Une école d’ingénieurs au service de l’armée
Les diplômés du Jerusalem College of Technology jouent un rôle éminent dans le développement des systèmes de défense militaire
David Shamah édite notre section « Start-Up Israel ». Spécialiste depuis plus de dix ans en technologies et en informatique, il est un expert reconnu des start-up israéliennes, de la high-tech, des biotechnologies et des solutions environnementales.
Le Jerusalem College of Technology (JCT) offre un vivier de chercheurs à Mafat, l’administration pour la recherche, le développement militaire et les infrastructures technologiques, au sein du ministère de la Défense.
Mafat est à l’origine du développement de tanks, de missiles antimissiles, de satellites et d’autres technologies militaires qui impressionnent la planète entière.
« Les diplômés du JCT représentent près d’un quart des chercheurs à Mafat », confie Stuart Hershkowitz, un responsable de l’administration de l’université au Times of Israel. « Nous avons également une forte présence au sein de l’unité technologique de la direction du renseignement militaire (Agaf Hamodiin). »
Hershkowitz fait également remarquer le grand nombre d’anciens élèves du JCT qui occupent des postes de directeurs ou d’employés dans les principales entreprises high-tech, notamment Israel Aerospace Industries et Elbit Systems Electro-optics (El-Op).
Fondé en 1968, JCT, qui s’appelait à l’origine Machon Lev, réunit près de 4 000 étudiants au sein de cinq programmes, tous adaptés aux étudiants religieux et ultra-orthodoxes.
Dès le lycée, le JCT forme les étudiants aux sciences dures (la physique, la chimie et les mathématiques pures) et offre une voie d’accès rapide aux meilleurs programmes technologiques de l’armée, tels que l’unité 8200, un programme militaire de renseignement et de développement technologique.
Si le JCT n’est pas directement lié à la branche militaire, ses diplômés
« sont partout dans l’armée et sont impliqués dans ses programmes technologiques les plus avancés », explique Hershkowitz. Les études sont elles une sorte de mélange entre le le MIT, Stanford et l’académie militaire de West Point.
« Notre rôle militaire n’a pas vraiment été évoqué au cours des années, car l’armée nous a demandé de ne pas le faire. Ce n’est que récemment qu’on nous a donné le feu vert pour révéler en partie ce qu’ont fait nos diplômés. »
Le tank Merkava, fabriqué en Israël et considéré comme l’un des tanks de combat les plus performants au monde, est l’une des contributions du JCT. « Nos diplômés sont à l’origine de nombreuses améliorations récentes du tank, notamment dans le domaine de l’électro-optique, une spécialité du JCT », explique Hershkowitz.
Parmi les fonctionnalités du dernier Merkava, figure le système de conduite du tir d’artillerie El-Op Knight Mark 4, doté d’une tourelle entièrement électrique et d’un système capable de protéger le tank en cas d’attaque par une arme antichars.
« Le responsable scientifique d’électro-optique au sein de l’armée, également diplômé du JCT, est en charge de la mise en place de tels systèmes dans les tanks Merkava », affirme Hershkowitz.
Des anciens du JCT sont également à l’origine de l’un des principaux développements dans la technologie satellitaire israélienne, une caméra petite et légère, mais ultra-précise.
« Israël est l’un des sept pays à avoir lancé des objets dans l’espace, mais à cause de notre emplacement, nous devons le faire avec des charges moins importantes que d’autres pays », explique Hershkowitz. Israël doit lancer ses satellites vers l’ouest, contre les vents dominants, étant donné que les lancements en direction des territoires arabes sont impossibles.
Pour s’assurer que les satellites israéliens résistent à l’attraction terrestre, ils doivent être plus légers que ceux d’autres pays. La caméra légère et compacte, en partie développée par El-Op, est utilisée à cette fin, précise Hershkowitz.
Beaucoup de diplômés du JCT travaillent dans des sociétés high-tech sans le moindre lien avec l’armée. En réalité, nombre d’entre eux lancent leur propre compagnie… et y emploient des alumni. « Près de 30 % des anciens du JCT sont salariés dans des entreprises qui ont été créées et sont dirigées par nos diplômés », précise Hershkowitz.
NDS en est un exemple. Cette société, spécialisée dans la technologie vidéo et basée à Jérusalem, a été rachetée par Cisco. Quatre des cinq membres-fondateurs sont des anciens du JCT.
« Il est par ailleurs remarquable que tous nos étudiants soient pratiquants. Les matins sont consacrés aux études religieuses et les après-midi aux études technologiques. Les journées sont très longues, mais ils ont le sentiment que cela en vaut la peine », affirme Hershkowitz.
De nombreux étudiants due JCT sont issus de milieux ultra-orthodoxes, pas spécialement réputés pour leur intérêt dans le secteur technologique. Mais ce soi-disant manque d’intérêt est un stéréotype inexact selon Hershkowitz. « Sur les 4 000 étudiants de nos programmes, environ 1 700 peuvent être considérés comme ultra-orthodoxes », déclare-t-il.
« Nous sommes en relation avec la plupart des dirigeants du monde ultra-orthodoxe, dont les directeurs des yeshivot lituaniennes et les rabbins des communautés hassidiques. » S’ils ne le reconnaîtraient jamais publiquement, ces autorités religieuses ont, de manière tacite, autorisé leurs étudiants à s’inscrire au JCT, même si l’enseignement ne correspond pas en tous points aux préceptes de la Torah.
Le JCT accueille également 600 jeunes femmes ultra-orthodoxes, qui mènent des études séparées en ingénierie et en soins infirmiers.
« La révolution dans l’intégration des ultra-orthodoxes au sein de la société israélienne se déroule ici et maintenant, de concert avec la révolution technologique rendue possible par nos diplômés », se félicite Hershkowitz.