Israël en guerre - Jour 532

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Opinion

Adam Boehler, l’envoyé de Trump pour les otages, complaisant, confus et dangereusement naïf

Les dirigeants du Hamas doivent rire d'incrédulité après leurs échanges avec un homme qui dit essayer d'identifier leurs « aspects humains » ; personne ne rit en Israël, et surtout pas les familles des otages

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

L'envoyé américain pour la libération des otages, Adam Boehler, lors d'une interview sur CNN, le 9 mars 2025. (Crédit : Capture d'écran CNN)
L'envoyé américain pour la libération des otages, Adam Boehler, lors d'une interview sur CNN, le 9 mars 2025. (Crédit : Capture d'écran CNN)

Je vous présente Adam Boehler, l’envoyé du président américain Donald Trump pour les otages.

Le Hamas l’a déjà rencontré, à une ou plusieurs reprises lors de négociations récentes (Boehler refuse de préciser combien).

Dimanche, c’était au tour des Israéliens de le découvrir, lors d’un véritable marathon d’interviews télévisées – au moins deux sur des chaînes américaines et plus de quatre sur des médias israéliens.

Il y en a peut-être eu davantage. Il était difficile de suivre le rythme. Comprendre ce qu’il racontait l’était encore plus.

1. Il qualifie les prisonniers sécuritaires palestiniens « d’otages »

Boehler, qui a déjà travaillé pour Trump lors de son premier mandat, emploie parfois le terme « otages » pour désigner les prisonniers sécuritaires palestiniens – y compris des terroristes responsables de massacres de masse. « Ils échangent des quantités considérables d’otages contre une seule personne », a-t-il déclaré, par exemple, lors d’une interview sur la Treizième chaîne israélienne.

2. Il qualifie les otages israéliens de « prisonniers »

Il arrive également à Boehler d’inverser les rôles, en parlant des otages israéliens enlevés par le Hamas et d’autres groupes terroristes lors du pogrom du 7 octobre comme s’ils étaient des « prisonniers ».

« Je pense qu’il existe un accord permettant de libérer tous les prisonniers, et pas seulement les Américains », a-t-il déclaré lors d’un entretien à CNN.

Quelques heures plus tard, il a déclaré à la chaîne israélienne N12 que ses discussions avec le Hamas visaient à « ouvrir des négociations plus larges sur l’ensemble des prisonniers », ajoutant que « le président a été clair sur le fait que nous ne nous concentrons pas uniquement sur les Américains, les Américano-Israéliens, mais sur l’ensemble des Israéliens ».

Bien sûr, tout le monde fait parfois des erreurs de langage. Mais lorsqu’il s’agit des otages et des prisonniers, ces mots ne sont pas des détails : ils sont au cœur de son travail. On pourrait penser qu’il ferait au moins l’effort de distinguer les deux.

En outre, quand il ne confond pas otage et prisonnier Boehler semble avoir du mal à retenir le nom du seul otage américain encore en vie et a à deux reprises dimanche, appelé Edan Alexander, « Adi », qui est en réalité le prénom du père d’Edan).

3. Il tente de « s’identifier aux éléments humains » des dirigeants du Hamas

Boehler a déclaré à CNN que sa stratégie de négociation avec les représentants du Hamas – c’est-à-dire les dirigeants d’une organisation terroriste qui a massacré plus de 1 200 personnes en Israël, brûlant des familles dans leurs maisons, violant et torturant des civils, et qui a juré de recommencer dès que l’occasion se présenterait, consiste à « s’identifier aux aspects humains de ces personnes, puis à construire à partir de là ».

Interrogé par Jake Tapper sur ce que cela lui faisait, en tant que Juif américain, de s’asseoir avec des « meurtriers antisémites », Boehler a reconnu que « lorsqu’on sait ce qu’ils ont fait, il est difficile de ne pas y penser ». Mais il a poursuivi en affirmant que « l’approche la plus productive est de comprendre que chaque facette d’une personne reste humaine ».

4. Il affirme que Trump a personnellement approuvé ses discussions… ou pas

Boehler a donné deux réponses contradictoires à la question pourtant très simple de savoir si Trump avait personnellement approuvé ses pourparlers directs avec le Hamas.

