Un projet international de photos de bibliothèques fait halte en Israël
Robert Dawson et Ellen Manchester se sont rendus aux quatre coins du monde pour explorer les bibliothèques, ils découvrent maintenant les gens évoqués dans les livres
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Pour Robert Dawson et Ellen Manchester, les bibliothèques permettent une plongée dans la vie de tous les jours.
Originaire de San José en Californie, le couple marié se trouve actuellement en Israël dans le cadre d’un séjour de six mois de Robert Dawson grâce au programme d’échange culturel américain Fulbright Global Scholar. Ils explorent et photographient les bibliothèques du pays, ainsi que celles d’Italie et de Grèce.
« Je ne suis pas bibliothécaire mais photographe, et je me suis rendu compte que les bibliothèques sont plus pertinentes que jamais aujourd’hui, » a expliqué Robert Dawson. « Elles sont plus actives qu’avant, les Américains n’ont jamais été aussi présents dans les bibliothèques, et on n’a jamais vu autant de gens consulter des livres. »
Il s’agit d’un constat qui va à l’encontre de la perception commune que les bibliothèques sont en train de disparaître, a ajouté le photographe. À l’inverse, ces lieux qui renferment des collections de livres et des espaces de calme semblent plus vivantes et actives qu’auparavant.
« Elles constituent une fierté, surtout pour les communautés plus petites, » a-t-il affirmé. « La bibliothèque fait partie de ce qu’ils identifient comme leur foyer. »
Depuis six semaines, la Bibliothèque nationale d’Israël à Jérusalem constitue leur résidence professionnelle. Ils ont visité le pays du nord au sud à la découverte de villes et bibliothèques de toute taille.
Ce séjour fait partie des nombreux voyages du genre entrepris par le couple aux États-Unis et dans le monde. Le couple travaille sur un projet à long terme appelé Bibliothèques du monde, financé en partie par le programme Fulbright.
Ellen Manchester, 73 ans, dirige une ONG, milite pour l’environnement et est une experte en photo indépendante. Son mari, âgé de 68 ans, est un photographe dont les œuvres font partie des collections des musées d’Art moderne de New York et San Francisco et du musée Smithsonian de Washington.
La bibliothèque du Congrès lui a acheté l’ensemble des archives de son projet Bibliothèques publiques, composées de 680 photographies, négatifs, journaux et articles.
Leur plongée dans des images de livres et dans les lieux qui les abritent est née de leur intérêt pour l’environnement, qu’ils ont tous les deux étudié et exploré.
« L’environnement est quelque chose que nous partageons tous et il est menacé aujourd’hui – il y a d’autres types de choses que nous partageons, les bibliothèques notamment, elles font partie de notre environnement, » a expliqué Robert Dawson.
Les États-Unis comptant 17 000 bibliothèques, ils se sont concentrés sur les petites bibliothèques publiques pour le livre de R. Dawson, « The Public Library: A Photographic Essay » (aux éditions Princeton Architectural Press, 2014), qui a nécessité 18 ans de recherches.
Et leur exploration n’est pas finie.
« Il m’a fallu 18 ans car je devais déterminer quoi faire de tout ça, » a ajouté le photographe.
Le séjour en Israël comprenait beaucoup de temps passé à la Bibliothèque nationale, qui était leur hôte en Israël, les aidant à déterminer quelles bibliothèques seraient utiles pour voir et entrer en contact avec les lieux et les gens pertinents.
Le duo a passé du temps dans des bibliothèques communautaires, d’écoles et d’universités autour de Tel Aviv, Nazareth et Jérusalem, y compris une bibliothèque dans la mosquée Al-Aqsa, où des femmes et des enfants étaient assis ensemble pour lire des livres, a dit Dawson.
« Cela fait partie de la découverte pour nous, de découvrir les bibliothèques, où qu’elles soient, et de déplacer des montagnes pour y accéder », a-t-il dit.
Leur voyage dans les bibliothèques israéliennes consistait également à voir des simples bibliothèques de centres communautaires, des bibliothèques avec une architecture design dont les prix grimpent en flèche, et des bibliothèques de rue comme celle créée pour des réfugiés à Tel Aviv – même une bibliothèque de plage.
« Nous devons continuer à établir des priorités, nous devons suivre notre liste, mais il y a tellement d’imprévus quand nous sommes ici sur le terrain », a déclaré Manchester.
L’été prochain, une fois qu’ils seront chez eux, le duo pourra se poser avec les photos et « cela devient réel », a déclaré Dawson, plutôt que mes préconceptions. C’est comme si j’apprenais des photographies, elles fournissent une réalité et d’une certaine manière, j’y crois. C’est la manière dont je fais ces projets ».
Les publications qui ressortent de ce voyage pourraient bien finir dans des livres basés sur des idées, a déclaré Manchester, avec chaque idée qui se base sur les sujets inspirés par différents types de bibliothèques dans les différents endroits visités pendant le programme Fulbright.
En 2016, ils sont allés en Europe du nord et de l’est, découvrant que la Deuxième Guerre mondiale et la Shoah était d’une importance capitale dans les bibliothèques polonaises. Ils ont élargi leurs recherches aux bibliothèques des universités et aux bibliothèques privées afin de mieux comprendre leur rôle dans les communautés.
L’Allemagne avait un système de bibliothèques publiques très rigoureux, souvent utilisé par des réfugiés comme un endroit pour apprendre le fonctionnement des systèmes locaux et pour remplir des papiers, alors que l’Italie avait beaucoup de belles et vieilles bibliothèques comme mais aussi des joyaux de petites communautés, comme celle du Club Alpin de Turin.
Ils ont travaillé avec des organisations comme Bibliothèque sans frontières, qui installe des bibliothèques comme des laveries automatiques.
« Parfois, c’est la bibliothèque, parfois c’est le bibliothécaire, a déclaré Manchester au sujet de ses voyages. C’est le regard de Bob sur ce qu’est la bibliothèque, ou comment une photo peut capturer l’histoire de ce lieu ».
Ansel Adams, un célèbre photographe de nature, a joué le rôle de mentor pour Dawson, en partageant son engagement pour l’environnement et en aidant des jeunes photographes, souvent autour des verres les vendredis après-midis.
Un des projets majeurs de Dawson était « l’Eau dans le projet ouest », un projet collaboratif qu’il a co-fondé avec Manchester et onze photographes qui abordait les questions liées à l’eau dans l’ouest américain.
Le projet de bibliothèque a continué, et au cours des dernières années, ils ont aussi passé beaucoup de temps à Stockton en Californie, où ils ont trouvé des taux d’alphabétisation très bas, une bibliothèque et un système éducatif en difficulté, et un nombre de gens héroïques.
« Les bibliothèques sont un road trip d’exploration », a dit Manchester.
Dimanche 17 février à 18h30, Dawson présentera « Road trip bibliothèque : photographier des bibliothèques aux Etats-Unis et en Europe », avec une intervention gratuite et une exposition à la Bibliothèque nationale qui est ouverte au public (avec pré-réservation).