Au Technion, la qualité de l’enseignement, et non la discrimination positive, fait tripler le nombre d’étudiants arabes
Le Technion propose des prépas de 10 mois en maths, physique, anglais et hébreu, financées par des philanthropes juifs
L’université technologique la plus prestigieuse d’Israël a vu le nombre de ses étudiants arabes tripler au cours de la dernière décennie. Cette croissance s’expliquerait, selon le président du Technion, non pas par une discrimination positive, qui n’est pas pratiquée dans son université, mais plutôt par le désir de combler les disparités éducatives.
Le Bureau central des statistique a déterminé que les Arabes constituent 20,7 % des 8 412 millions de citoyens israéliens en 2015. Mais le journal Haaretz cite le Conseil de l’Enseignement supérieur, et indique que le taux d’étudiants arabes dans l’enseignement supérieur n’a pas beaucoup augmenté au cours des cinq dernières années, passant de 9,3 % à 13,2 %.
Mais l’école qui fait exception à ces chiffres, c’est le Technion, l’Institut de technologie d’Israël, la prestigieuse université, parfois surnommée « le MIT israélien », où 20 % des étudiants sont arabes.
Le professeur Peretz Lavie, président du Technion a déclaré au Times of Israel que les accomplissements de son université sont le résultat d’un programme rigoureux qui prépare les étudiants aux conditions d’admission avant qu’ils ne s’inscrivent. C’est, explique-t-il, un rejet total de la discrimination positive, une stratégie qui consiste à assouplir les prérequis pour les populations désavantagées.
Il y a 12 ans, seulement le corps étudiant ne comptait que 7 % d’Arabes. C’est cette année que l’université à lancé le programme NAM, un acronyme en hébreu, que l’on peut traduire par « l’excellence de la jeunesse arabe ». Ce programme est financé par des mécènes juifs, et commence par un « camp d’entraînement » de 10 mois en mathématiques, en physique, en anglais et en hébreu.
L’homme d’affaires et philanthrope israélien Eitan Wertheimer est le fondateur et mécène principal du programme, dont 300 étudiants ont bénéficié à ce jour.
Les frais de scolarité des participants sont entièrement pris en charge. Ils reçoivent également une bourse mensuelle de 800 shekels (197 €) et un ordinateur portable. Libérés de contraintes financières, les étudiants peuvent s’adonner pleinement à leurs études.
Après ce cours préparatoire, les participants, admis pour ce programme sur la base de leurs résultats du lycée, sont prêts à s’inscrire au Technion, et ont le même niveau scolaire que tous les autres candidats.
Durant une discussion récente à la Knesset, le député Bezalel Smotrich (HaBayit HaYehudi) a prétendu que « les étudiants arabes entrent au Technion parce qu’ils assouplissent les prérequis à l’admission au nom de la discrimination positive ».
Lavie a rejeté cette accusation. « Il n’y a aucune discrimination positive au Technion. Pour aucun groupe ni dans aucune des facultés », a-t-il précisé.
Le programme NAM a permis aux étudiants de réussir le processus d’admission, mais il a également contribué à la baisse du taux de décrochage.
Lorsque le programme a commencé il y a 12 ans, le taux de décrochage pour les étudiants arabes en première année au Technion était de 75 %. Actuellement, selon Lavie, ce taux est descendu à 15 %, un chiffre proche de celui du corps étudiant juif.
Durant leurs études, on attribue un mentor aux participants du programme NAM et des groupes de discussion permettent aux étudiants de s’adapter au nouvel environnement universitaire et à gérer les problèmes émotionnels qui pourraient survenir.
« C’est la première fois qu’ils quittent la maison », indique Lavie, en précisant que les étudiants arabes ont entre 3 et 4 ans de moins que leurs homologues juifs, parce qu’ils n’ont, pour plupart, pas effectué de service militaire.
« L’adaptation émotionnelle est aussi importante que l’adaptation académique », souligne Lavie.
Lavie a également précisé que sur 527 étudiants arabes, 61 % sont des femmes. Cette information est encourageante pour le potentiel économique de la communauté arabe, où les taux de chômages sont extrêmement bas, parce que la majorité des femmes ne travaillent pas.
« Je ne pense pas qu’il y ait un parallèle avec d’autres universités, même au sein de la population juive. Au Technion, 37 % des étudiants sont des femmes, 63 % sont des hommes », indique-t-il.
Lavie pense que le désir d’une « mobilité sociale » explique le taux de femmes arabes dans son université. Pour lui, c’est « sans aucun doute, une question d’éducation ».
« Pour de nombreux jeunes arabes, décrocher un diplôme du Technion, c’est un moyen de trouver un travail correct. »
Le salaire moyen pour la population arabe en Israël est équivalente à la moitié du salaire moyen de la population juive, selon les chiffres du Bureau central des Statistiques en 2015. Le taux de chômage chez la population arabe en âge de travailler étant de près de 50 %, entrer dans l’industrie florissante du high-tech pourrait mettre un terme à ce cycle de pauvreté.
Une enquête menée auprès de 1 500 jeunes diplômés arabes du Technion a montré qu’ils ont presque tous trouvé du travail dans l’année qui a suivi leur remise de diplôme. 20 % des sondés sont employés par des sociétés high-tech internationales.
En octobre, Haaretz a accusé le Technion d’avoir « épuré » les étudiants arabes en augmentant le résultat requis à l’examen d’hébreu, passé de 105 à 113. La note la plus élevée est 150, et la moyenne est de 92, a indiqué Haaretz.
Mais Lavie a soutenu que ce nouveau prérequis est une mesure en leur faveur, et que l’article était hors sujet.
« Haaretz était vicieux et hors-sujet. Nous avons réalisé que l’hébreu est la clef du succès pour les étudiants du Technion, et que le nombre de décrochage en première année dépend du niveau d’hébreu », explique-t-il.
Il a indiqué que la décision de relever le niveau du résultat a été prise après deux ans de délibérations, et n’entrera en vigueur que l’an prochain, ce qui permet aux futurs étudiants de se préparer à ce nouveau standard.
Et pourtant, même si le nombre d’étudiants arabes a grimpé en flèche ces dernières années, le nombre d’étudiants qui poursuivent en Master n’a pas augmenté proportionnellement. C’est un fait de la vie quotidienne, analyse Lavie.
De nombreux étudiants arabes doivent être financièrement indépendants ou aider leurs familles le plus tôt possible. Continuer pour quelques années d’études de master ou de doctorat n’est pas envisageable. Mais, tout comme les admissions, ce problème est étudié par l’école.
« Nous cherchons à augmenter le nombre de titulaires de masters, de doctorants et de post-doctorants afin d’augmenter le nombre d’arabes dans le corps professoral », explique Lavie.
« C’est notre prochain défi. Nous avons des enseignants arabes, mais pas suffisamment. »
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