Un réserviste blessé dans une manifestation dit qu’il ne servira pas « une dictature »
L'ancien pilote Udi Ori a démenti avoir perdu son œil après avoir essuyé des jets de canon à eau lors d'un rassemblement contre la refonte du système judiciaire à Tel Aviv
Un colonel de réserve, servant sur la base du volontariat dans l’armée de l’air israélienne et qui a subi une intervention chirurgicale après avoir essuyé des jets de canon à eau pendant une manifestation contre le plan de refonte du système de la justice en Israël, a indiqué vendredi qu’il n’assumerait plus son devoir de réserviste, refusant de servir « sous une dictature ».
Udi Ori a été blessé à l’œil droit mercredi soir lors d’une manifestation qui avait débouché sur des heurts avec la police. Les forces de sécurité tentaient alors de disperser plusieurs milliers de manifestants qui bloquaient l’autoroute Ayalon de Tel Aviv.
Dans un entretien accordé à la Treizième chaîne, Ori a démenti avoir perdu son œil suite à cette blessure, comme le laissaient entendre de nombreuses rumeurs sur les réseaux sociaux.
« C’est totalement mensonger. L’opération a été un véritable succès », a-t-il précisé.
Ori ne peut plus voir de l’œil droit mais il espère recouvrer la vue grâce à d’autres interventions chirurgicales. Sa guérison devrait prendre du temps.
Le rassemblement de Tel Aviv avait suivi l’annonce par Amichai Eshed, commandant de la police de la ville, de sa démission – une annonce qui avait entraîné plusieurs manifestations spontanées dans le pays.
Eshed avait expliqué quitter la police en signe de protestation contre sa rétrogradation « pour des raisons politiques », – une rétrogradation ordonnée par le ministre de la Sécurité nationale d’extrême-droite, Itamar Ben Gvir, qui l’avait accusé de se montrer trop indulgent à l’égard des protestataires opposés au projet de refonte radicale du système judiciaire, ces derniers mois.
Alors qu’il lui était demandé pourquoi le rassemblement de mercredi avait finalement donné lieu à des affrontements avec les forces de l’ordre, Ori a cité un sentiment de frustration aigu parmi les manifestants « qui voient l’autre partie prendre des initiatives sans prendre en compte ce qu’ils ont à dire. » Il a aussi évoqué l’influence de Ben Gvir sur les policiers qui, a-t-il ajouté, amène les agents à réprimer plus sévèrement les protestataires.
L’hôpital Ichilov de Tel Aviv a précisé que 14 personnes avaient été prises en charge par ses services à l’issue du rassemblement. Parmi les blessés, un manifestant qui a été renversé par une voiture qui avait foncé sur la foule, son conducteur ayant apparemment filmé l’incident. L’homme a été arrêté par la police. Il aurait été libéré jeudi matin. Le conducteur a reçu le soutien des frères Smotrich sur Twitter.
Dans un communiqué, le professeur Igal Leibovitch, directeur de l’institut de chirurgie ocuplastique de l’hôpital, s’est insurgé contre l’utilisation des canons à eau.
« Ces jets d’eau hautement puissants donnent un coup direct et d’une grande force sur le visage. Ils entraînent un saignement interne à l’œil et ils sont susceptibles de blesser le cristallin et la rétine », a expliqué Leibovitch.
La police a indiqué avoir procédé à quinze arrestations à Tel Aviv. Le dernier détenu a quitté les locaux du commissariat, jeudi matin, a signalé la chaîne Kan.
Ori a souligné que les manifestants avaient bloqué des routes lors de mouvements de protestation antérieurs – un blocage qui est illégal – mais que la police n’avait pas utilisé la même force à ces occasions.
Ori a indiqué qu’il avait informé son commandant qu’il n’assumerait plus son devoir de réserviste en raison de la décision prise par le gouvernement de relancer le projet de refonte du système judiciaire, qui affaiblira ce dernier.
Ori, 67 ans, a piloté des hélicoptères de combat pendant plusieurs décennies et ce, jusqu’à l’âge de 57 ans. Depuis dix ans, il est réserviste et sert dans l’armée sur la base du volontariat.
« S’il y a vraiment une dictature ici, nos enfants et nos petits-enfants nous demanderont pourquoi avoir continué à servir. On ne peut pas servir une une dictature », a-t-il expliqué.