en place un pont aérien pour faire venir « les derniers de la communauté » qui attendent à Addis-Abeba et à Gondar.
Jusqu’à 14 000 personnes d’origine juive attendent en Ethiopie pour venir en Israël, mais le gouvernement a approuvé le transport aérien de seulement 2 000 personnes fin 2020 et début 2021, malgré la pandémie et le récent déclenchement d’une guerre dans la région du nord du Tigré.
Les combats entre le gouvernement du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed et le Front populaire de libération du Tigré, du nord-ouest du pays, ont fait sa première victime au sein de la communauté juive de Gondar le 12 novembre dernier – Girmew Gete, 36 ans. Il attendait depuis 24 ans de pouvoir immigrer en Israël.
La communauté est confrontée à des conditions désastreuses en Éthiopie, qui se sont intensifiées à la suite de la pandémie de COVID-19.
Le travail s’est tari et la nourriture est rare, les prix ayant augmenté de 35 à 50 % ; les familles en Israël qui envoyaient auparavant de l’argent à leurs proches sont à court d’argent en raison de leurs propres problèmes liés à la COVID-19, et les organisations philanthropiques sont moins en mesure de recueillir des dons en raison de la pandémie.
En août, Tamano-Shata a présenté à la Knesset un cadre de 1,3 milliard de NIS pour faire venir 8 000 Éthiopiens en Israël et fermer les camps de Gondar et d’Addis-Abeba.
Environ 9 000 des candidats à l’immigration attendent depuis 15 ans ou plus d’immigrer, selon des militants locaux. Environ un quart de ce nombre, situé dans la capitale Addis-Abeba, attend depuis plus de 20 ans, disent-ils, tandis que le reste, dans la ville de Gondar, attend depuis 15 à 20 ans.
Environ 140 000 Juifs d’origine éthiopienne vivent aujourd’hui en Israël. Quelque 22 000 d’entre eux ont été transportés par avion en Israël lors de l’opération Moïse en 1984 et de l’opération Salomon en 1991, la plupart provenant de la communauté Beta Israel.
Alors que les immigrants juifs éthiopiens de la communauté Beta Israel sont reconnus comme étant pleinement juifs, les immigrants d’Ethiopie appartenant à la petite communauté Falash Mura sont tenus de se convertir à l’orthodoxie après avoir immigré. Les Falash Mura sont des juifs éthiopiens dont les ancêtres se sont convertis au christianisme, souvent sous la contrainte, il y a plusieurs générations. Quelque 30 000 d’entre eux ont immigré en Israël depuis 1997, selon le bureau du Premier ministre.
Sue Surkes a contribué à cet article.