Une société israélienne vend un logiciel de suivi des réseaux sociaux à Budapest
Selon un responsable d’Avnon, la vente du logiciel a été approuvée par la Défense ; la Hongrie d’Orban accusée d’utiliser des logiciels espions israéliens contre des journalistes
Une société israélienne de technologie est sur le point de vendre à la Hongrie un logiciel de géolocalisation et de surveillance des activités sur les réseaux sociaux, a déclaré un haut responsable de la société au site jumeau hébreu du Times of Israel, Zman Yisrael.
Le groupe Avnon, un conglomérat high-tech basé à Kfar Saba, dans la banlieue de Tel Aviv, va fournir à Budapest une technologie qui permettra au gouvernement de surveiller les discussions en ligne et d’analyser et comprendre l’opinion publique, a déclaré le haut fonctionnaire.
Le groupe Avnon dit ignorer les raisons pour lesquelles le gouvernement hongrois souhaite obtenir le logiciel, au-delà de son intérêt général à surveiller l’opinion publique, selon le responsable.
Le fonctionnaire a toutefois indiqué que l’intérêt du gouvernement hongrois pour cette technologie pouvait être dû aux tensions sociales et politiques croissantes en Hongrie suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie et à l’entrée de dizaines de milliers de réfugiés ukrainiens dans le pays, dont certains de manière illégale.
Ces dernières années, la Hongrie a été de plus en plus critiquée pour ses violations des droits de l’homme, notamment à l’encontre de la communauté LGBTQ et des femmes, ainsi que de la minorité rom du pays. Budapest a également été accusée d’utiliser le puissant logiciel Pegasus du groupe israélien NSO pour pirater et surveiller les téléphones de journalistes, de politiciens et de militants des droits de l’homme.
Une enquête internationale a établi que Budapest avait bien espionné des journalistes et des photographes du média hongrois Direct 36, suite aux révélations par ce dernier d’agissements douteux au sein des gouvernements russe et hongrois, ainsi que des chercheurs qui travaillaient pour le milliardaire George Soros, auquel le Premier ministre hongrois Viktor Orban est farouchement opposé.
En mars dernier, l’Union européenne a annoncé qu’elle ouvrait une enquête sur l’utilisation alléguée du logiciel Pegasus par la Hongrie et la Pologne.
Selon le fonctionnaire, toutes les ventes du groupe Avnon à des pays étrangers sont approuvées par le ministère de la Défense, y compris celle à la Hongrie. Le ministère de la Défense n’a pas fait de commentaire sur cette affaire.
Israël a été très critiqué pour ce que certains ont qualifié de complaisance à l’égard de la vente de technologies de surveillance puissantes à des pays dont le bilan en matière de droits de l’homme est douteux. À la suite de ces critiques, le gouvernement a déclaré qu’il allait appliquer des réglementations plus strictes à ces ventes, mais ces dernières semaines, le ministère de la Défense a annoncé qu’il assouplissait les formalités administratives.
Orban est un farouche opposant à l’immigration. C’est également un fidèle partisan du dirigeant russe Vladimir Poutine, qu’il critique rarement. À la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, vivement dénoncée par une grande partie du monde, les opinions d’Orban ont amplifié les tensions entre la Hongrie et l’OTAN et l’Union européenne, dont elle fait partie, tout en attisant la discorde interne.
Le groupe Avnon a été créé en 1990 et son conseil consultatif comprend deux anciens généraux de Tsahal, un ancien chef de police et un ancien chef de l’agence d’espionnage du Mossad. L’entreprise développe, fabrique et commercialise des armes de pointe, y compris des outils cybers.
La guerre en cours en Ukraine a considérablement augmenté les opérations de la société en Europe de l’Est, notamment en Pologne, en République tchèque et en Lituanie. Cela s’explique principalement par le fait que ces pays craignent d’être eux aussi confrontés à une agression russe, ce qui entraînerait une course aux armements.
D’autres entreprises israéliennes ont également vu une hausse de leurs ventes en Europe de l’Est depuis le début de l’année. Les entreprises israéliennes du secteur de la défense n’ont pas vendu d’armes et de munitions de pointe directement à l’Ukraine, car le gouvernement l’interdit. Mais ces ventes ont tout de même eu lieu en utilisant des pays tiers pour agir comme intermédiaires.
À titre d’exemple, Zman Yisrael a récemment découvert qu’une entreprise israélienne – l’une des six qui fabriquent des technologies de défense contre les drones – a vendu ses technologies à l’Ukraine par l’intermédiaire d’un tiers.
La version hébraïque de cet article a d’abord été publiée sur le site frère du Times of Israel, Zman Yisrael, ici.