Tapper lui a demandé : « Vous avez donc obtenu l’accord du président Trump à l’avance ? » et Boehler a hoché la tête trois fois et a répondu : « Bien sûr ».

Quelques heures plus tard, Yonit Levy de N12 lui a posé une question similaire, demandant si Trump avait « personnellement approuvé vos » discussions avec le Hamas. Cette fois, Boehler a répondu en disant que « la Maison Blanche l’a fait. Il s’agit donc d’un groupe de personnes. Mais les gens de la Maison Blanche savaient que j’avais eu ces discussions, oui ».

L’émissaire américain pour les otages, Adam Boehler (à droite), lors d’une interview avec Jake Tapper sur CNN le 9 mars 2025 (Crédit : capture d’écran CNN).

5. Il critique publiquement l’accord sur les otages négocié par Israël, qu’il juge trop généreux pour le Hamas

Plutôt que de présenter un front uni entre alliés face aux terroristes qui détiennent toujours des otages israéliens (et d’autres a la double nationalité américaine et israélienne), Jusqu’à présent, Israël a libéré quelque 2 000 prisonniers palestiniens en échange de 33 otages israéliens. Un rapport de force que Boehler considère comme inacceptable. « Aux États-Unis, nous n’aurions pas conclu un tel accord », a-t-il affirmé à la Treizième chaîne.

6. Et il établit publiquement une distinction entre les intérêts américains et israéliens

Lors de son interview sur CNN, Boehler a tenu à marquer une distance entre les États-Unis et Israël en ce qui concerne les négociations. « Nous sommes les États-Unis. Nous ne sommes pas un agent d’Israël. Nous avons des intérêts spécifiques en jeu », a-t-il souligné.

7. Il affiche une indifférence cinglante face aux inquiétudes d’Israël sur ses discussions avec le Hamas

Boehler a déclaré sans détour qu’il ne se souciait pas vraiment du fait que Ron Dermer, ministre israélien des Affaires stratégiques et homme de confiance de Netanyahu, soit furieux de ses rencontres en face-à-face avec les chefs terroristes du Hamas.

« Sans vouloir offenser Dermer, je n’y accorde pas beaucoup d’importance », a indiqué Boehler sur la Treizième chaîne. Et d’ajouter avec désinvolture : « Si chaque fois que Dermer s’énervait un peu, c’était un drame… Ron aurait des crises tous les jours. »

Tentant d’adoucir ses propos, il a ajouté, « J’adore Ron. Nous retravaillerons ensemble. C’était super. Je ne prends pas ombrage de sa réaction, il a fait ce qu’il était censé faire. »

8. Il utilise « gentils » et « Hamas » dans la même phrase – deux fois

Lors de son interview sur CNN, Boehler a deux fois utilisé l’expression « gentils » en parlant du Hamas, dans des formulations tellement alambiquées qu’il a dû ensuite publier une mise au point, expliquant que ses propos avaient été mal interprétés.

La première fois, il évoquait encore la contrariété de Dermer. « J’ai parlé avec Ron, et je compatis. Il voit quelqu’un qu’il ne connaît pas bien entrer en contact direct avec le Hamas. Peut-être que lorsque je les ai vus, j’ai pensé : ‘Regardez, ils n’ont pas de cornes qui leur poussent sur la tête. Ce sont des gens comme nous. Ils sont plutôt gentils.’ »

La seconde fois, il a affirmé qu’Israël savait que ses échanges avec le Hamas finiraient par être bénéfiques pour Israël. « Israël sait très bien qu’au terme de ces discussions, ce n’est pas comme si le Hamas avait gagné le monde parce que je pensais qu’il s’agissait d’une bande de gentils gars. »

Quelques heures plus tard, constatant que ces déclarations avaient provoqué une vague d’indignation, Boehler a publié une mise au point, avec un recours Trumpien aux MAJUSCULES :

« Je veux être TRÈS CLAIR car certains ont mal interprété mes propos. Le Hamas est une organisation terroriste qui a assassiné des milliers d’innocents. Ce sont PAR DÉFINITION de mauvaises personnes. Et comme l’a dit @POTUS, pas un seul membre du Hamas ne sera en sécurité si le Hamas ne libère pas TOUS les otages IMMÉDIATEMENT. »

9. Il n’a manifestement pas exigé la libération immédiate de tous les otages

Contrairement à ce qu’il a affirmé dans sa mise au point en lettres capitales, Boehler n’a jamais exigé du Hamas qu’il « LIBÈRE TOUS LES OTAGES IMMÉDIATEMENT ».

