Une ex-otage évoque sa vie après la captivité, un an après sa libération
Gabriela Leimberg parle du traumatisme de la captivité, de sa famille et ses amis - sa bulle - et du soutien qu'elle sent de la part du peuple israélien
Le 28 novembre sera le premier anniversaire de la libération de Gabriela Leimberg, de sa fille de 17 ans, Mia, et de sa sœur Clara Marman après deux mois de captivité entre les mains du Hamas à Gaza.
À l’époque, elles avaient laissé derrière elles le frère de Gabriela et Clara, Fernando Marman, ainsi que Luis Har, le partenaire de Clara, avec toutes les incertitudes d’une captivité aux mains du Hamas.
« [Le Hamas] nous a dit que nous étions tous sur la liste [des personnes à libérer], et ensuite qu’il n’y aurait que nous trois », explique Leimberg au Times of Israel.
« Cela a été un déchirement effroyable de laisser Fernando et de nous séparer, avec l’unique espoir que les libérations se poursuivent. »
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Tous les cinq avaient été enlevés le 7 octobre par des terroristes du Hamas dans le kibboutz Nir Yitzhak, avec le chien de Mia, un Shih Tzu nommé Bella, caché dans son pyjama. La famille s’était réunie pour passer le week-end et célébrer ensemble la fête de Sim’hat Torah chez Clara, à Nir Yitzhak.
Plus de deux mois plus tard, le 12 février, à la grande joie de la famille, Fernando et Luis étaient secourus par des soldats de Tsahal et ramenés chez eux en Israël.
Lorsque la brève trêve a pris fin le 30 novembre, laissant Fernando et Luis à Gaza, ce fut le début d’une période encore plus dure que la captivité, confie Leimberg.
« Savoir que vous avez des proches à Gaza est plus dur que d’être otage », poursuit-elle.
Les 53 premiers jours de captivité, les cinq membres de la famille ont été séquestrés ensemble.
Leimberg explique qu’ils avaient vu quelques images à la télévision et avaient connaissance du combat mené pour les faire libérer ainsi que de la trêve qui avait commencé fin novembre.
Ce n’est que lors des tout premiers jours du cessez-le-feu temporaire, du 24 au 30 novembre 2023, que Leimberg et ses proches ont constaté qu’ils libéraient des femmes âgées, des mères de famille et des enfants, mais pas d’hommes.
« Luis venait d’avoir 70 ans », rappelle Leimberg à propos du compagnon de sa sœur, « ce qui nous a laissé penser qu’il était sans doute l’otage le plus âgé et Mia », sa fille de 17 ans, « sans doute la plus jeune ».
Ils ont été surpris d’apprendre qu’il y avait des otages plus âgés, ainsi que des enfants, des tout-petits et même des bébés.
« Chaque soir, nous nous couchions sans savoir si nous serions libérés, puis nous comprenions que ce n’était pas encore notre tour », ajoute-t-elle. « Le cessez-le-feu [semblait avoir] pris fin, et nous ne savions pas si nous serions finalement libérés. »
La trêve initiale de quatre jours entre Israël et le Hamas a été prolongée de deux jours le 27 novembre 2023, puis une dernière fois, pour une journée, jusqu’au 30 novembre.
Leimberg, sa fille et sa sœur ont été libérées le 28 novembre.
Leimberg, qui est psychologue sociale et vit à Jérusalem, travaille depuis de nombreuses années avec des adultes ayant des besoins spéciaux. Elle n’a pas encore repris le travail. Elle reste dans sa petite bulle, composée de sa famille et d’amis, depuis l’attaque du 7 octobre et la captivité.
Sa famille vient de s’installer à son tour Jérusalem, et pour l’instant, elle se concentre sur sa rééducation et celle de ses proches.
« Je n’aurais jamais imaginé qu’à mon âge, à 60 ans, je souffrirais de ce genre de traumatisme », admet-elle.
