Ben Gvir annule l’audience du chef de la police, sans renoncer pour autant à le limoger
Après que la procureure-générale a estimé que ce renvoi serait illégal, le ministre a juré de présenter le licenciement du commissaire devant le cabinet, en lien avec l'enquête sur la catastrophe du mont Meron ; Lapid s'insurge
Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a indiqué dans la soirée de mardi qu’il continuerait à chercher à faire renvoyer de son poste le commissaire de la police israélienne Kobi Shabtai, après que la procureure-générale lui a interdit de convoquer Shabtai à une audience préliminaire à son limogeage.
La procureure-générale Gali Baharav-Miara avait fait savoir au ministre d’extrême-droite, dans un courrier transmis lundi, que cette convocation était illégale et qu’elle devait être annulée, ajoutant qu’il n’avait pas apporté de raisons suffisantes permettant de justifier ce limogeage et que la situation semblait indiquer qu’il avait « des mobiles cachés ».
Ben Gvir avait annoncé, lundi, qu’il examinait la possibilité de mettre un terme prématuré au mandat de Shabtai, qui doit quitter son poste dans deux mois. Il avait expliqué avoir pris sa décision au vu du comportement dysfonctionnel général, selon lui, de ce dernier.
Toutefois, cette recommandation en faveur du départ du commissaire, de la part de Ben Gvir, était arrivée vingt-quatre heures seulement après que Shabtai a informé la procureure-générale que le ministre intervenait illégalement dans les activités de la police.
Suite à la missive envoyée par Baharav-Miara, le Mouvement pour un Gouvernement de Qualité a déposé une requête auprès de la Haute-cour, réclamant une injonction interdisant la tenue de l’audience.
Dans sa réponse à cette requête, Ben Gvir a prétendu que la procureure-générale avait écrit le courrier sans pour autant avoir l’autorité nécessaire pour le faire, ajoutant qu’il allait néanmoins annuler l’audience « et qu’en conséquence, cette requête est superflue ».
Il a précisé qu’il avait l’intention « d’agir conformément aux conclusions de la commission d’enquête d’État qui était chargée de la catastrophe du mont Meron et je vais présenter la question de la fin du mandat du commissaire au cabinet dans les dix jours. »
Le ministre faisait ici référence au désastre survenu sur le mont Meron en 2021, où 41 personnes avaient trouvé la mort dans un mouvement de foule survenu au tombeau d’un sage du 2e siècle sur ce site de pèlerinage du nord d’Israël.
Au mois de mars, une commission d’État avait présenté des conclusions accablantes, estimant que Shabtai – ainsi que le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le président de la Knesset Amir Ohana, qui était ministre de la Sécurité intérieure en 2021 – avaient tous une responsabilité personnelle dans ce qui avait été la pire catastrophe en temps de paix de toute l’Histoire du pays.
La commission avait recommandé le départ de Shabtai de son poste – une décision dont la date d’exécution avait toutefois été laissée au bon vouloir du gouvernement en raison de la guerre à Gaza.
Le gouvernement de Netanyahu avait fustigé les conclusions de la commission, estimant qu’elles étaient de nature politique et il a jusqu’à présent refusé d’en discuter.
Le leader de l’opposition, Yair Lapid, a rétorqué, mardi soir, que « si le gouvernement tente de faire renvoyer le commissaire de police conformément aux conclusions de la commission d’enquête chargée du mont Meron, il n’a d’autre choix que de mettre en vigueur les autres conclusions et, avant tout, il n’a d’autre choix que de limoger Netanyahu ».
Baharav-Miara, dans sa propre présentation soumise à la Haute-cour quelques heures après la réponse apportée à la requête par Ben Gvir, a répété que le positionnement du ministre indiquait qu’il agissait encore de mauvaise foi.
« Il y a une réelle inquiétude de mobiles cachés de la part du ministre dans la mesure où jusqu’à présent et pendant des mois, le ministre n’a rien fait pour mettre un terme au mandat du commissaire », malgré les conclusions de la commission d’enquête sur le mont Meron, a-t-elle écrit.
Dans sa lettre écrite mardi matin, Baharav-Miara avait fustigé l’intention du ministre d’extrême-droite de convoquer Shabtai à une audience.