Ce qu’il a réellement expliqué dans ses interviews, c’est qu’il cherchait avant tout à « relancer des négociations dans une situation très fragile ».

Sur CNN, il a dit vouloir « dire au Hamas : ‘Quelle est la finalité que vous voulez ici ? Pas la fin rêvée, mais ce que vous pensez être réaliste à ce stade’. »

L’otage israélien Eli Sharabi, retenu par le Hamas à Gaza depuis le 7 octobre 2023, escorté par des terroristes armés du Hamas avant d’être remis à la Croix-Rouge, à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 8 février 2025. (Crédit : Abdel Kareem Hana/AP)

10. Il pense que le Hamas finira par se fondre dans la masse

Boehler affiche une naïveté dangereuse quant aux intentions réelles du Hamas, comme si le 7 octobre n’avait jamais eu lieu et comme si le groupe terroriste, pour tenter d’assurer sa survie, n’utilisait pas chaque once d’influence acquise en retenant, torturant et parfois assassinant les otages qu’il est censé aider à libérer.

Le Hamas a déclaré au monde qu’il répéterait le 7 octobre aussi souvent que possible jusqu’à ce qu’Israël soit détruit. « Israël est un pays qui n’a pas sa place sur notre terre », a déclaré Ghazi Hamad, membre du bureau politique du Hamas, à la télévision libanaise, deux semaines à peine après le massacre, avant de préciser que, oui, il voulait dire qu’il fallait l’anéantir. « Le déluge d’Al-Aqsa [nom donné par le Hamas aux massacres du 7 octobre] n’est que la première fois, et il y en aura une deuxième, une troisième, une quatrième… Personne ne devrait nous blâmer pour les choses que nous faisons. Le 7 octobre, le 10 octobre, le millionième octobre, tout ce que nous faisons est justifié ».

Mais Boehler sait mieux.

Sur N12, il a affirmé avec sérieux que ces déclarés génocidaires finiront par rendre leurs armes et renoncer à tout rôle politique à Gaza – que le Hamas, en bref, choisira de se fondre dans la masse, de ne plus être le Hamas. Interrogé par Yonit Levy pour savoir s’il pensait « de manière réaliste » que le Hamas finirait par accepter de déposer ses armes et de ne pas faire partie de l’avenir politique de Gaza, il a répondu sans hésitation : « Je le crois oui ».

**

Difficile de comprendre pourquoi Boehler aurait soudainement reconsidéré sa réponse initiale sur l’aval personnel de Trump à ses rencontres directes avec le Hamas, puisque l’ancien président lui-même a confirmé et défendu cette démarche. « Nous aidons Israël en organisant ces discussions parce que nous parlons d’otages israéliens », a déclaré Trump à des journalistes depuis le bureau ovale jeudi. « Nous ne faisons rien pour le Hamas. Nous ne leur donnons pas d’argent… Il faut négocier. Il y a une différence entre négocier et payer. Nous voulons faire sortir ces gens. »

Peut-être Boehler commence-t-il à réaliser qu’il a mal géré sa mission. Comme l’a tweeté l’ancien ambassadeur de Trump en Israël, David Friedman, dimanche dernier, « la semaine dernière, le président Trump a brillamment présenté au Hamas un choix binaire : libérer tous les otages et se rendre, ou être détruit. C’est le seul moyen de mettre fin à la guerre ».

Friedman a poursuivi en fustigeant Boehler, qui a « pris la décision sans précédent de rencontrer le Hamas pour envisager une troisième voie : voir s’il était possible de conclure un accord où le Hamas ‘ne serait pas impliqué’ dans la gouvernance de Gaza. Un accord avec le Hamas est une perte de temps et ne sera jamais respecté. Tenter un tel accord est indigne des États-Unis. Adam, je sais que vous voulez bien faire, mais écoutez votre patron. Le choix doit rester binaire ».