Mia a obtenu son diplôme d’études secondaires en juin et continue sa vie, explique sa mère, avec le projet de faire son service militaire dans l’année qui vient.
Mais Clara Leimberg va à un rythme plus lent.
« Il y a des moments où retrouver ma vie d’avant, me lever le matin et aller travailler, mais pour l’instant, ma vie tourne autour de notre rééducation », confie-t-elle.
« J’étais otage et mon mari était seul », rappelle Leimberg. « Clara était à Gaza et ses filles en Israël. Nous savions que nous étions en vie, pas nos familles. Ils ne savaient pas ce qui nous était arrivé, et le désarroi des familles est difficile à comprendre. »
Aujourd’hui, un an plus tard, les membres de cette famille argentine qui aiment passer du temps ensemble continuent de se réunir, mais ce n’est plus la même chose.
Leimberg et les siens se retrouvaient toujours à Nir Yitzhak, le kibboutz dans lequel vivait Clara, pour célébrer les anniversaires et les fêtes avec des barbecues argentins et les petits plats qu’ils aiment.
Cinq habitants ont été tués au kibboutz Nir Yitzhak le 7 octobre et huit ont été présumés otages. Les cinq membres de la famille Marman-Leimberg ont été libérés et trois membres du kibboutz Nir Yitzhak ont été découverts plus tard, tués le 7 octobre. Leur corps avaient été pris en otage à Gaza.
Les corps de deux hommes, Lior Rudaeff et Tal Haimi, sont toujours détenus à Gaza, tandis que le corps d’Oren Goldin a été récupéré le 24 juillet par les soldats de Tsahal, et ramené en Israël pour y être inhumé.
« Clara n’est pas encore rentrée chez elle à Nir Yitzhak. Nous nous voyons, mais nous devons parfois nous séparer face à l’afflux de souvenirs », explique Leimberg.
« Nous avons cela en commun : cela fait partie de ce que nous sommes maintenant. »
Elle préfère ne pas s’étendre sur les conditions dans lesquelles ils étaient détenus en captivité.
« Lorsque vous êtes privé de liberté, vous ne pouvez prendre aucune décision vous-même et plane constamment la menace que votre vie prenne brutalement fin », poursuit-elle. « C’est l’enfer et nous avons eu une grande chance de pouvoir rentrer chez nous. »
Il reste encore 101 otages à Gaza et, bien qu’elle vive à Jérusalem, Leimberg fait en sorte de participer chaque semaine à la manifestation de soutien aux otages, le samedi soir, sur la Place des otages, à Tel Aviv.
« J’ai l’impression que je me dois d’y être », explique-t-elle. « Je suis maman et j’ai été une mère en captivité : en tant que femme et que mère, je me dois d’être avec les autres mères. »
Leimberg dit être entourée d’une bulle protectrice, faite de l’amour des siens, de ses amis et de tout le pays.
« Nous devons notre retour à notre pays, à l’armée, aux soldats et aux forces de l’ordre », affirme Leimberg. « J’ai, dans mon entourage proche, l’exemple d’un sauvetage réussi, mais grâce au cessez-le-feu temporaire, 105 otages ont été libérés, soit plus que n’importe quelle mission militaire. C’est ce que j’attends désormais : que tous les otages soient libérés en même temps. »
Ces derniers jours, Leimberg a regardé la photo qu’elle utilise désormais comme photo de profil WhatsApp.
Sur cette photo, (qui se trouve en illustration principale de cet article), on la voit avec son frère Fernando lors d’un récente manifestation de soutien aux otages, avec une véritable marée humaine derrière eux.
« C’est très fort pour nous », confie-t-elle. « L’une des choses auxquelles je pensais en captivité, c’est que nous rentrerions chez nous grâce à notre pays et à son combat pour nous. Cet amour m’enveloppe aujourd’hui encore. Je veux continuer à y croire. »
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