Blinken a menacé d’annuler la visite de Biden en Israël après le 7 octobre
Le secrétaire d'État a raconté avoir pris cette initiative auprès des responsables israéliens pour presser ces derniers de laisser entrer l'aide à Gaza dans les premiers jours de la guerre
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a révélé samedi que, dans les premiers jours qui avaient suivi le pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023, il avait dû menacer Israël en disant que le président Joe Biden ne se rendrait pas comme prévu en Israël – à moins que les responsables israéliens n’autorisent l’entrée de l’aide dans la bande de Gaza.
Au cours d’une vaste interview accordée au New York Times à la fin de son mandat, Blinken a évoqué le siège initial imposé par Israël à Gaza à la suite du massacre perpétré dans le sud d’Israël, lorsque quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas avaient pris d’assaut le territoire. Les hommes armés avaient tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils et ils avaient enlevé 251 otages de tous âges – commettant de nombreuses atrocités et perpétrant des violences sexuelles à grande échelle.
Blinken a expliqué comment, lors de son voyage en Israël cinq jours après le massacre sans précédent, il avait rencontré des dirigeants israéliens, dont Netanyahu, aux quartiers généraux de l’armée israélienne de la Kirya, à Tel Aviv, « discutant pendant des heures et des heures de la proposition fondamentale qui stipulait que l’aide humanitaire devait être acheminée aux Palestiniens de Gaza ».
« Cette discussion avait eu lieu parce qu’en Israël, dans les jours qui avaient suivi le 7 octobre, la société était totalement traumatisée. Il ne s’agissait pas seulement du Premier ministre ou d’un dirigeant israélien. Il s’agissait de toute une société qui ne voulait pas qu’une aide quelconque soit apportée à un seul Palestinien de Gaza. J’ai discuté de cette question pendant neuf heures », s’est-il rappelé.
En fin de compte, il avait dû menacer d’annuler la visite en Israël de Biden si l’aide ne commençait pas à entrer dans l’enclave.
« J’ai dit au Premier ministre que j’allais appeler le président et lui demander de ne pas venir si le gouvernement n’autorisait pas l’acheminement de l’aide. J’ai appelé le président pour m’assurer qu’il était d’accord, et il l’a été. Nous avons obtenu l’autorisation de commencer à apporter de l’aide à Rafah, et nous l’avons étendue à Kerem Shalom ainsi qu’à de nombreux autres endroits », a-t-il expliqué.
Lors de l’entretien, Blinken a réaffirmé que les États-Unis ne pensaient pas qu’Israël se livrait à un génocide à Gaza, même s’il a déclaré qu’à certains moments, Israël n’en faisait pas « assez » pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire.
Blinken a également réfuté l’idée laissant entendre que Netanyahu serait responsable de l’échec de l’accord de « trêve contre libération d’otages » de juillet, affirmant que c’était in fine le groupe terroriste palestinien du Hamas qui avait fait échouer les négociations.
« Ce que nous avons vu à maintes reprises, c’est que le Hamas n’a pas approuvé l’accord qu’il aurait dû conclure », a insisté Blinken.
Il a également exprimé sa profonde consternation quant au fait que la plupart des pressions mondiales visant à mettre fin au conflit ont été exercées sur Israël, et non sur le Hamas.
« L’une des choses que j’ai trouvées un peu stupéfiantes, c’est que malgré toutes les critiques compréhensibles sur la façon dont Israël s’est comporté à Gaza, pratiquement personne n’a parlé du Hamas depuis le 7 octobre », a noté Blinken.
« Pourquoi n’y a-t-il pas eu un concert unanime dans le monde entier pour que le Hamas dépose ses armes, rende les otages, se rende – je ne sais pas quelle est la réponse à cette question. À plusieurs reprises, Israël a proposé aux dirigeants et aux combattants [terroristes] du Hamas de quitter Gaza en toute sécurité. Où est le monde ? Où est le monde qui dit : ‘Oui, faites ça ! Mettez fin à cela ! Mettez fin aux souffrances des gens que vous avez provoquées !’ »
Blinken a effectué onze visites en Israël depuis le début de la guerre, déclenchée le 7 octobre 2023, et il s’est rendu des dizaines de fois dans des pays de la région, dont le Qatar et l’Égypte, pour représenter l’administration Biden lors des pourparlers sur l’accord de « trêve contre libération d’otages ».
Il a été choisi par le président Biden pour devenir secrétaire d’État en 2021 et a occupé ce poste pendant toute la durée du mandat de Biden.
Alors que le président-élu Donald Trump doit prendre ses fonctions le 20 janvier et que le sénateur de Floride Marco Rubio devrait être confirmé au poste de secrétaire d’État, la politique américaine à l’égard d’Israël et de la région va changer de manière significative, s’éloignant probablement des demandes de l’administration Biden pour un plus grand accès de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza.
Vendredi, la chaîne N12 a rapporté qu’Israël envisageait déjà de restreindre considérablement la quantité d’aide entrant dans la bande de Gaza en prévision de l’investiture de Trump.
Cette mesure viserait à démanteler les capacités de gouvernance du Hamas à Gaza, que le groupe terroriste palestinien a réussi à maintenir après près de quinze mois de guerre en contrôlant une grande partie de l’aide qui entre dans la bande de Gaza, selon Jérusalem. Les terroristes du Hamas sont connus pour exiger des frais en échange de la libération des convois d’aide à leur entrée dans la bande de Gaza.
Seule une quantité limitée d’aide entre dans la bande de Gaza, et un nouveau siphonnage aggraverait probablement la crise humanitaire en cours. De nombreuses personnes déplacées par la guerre vivent dans des tentes et font état de graves pénuries de nourriture et de fournitures médicales.
Les autorités israéliennes affirment avoir autorisé l’entrée à Gaza de milliers de camions transportant de la nourriture, de l’eau, du matériel médical et des abris, dont une grande partie a été pillée par le Hamas et autres bandes armées. Les agences d’aide internationale disent que Tsahal aurait entravé l’acheminement de l’aide, aggravant ainsi la situation.