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Un festival annuel avec une ode à l’Oud pour la diva juive tunisienne, Habiba Msika

Le 25e festival du Oud de Jérusalem est l'occasion d'une multitude de mélanges insolites, de Hadag Nachash interprétant des psaumes à un célèbre joueur de flûte de bambou indien

Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

Ayelet Uri Benita, Imad Dlal (au centre) et Yuval Tobi, à droite, interpréteront « Everyone's Favorite - A tribute to the songs of Tunisian diva Habiba Msika » dans le cadre du festival de l'oud, le 22 novembre 2024. (Crédit : Amikam Horesh)
Ayelet Uri Benita, Imad Dlal (au centre) et Yuval Tobi, à droite, interpréteront « Everyone's Favorite - A tribute to the songs of Tunisian diva Habiba Msika » dans le cadre du festival de l'oud, le 22 novembre 2024. (Crédit : Amikam Horesh)

Depuis le début de la guerre menée contre le groupe terroriste palestinien du Hamas, entre autres, malgré un flot continu de sirènes d’alerte avertissant de la présence de roquettes en provenance du Liban voisin, la chanteuse Ayelet Uri Benita et le maître de l’Oud Emad Dalal se sont retrouvés chaque dimanche dans son studio privé, dans le village arabe de Kafr Yasif, pour préparer leur ode à une diva tunisienne de l’Oud.

« À chaque fois, ces trois heures passées ensemble m’élevaient », a raconté Benita. « Je sortais du studio d’Emad pleine d’espoir, de foi et d’esprit. »

Le spectacle, intitulé « Everyone’s Favorite, A Tribute to the Songs of Tunisian Diva Habiba Msika » (« La préférée de tous, un hommage aux chansons de la diva tunisienne Habiba Msika »), sera joué le vendredi 22 novembre à la Maison de la Confédération de Jérusalem, dans le cadre du 25e festival du Oud, qui se tiendra du 21 au 30 novembre, avec Benita, Dlal, Yuval Tobi jouant du saz turc, le percussionniste Omri Zichron et Basil Hleihel jouant de la flûte et du violon.

Ce concert s’inscrit dans le mélange inhabituel qui caractérise souvent ce festival annuel, qui comprend cette année le célèbre groupe de hip-hop Hadag Nahash interprétant des musiques du Livre des Psaumes, le groupe de rock Tractor’s Revenge créant une musique transe avec l’ensemble Piyyut, ainsi que de multiples combinaisons de maîtres de l’Oud, de chanteurs et d’interprètes, apportant à Jérusalem les sons de l’Arménie, de la Tunisie, du Yémen, de l’Inde et d’Israël.

Les représentations auront lieu à la Maison de la Confédération, à la Bibliothèque nationale d’Israël, au Théâtre de Jérusalem et au bar et espace de représentation Mazkeka.

« Je crois en la musique », a déclaré Effie Benaya, qui gère la Maison de la Confédération et le festival de l’Oud et qui a décidé d’organiser l’événement malgré les difficultés liées à la guerre.

« Je crois en son pouvoir de guérison du cœur – de l’individu et de la société dans son ensemble. Je crois que la musique apporte réconfort et espoir, surtout dans des jours sanglants et insupportablement difficiles comme les nôtres. »

Les chansons d’une diva tunisienne peuvent sembler idiosyncrasiques, mais cette collection d’œuvres musicales est directement liée à la fusion de l’Orient et de l’Occident ainsi qu’à l’existence partagée célébrée par Habiba Msika, une diva juive tunisienne du début des années 1900, durant sa brève vie, avant d’être assassinée par un prétendant jaloux.

Benita, d’origine tunisienne, avait découvert l’histoire insolite d’Habiba dans un livre, et la percussionniste, vocaliste et interprète a ressenti un élan d’inspiration. Elle a trouvé des enregistrements d’Habiba sur YouTube, mais avait besoin d’aide en arabe pour mieux comprendre et arranger les chansons.

