Yom Yeroushalayim : Herzog rappelle que la « haine gratuite » mène à la destruction
Le président appelle à l'unité, alors que les négociations sur les réformes sont dans l'impasse et que les nationalistes organisent une marche controversée dans la capitale
Le président Isaac Herzog a mis en garde jeudi contre le risque de voir les haines internes mener à la destruction, dans des propos marquant Yom Yeroushalayim, qui célèbre la réunification de Jérusalem sous contrôle israélien, mais qui a été entachée ces dernières années par une marche nationaliste controversée à travers le quartier musulman de la Vieille Ville.
Herzog s’est exprimé alors que, d’après les dirigeants du gouvernement, les pourparlers organisés par le président en vue de parvenir à un compromis sur la réforme judiciaire de la coalition sont toujours dans l’impasse. Ladite refonte a révélé des lignes de fracture au sein de la société israélienne et a déclenché des manifestations massives et des discordes politiques.
Le voyage sans fin de Jérusalem « nous a enseigné, en tant que société et pays, qu’il n’y a qu’une seule façon d’entreprendre cette route : ensemble », a déclaré Herzog lors d’une cérémonie officielle organisée par l’État.
« En ce Yom Yeroushalayim », Herzog a ajouté qu’il lui semblait particulièrement important de citer la phrase des sages juifs « selon laquelle la haine gratuite a détruit Jérusalem – et j’insiste sur ce point : La haine gratuite n’est pas seulement une raison, mais aussi une conséquence ; il y a des facteurs qui y conduisent ».
Selon différents textes rabbiniques, la destruction du second temple de Jérusalem il y a 2 000 ans et la dispersion des anciens Israélites est expliquée par les relations toxiques entre les sectes juives rivales de Jérusalem.
Herzog a ajouté que les histoires de haine et de destruction à travers l’histoire juive découlent toutes d’une incapacité « à gérer le désaccord, à résoudre le différend, à mettre de côté le débat interne sur le chemin de la paix. C’est ce qui conduit à la haine, et la haine conduit à la destruction ».
« Le peuple juif doit tirer les enseignements de ces leçons et les mettre en pratique », a-t-il déclaré.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a suspendu le travail législatif autour de la réforme du système judiciaire au mois de mars à la suite de manifestations de masse et d’une grève générale organisée en réponse au limogeage par Netanyahu du ministre de la Défense Yoav Gallant, ouvrant ainsi la voie à des pourparlers de compromis entre les représentants de l’opposition et de la coalition, sous l’égide de Herzog.
Mais après près de deux mois de discussions entre les équipes représentant la coalition et les deux plus grands partis de l’opposition, aucun progrès tangible n’a été réalisé, selon des sources proches du dossier.
Jusqu’en mars, la coalition s’était empressée de présenter un projet de loi prévoyant de soumettre la plupart des nominations judiciaires au contrôle du gouvernement et de limiter les pouvoirs de la Cour suprême de justice en matière de surveillance.
Selon les critiques, cette loi privera la Haute Cour de justice de ses contre-pouvoirs face au gouvernement et affaiblira ainsi dangereusement le caractère démocratique de l’État d’Israël. Les partisans de la réforme affirment, eux, que la législation est nécessaire pour contrôler ce qu’ils considèrent comme un système judiciaire trop interventionniste.
Pour le moment, la coalition se concentre sur l’adoption du budget de l’État, crucial, mais une fois le budget approuvé, le gouvernement reviendra probablement à son programme de réforme du système judiciaire.
Les efforts du gouvernement pour adopter le budget ont également été marqués par des luttes intestines au sein de la coalition, les différents partis se disputant les financements.
Des milliers d’Israéliens ont participé jeudi à la « Marche des drapeaux » organisée à l’occasion de Yom Yeroushalayim. Cet événement annuel très controversé a de nouveau été marqué par des chants racistes et des affrontements avec des résidents palestiniens, alors que les participants nationalistes religieux, essentiellement des adolescents, se frayaient un chemin à travers le quartier musulman de la Vieille Ville.
La parade annuelle vers le mur Occidental marque la réunification de Jérusalem-Est et de Jérusalem-Ouest par Israël lors de la guerre des six jours de 1967, mais elle a gagné en notoriété au fil des ans car elle est souvent entachée de discours de haine et de violence de la part de participants juifs d’extrême droite à l’égard des Palestiniens et de leurs biens.
L’aspect particulièrement sensible de la Marche des drapeaux est son itinéraire à travers la porte de Damas et le quartier musulman, fréquentés principalement par des Palestiniens. Les critiques affirment que le rassemblement a pour but de provoquer les Palestiniens, qui sont contraints par la police israélienne de fermer leurs magasins pour permettre la tenue de la manifestation.
Parmi les manifestants se trouvaient plus d’une douzaine de membres de la coalition, dont le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, qui participe depuis longtemps au rassemblement. Mais c’était la première année qu’il y participait à titre de ministre, conférant ainsi une légitimité supplémentaire à cette manifestation qui a fait couler beaucoup d’encre.
Différents groupes de participants à la Marche des drapeaux se sont affrontés, ont frappé des Palestiniens et ont harcelé des journalistes. Ils ont également entonné des chants racistes tels que « Mort aux Arabes », « Que votre village brûle » et « Un Arabe est un fils de p*** », tout en dansant près de la porte de Damas avant et pendant le rassemblement de jeudi après-midi.