Une délégation émiratie prise à partie par des Palestiniens au mont du Temple
Le Premier ministre de l'AP a qualifié la visite à Al-Aqsa de la délégation informelle des EAU "d'attristante", reprochant à celle-ci d'être entrée "par la porte de l'occupation"

Alors même que la Knesset votait l’approbation de l’accord historique conclu entre Israël et les Émirats arabes unis jeudi dans la soirée, une délégation économique officieuse formée de citoyens de cette nation du Golfe visitait tranquillement le mont du Temple à Jérusalem.
« Une délégation émiratie placée sous l’autorité de son excellence Khadim Abdullah Al Dari, vice-président et partenaire fondateur d’Al-Dahra Agriculture, s’est rendue au sein de l’État d’Israël », a confirmé l’agence de presse officielle des EAU, WAM.
Jeudi soir, la délégation a profité de son séjour au sein de l’État juif pour aller visiter la mosquée Al-Aqsa, sur le mont du Temple, qui est l’un des sites les plus saints de l’islam.
Des images vidéos de l’arrivée de la délégation à la mosquée ont été très partagées sur les réseaux sociaux palestiniens. Certains Palestiniens, qui se trouvaient sur le mont du Temple, ont pris à partie les visiteurs en les insultant.
مقطع فيديو متداول على مواقع التواصل الاجتماعي لوفد إماراتي دخل المسجد الأقصى تحت حراسة إسرائيلية يوم أمس الأحد.. شاهدوا كيف أجبرهم المقدسيون على مغادرة المسجد الأقصى.
Posted by عربي +AJ on Monday, October 19, 2020
Sur une vidéo, une voix masculine, criant derrière la caméra, interpelle ainsi les Émiratis : « Ordures, ordures ! ». Les visiteurs reculent alors. Dans un autre extrait, un Palestinien dit à la délégation du Golfe : « Dégagez, vite, partez d’ici ».
Le Premier ministre de l’Autorité palestinienne (AP), Mohammad Shtayyeh, a condamné cette visite, la qualifiant « d’attristante ».
« On devrait préférer entrer dans la mosquée Al-Aqsa en empruntant la porte de ses propriétaires plutôt qu’en franchissant la porte de l’occupation », a-t-il dénoncé dans un communiqué lundi.
Al-Dahra Agriculture est un exportateur majeur de viande animale et autres produits alimentaires de base, notamment de farine et de riz. Même si Al-Dahra est une entreprise liée à l’État, le groupe émirati qui est venu à Jérusalem ne bénéficiait pas du statut de délégation gouvernementale officielle. Al-Dari et son équipe sont venus suite à l’invitation de Netafim, une importante firme technologique d’irrigation israélienne.

Un porte-parole de Netafim n’a pas répondu à nos multiples demandes de commentaires mais, selon le communiqué de presse paru aux Émirats, l’entreprise va ouvrir un bureau régional aux EAU d’où il pourra collaborer avec Al-Dahra.
Les membres de la délégation ont aussi rencontré le ministre de l’Agriculture, Alon Schuster, qui a annoncé la conclusion d’un protocole d’accord entre l’Institut de recherche Volcani, qui dépend de son ministère, et Al-Dahra.

« L’entretien que j’ai eu, cette semaine, avec Khadim al-Dari — cadre d’une entreprise qui concentre ses activités sur la production alimentaire dans le monde entier – a été la réalisation du rêve de tous les sionistes qui ont soif de paix », a écrit Schuster sur sa page Facebook.
Selon le communiqué émirati, les deux institutions vont collaborer sur des « études sur les effets de la salinité sur la production agricole, et en particulier sur ses effets sur l’agriculture dans le désert, sous serre et sur la production de palmiers et de fruits ».
Al-Dahra a aussi signé un protocole « d’accord et de partenariat » avec Watergen, une firme israélienne qui a développé une technologie permettant de puiser de l’eau à partir de l’air libre.
Les Palestiniens se sont très majoritairement opposés aux accords récents de normalisation conclus entre Israël et deux pays du Golfe, considérés comme un renoncement des États arabes à leur positionnement de longue date – celui que la paix avec Israël serait conditionnée à l’établissement préalable d’un État palestinien.
Mardi, une éminente délégation émiratie, qui comprend notamment deux ministres du cabinet, est arrivée au sein de l’État juif pour des entretiens bilatéraux visant à mettre en œuvre le fameux accord signé le mois dernier à Washington.