Une campagne marketing tente de verdir les industries polluantes de Haïfa
"Sans industrie, il n'y a pas de Haïfa", affirme le slogan d'une nouvelle campagne qui clame que les émissions sont en baisse et cherche à rejeter la responsabilité de la pollution
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.

Alors qu’un consensus croissant se dégage sur la nécessité de fermer ou de déplacer les usines polluantes de la baie de Haïfa, dans le nord d’Israël, une campagne de relations publiques a été lancée ces derniers jours en riposte.
Sous le slogan « Sans industrie, il n’y a pas de Haïfa », qui rime en hébreu, et avec le hashtag « La vérité sur Haïfa », la campagne sur Facebook et Twitter affirme que « l’industrie est plus verte » aujourd’hui.
Sans fournir de données, elle affirme que les émissions ont diminué de 41 à 80 % ces dernières années et que, prises ensemble, les infrastructures de la baie de Haïfa ne contribuent qu’à hauteur de 8 % aux dommages environnementaux de la région, contre 76 % pour le trafic maritime et 15 % pour le transport terrestre.
Un autre message (ci-dessous) appelle la population à se joindre à la campagne afin de « sauver » la ville.

Cette campagne, qui ne révèle pas qui en est à l’origine, intervient deux mois après l’annonce par le chef du Conseil économique national, qui conseille le Premier ministre, que les raffineries de pétrole de Bazan, qui polluent depuis longtemps Haïfa et ont largement défini sa ligne d’horizon, doivent être fermées dans les cinq ans et remplacées par un centre résidentiel moderne et écologique de haute technologie.
Soutenant le chef du Conseil économique, Avi Simhon, lors d’une réunion de la commission des affaires intérieures et de l’environnement de la Knesset, la ministre de la Protection de l’environnement, Gila Gamliel, s’est engagée au cours des prochains mois à faire en sorte que le cabinet décide d’une date pour la fermeture des raffineries de pétrole du groupe Bazan.

Bazan – dont l’une des anciennes tours de refroidissement emblématiques s’est effondrée au début du mois – occupe 213 hectares (2 130 dunams) dans la baie de Haïfa, près des zones les plus peuplées du nord d’Israël. Sa raffinerie importe du pétrole brut pour fabriquer toute une gamme de produits raffinés pour l’industrie, le transport et l’agriculture, dont 40 % sont ensuite exportés. Ses filiales fabriquent des produits allant du bitume pour les revêtements routiers aux cires, huiles, lubrifiants et polymères.
Confrontés à une pollution atmosphérique importante et à une incidence de cancers et de maladies respiratoires supérieure à la moyenne, les habitants de Haïfa et les militants écologistes font campagne depuis des années pour la fermeture du complexe.
Les niveaux de pollution à Haïfa ont été un sujet de dispute fréquent.
En juin de l’année dernière, le ministère de la Protection de l’environnement a publié un rapport indiquant que le nombre d’émissions de polluants organiques volatils, dont de nombreux cancérigènes, avait diminué de 56 % entre 2015 et 2018
Les chiffres – publiés alors que Zeev Elkin (Likud) était encore ministre de l’Environnement – ont été rejetés par les militants locaux de l’environnement, qui ont souligné ce qu’ils considéraient comme une « analyse douteuse des données, un manque de transparence en tant que politique, et des déclarations qui ne correspondent pas à l’examen de la mise en œuvre du plan national à Haïfa », qui a été élaboré et accepté par le ministère de la Protection de l’environnement en 2015.
L’exactitude du rapport du ministère a été remise en question deux semaines seulement après sa publication lorsque le contrôleur de l’État a publié son propre rapport, affirmant que la qualité de l’air à Haïfa avait à peine changé au cours des quatre dernières années et que les résidents de la troisième ville d’Israël et de la zone métropolitaine environnante – environ 900 000 personnes – étaient exposés à des polluants cancérigènes tout autant que lors de l’élaboration du plan national.