Benita et Dlal s’étaient déjà produits ensemble par le passé. Benita savait que Dlal, un joueur de Oud et interprète chevronné, pourrait l’aider à comprendre ce que disait Habiba, et créer ensemble quelque chose de plus accessible pour le public.

Les deux musiciens, qui vivent dans des villes septentrionales voisines, ont demandé et obtenu une subvention locale pour les artistes travaillant sur des créations musicales de tous genres, ce qui leur a permis de consacrer du temps à ce projet au cours de l’année écoulée.

« C’est une thérapie pour nous », a déclaré Benita.

« Nous travaillons bien ensemble », a ajouté Dlal.

« Ce n’est pas ma musique, mais j’aime la musique, peu importe le genre, je joue tout ce qui me tombe sous la main. »

Ayelet Uri Benita et Imad Dlal coincés dans la pièce sécurisée de la maison de Benita lors d’une attaque à la roquette, le 4 novembre 2024. (Crédit : Capture d’écran)

Ils sont tombés amoureux de leur muse, Habiba, née en Tunisie en 1901 dans une famille juive pauvre, orpheline jeune et élevée par sa tante, une chanteuse. Habiba a franchi de nombreuses barrières au fur et à mesure qu’elle accédait à la célébrité, exigeant des salaires plus élevés et prenant des amants différents – des Juifs, des musulmans et des chrétiens.

« C’est une femme qui n’était d’accord avec rien à son époque », a souligné Dlal. « J’aime ce genre de femmes. »

Les deux artistes ont cherché à canaliser l’esprit d’Habiba, d’autant plus que certains amis de Benita lui ont demandé si elle était sûre de vouloir jouer en arabe, compte tenu des sensibilités en Israël après le pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023 dans le sud d’Israël.

« Ils m’ont demandé si j’étais sûre que c’était le bon moment », a expliqué Benita, petite-fille d’immigrés tunisiens, qui a grandi en entendant parler arabe à la maison.

« J’ai mis cela de côté. Personne ne dit cela aujourd’hui, mais il y a quelques mois, on entendait ce genre de choses. »

Dlal croit qu’il faut continuer à vivre autant que possible, qu’il s’agisse de travailler ou d’accueillir des Israéliens dans son village pour qu’ils fassent leurs courses ou se fassent couper les cheveux.

Selon Dlal, il est important de laisser la religion et la politique de côté pendant la conversation.

« Il faut éduquer les enfants à la maison, leur apprendre à ne pas être racistes. Il faut aussi apprendre la langue de l’autre. Vous devez considérer que l’autre est un être humain comme vous, et lui rendre hommage. »

Le 22 novembre, ils interpréteront à nouveau Everyone’s Favorite, A Tribute to the Songs of Tunisian Diva Habiba Msika, une œuvre qu’ils ont déjà jouée au kibboutz Lohamei Hagetaot et au théâtre de Jaffa. Ils ont l’intention de continuer à jouer cette œuvre qui signifie tant pour eux.

« Les gens ne savent pas ce qu’ils viennent écouter », dit Dlal.

L’un des rares artistes invités au festival du Oud de cette année est Rakesh Chaurasia, le joueur indien de flûte de bambou qui a remporté deux Grammy Awards en 2024 et qui arrivera à nouveau le 23 novembre, malgré plusieurs vols annulés.

« J’ai dit oui tout de suite parce que j’aime ce pays, j’aime la nourriture, j’aime les gens, j’aime la vue », a déclaré Chaurasia, qui s’était produit en 2018 avec le trompettiste Avishaï Cohen.

« Je sais ce qui se passe là-bas, mais si on m’invite avec amour et respect, je viens. »

Chaurasia interprétera de la musique indienne classique, plutôt que sa fusion ou son jazz habituels.

« Je relève le défi d’apporter la paix et l’harmonie », a déclaré Chaurasia depuis l’Inde.

« La musique est la seule chose qui ne connaît ni religion, ni caste, ni langue. Alors pourquoi ne pas tenter le coup ? »

Le festival international du Oud de Jérusalem se tiendra du 21 au 30 novembre. Les billets sont disponibles sur le site web du festival.

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