Mais encore une fois, à en juger par la satisfaction affichée par Boehler dans ses interviews, il semble peu probable qu’il remette en question sa propre performance. Il a même souri à plusieurs reprises en indiquant qu’il pourrait bien « passer » à nouveau sur le Hamas.

Il ne fait aucun doute que le Hamas, qui doit rire d’incrédulité devant l’envoyé que Trump lui a envoyé – un homme aux antipodes de Steve Witkoff, l’envoyé sérieux et empathique que Trump a dépêché pour le Moyen-Orient, en qui les familles des otages placent tant d’espoir – serait probablement trop heureux de le revoir.

L’envoyé américain au Moyen-Orient Steve Witkoff (deuxième à partir de la droite) rencontre quatre soldats de Tsahal libérés de leur captivité à Gaza, au centre médical Rabin à Petah Tikva, le 30 janvier 2025. (Crédit : Capture d’écran/ Ambassade des États-Unis)

Quoi qu’il en soit, c’est Trump qui a choisi Boehler pour incarner l’Amérique face au Hamas, récompensant ainsi le groupe terroriste pour son assaut monstrueux du 7 octobre en lui offrant une légitimité sans précédent dans des négociations directes.

Et, en fin de compte, c’est Benjamin Netanyahu qui a laissé le vide dans lequel Trump a décidé d’insérer Boehler.

Pendant des mois, Netanyahu a délibérément évité de mettre en œuvre l’accord d’otages et de cessez-le-feu qu’il avait pourtant approuvé avec son cabinet et transmis aux États-Unis en mai. Et lorsqu’en janvier, après de longues semaines de blocage, la première phase du plan – une libération progressive des otages contre des prisonniers palestiniens et un cessez-le-feu partiel – a enfin commencé, Netanyahu a refusé de passer à l’étape suivante. Cette seconde phase, selon l’accord initial, devait permettre la libération de 24 otages vivants, en échange de nouveaux prisonniers, du retrait total de Tsahal de Gaza et d’un cessez-le-feu permanent. Résultat : depuis le 1er mars, le Hamas profite – de manière scandaleuse et insoutenable – de tous les bénéfices d’une cessation des hostilités, sans avoir libéré un seul otage supplémentaire.

C’est également Netanyahu qui a éjecté des négociations deux des figures les plus expérimentées du renseignement israélien : le chef du Mossad, David Barnea, et le chef du Shin Bet, Ronen Bar. Deux hommes de terrain, qui ont consacré leur vie à la sécurité d’Israël. À leur place, il a mis Ron Dermer, son fidèle stratège politique, dont le seul véritable atout est de parler le langage de Trump.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, s’entretenant avec le chef de l’agence de renseignement du Mossad, David Barnea, au siège de Tsahal, à Tel Aviv, le 15 octobre 2023. (Crédit : Kobi Gideon/GPO)

Netanyahu peut bien se plaindre du travail de Barnea et Bar, mais eux, contrairement à Boehler, ne se bercent pas d’illusions sur les intentions génocidaires du Hamas.

Comme les officiers de Tsahal, ils sont convaincus qu’Israël aurait dû aller de l’avant avec l’accord et obtenir d’urgence la libération de tous les otages. Parce qu’ils savent que le Hamas finira inévitablement par violer le cessez-le-feu et que cela donnera à Israël une légitimité absolue pour reprendre la guerre, dans de meilleures conditions, une fois les otages en sécurité.

Le président américain Donald Trump s’exprimant aux côtés de l’ancienne otage Noa Argamani et de son envoyé Adam Boehler lors du défilé inaugural à l’intérieur de la Capital One Arena, à Washington, le 20 janvier 2025. (Crédit : Angela Weiss/AFP)

Aujourd’hui, Netanyahu a perdu le contrôle de la stratégie et de la tactique dans la bataille contre le Hamas – au profit d’un président américain qui a accueilli publiquement les otages libérés dans son bureau, a compris que le public israélien privilégiait massivement le retour du reste des otages plutôt que la reprise de la guerre, et a conclu qu’il pouvait mieux gérer la situation que Netanyahu.

Un président américain qui, espérons-le, soulagera bientôt le fardeau des négociations en se séparant d’un envoyé qui, après une tournée d’interviews incohérentes, a finalement dû préciser que le Hamas est « PAR DÉFINITION, une MAUVAISE PERSONNE ».

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