Israël en guerre - Jour 431

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Ce que nous apprend des SMS d’un groupe WhatsApp entre Ben Gvir et sa garde rapprochée

Les échanges entre le ministre et ses conseillers extrémistes et son épouse au cours de sa première année de mandat sont révélés, alors que la procureure générale cherche à l'évincer

Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, à la Knesset, à Jérusalem, le 11 novembre 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, à la Knesset, à Jérusalem, le 11 novembre 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

Dix mois de correspondance entre Itamar Ben Gvir et une série de conseillers, y compris son épouse et deux résidents d’implantations radicaux liés à des violences contre des Palestiniens, semblent montrer que le ministre de la Sécurité nationale planifiait une ingérence illégale dans le travail de la police, selon un reportage d’investigation.

Le reportage de la Treizième chaîne, diffusé cette semaine, montre un Ben Gvir obsédé par son image, qui invoque sa base d’électeurs pour justifier son ingérence dans les opérations et le personnel de la police, ordonner des opérations contre les Palestiniens à Jérusalem-Est, appeler à une répression violente des manifestations anti-gouvernement et effectuer des visites incendiaires sur le mont du Temple.

Le reportage a également montré que, malgré ses déclarations contraires, Ben Gvir n’avait pas appelé à la destruction du Hamas avant la guerre de Gaza. Celle-ci a été déclenchée lorsque le groupe terroriste palestinien a envahi le sud d’Israël le 7 octobre 2023, tuant plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevant 251 otages de tous âges et commettant de nombreuses atrocités ainsi que perpétrant des violences sexuelles à grande échelle.

La Treizième chaîne a indiqué que le reportage était basé sur des milliers de SMS et de messages vocaux divulgués à partir d’une discussion de groupe WhatsApp appelée « Gouvernement de la stratégie ». Dans de nombreux messages, Ben Gvir planifiait des communiqués de presse avec ses conseillers.

Dimanche, Ben Gvir a déposé un recours devant la Haute Cour pour empêcher la diffusion du reportage, affirmant qu’il portait atteinte à sa vie privée, mais les juges ont rejeté sa requête.

Le reportage a été diffusé alors que la procureure générale Gali Baharav-Miara s’apprêterait à ordonner au Premier ministre Benjamin Netanyahu de licencier Ben Gvir pour s’être impliqué à maintes reprises dans les opérations de police d’une manière interdite par la Cour.

La procureure générale Gali Baharav-Miara assistant à une cérémonie à l’Académie nationale de police de Beit Shemesh, le 14 juillet 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

Voici quelques points essentiels du reportage :

Un cercle restreint douteux

Les conversations au sein du groupe « Gouvernement de la stratégie » tournaient autour de l’image publique de Ben Gvir. Avec un cercle restreint d’assistants, le ministre rédigeait des communiqués de presse, planifiait des fuites, discutait de la couverture hostile et débattait de la manière dont les déclarations trouveraient un écho auprès de sa base d’électeurs.

Parmi ces collaborateurs figuraient l’épouse du ministre, Ayala Ben Gvir, Itamar Sassover, alors en service actif en tant que soldat dans l’unité du porte-parole de l’armée israélienne, un pseudo-conseiller appelé « Ofer Cohen », désigné par la Treizième chaîne comme étant le journaliste ultra-orthodoxe Moshe Glassner, qui a démenti le reportage et menacé d’intenter un procès ; le militant d’extrême-droite radicale sanctionné par les États-Unis, Bentzi Gopstein, chef du groupe d’extrême-droite Lehava ; et Chanamel Dorfman, chef de cabinet de Ben Gvir, marié lors du « mariage au couteau » de 2015, où les célébrants ont poignardé une photo d’Ali Dawabsha, 18 mois, assassiné une semaine plus tôt dans un incendie criminel perpétré par un proche de Dorfman, Amiram Ben Uliel.

Benzi Gopstein, président du groupe d’extrême-droite Lehava, lors d’une visite du député de l’époque Itamar Ben Gvir, dans la ville arabe de Kfar Qassem, le 5 octobre 2021. (Crédit : Yossi Zeliger/Flash90)

Un autre conseiller brièvement mentionné dans le reportage est Eli Feldstein, ancien porte-parole du Ben Gvir et aujourd’hui collaborateur du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Il est soupçonné d’avoir volé des renseignements militaires et de les avoir divulgués aux médias étrangers de manière déformée, afin de soutenir les arguments du Premier ministre contre un accord de « trêve contre libération d’otages ».

Faire trembler la police

Alors que ses sondages étaient en baisse dans un contexte de vague d’attentats terroristes, Ben Gvir a choisi de s’en prendre aux manifestants anti-gouvernement, pour lesquels il avait jusqu’alors manifesté peu d’intérêt, selon le reportage.

Les manifestants s’étaient rassemblés chaque semaine à Tel Aviv depuis le début de l’année 2023, après que le nouveau gouvernement eut présenté son plan largement controversé visant à radicalement modifier le système judiciaire.

Un SMS de Ben Gvir datant de cette période montre sa frustration face à l’échec de la police à utiliser « des canons à eau et des officiers de la garde montée contre la gauche dangereuse ».

Le ministre a également estimé qu’il devait « se battre » avec le chef de la police de Tel Aviv de l’époque, Ami Eshed, car ce dernier était, soi-disant, trop indulgent avec les manifestants. Selon un article du journal Haaretz, Dorfman et Ayala, l’épouse de Ben Gvir, auraient élaboré un plan pour évincer Eshed, qui avait finalement démissionné en juillet de la même année.

La correspondance citée par la Treizième chaîne montre que Ben Gvir avait conspiré avec le chef de la police de l’époque, Kobi Shabtaï – par l’intermédiaire du chauffeur de ce dernier, appelé uniquement Micky – pour évincer Eshed. Dans le cadre de leur arrangement, Ben Gvir aurait accepté de publier une déclaration louant la conduite de Shabtaï face aux manifestations, selon des messages cités par la chaîne.

Plus tard, soupçonnant Shabtaï de divulguer une histoire peu flatteuse à son sujet, Ben Gvir avait divulgué un enregistrement embarrassant de Shabtaï dénigrant les Arabes, selon la correspondance du groupe. Celle-ci montre également que le cercle rapproché de Ben Gvir était satisfait que la fuite du ministre ait fait plier Shabtaï.

Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir (à droite) et le chef de la police israélienne Kobi Shabtaï, lors des funérailles de l’officier de la police des frontières, le sergent Shay Germay, au cimetière militaire de Karmiel, le 7 janvier 2024. (Crédit : David Cohen/Flash90)

Une relation tendue avec Netanyahu

Selon les messages cités dans le reportage, le cercle rapproché de Ben Gvir avait planifié une visite sur le mont du Temple, site ultra-sensible de Jérusalem, afin de démontrer à Netanyahu que Ben Gvir « deviendrait fou » suite à la démolition d’un avant-poste israélien illégal en Cisjordanie.

Netanyahu avait ensuite essayé d’appeler Ben Gvir, qui n’avait pas répondu à cet appel, dans le cadre d’une manœuvre de pouvoir qu’il avait préparée avec ses conseillers, comme le montrent les messages.

Cependant, Ben Gvir a également essayé de s’attirer les faveurs du Premier ministre ; lorsque des manifestants anti-gouvernement ont manifesté devant un salon de beauté de Tel Aviv où Sara Netanyahu, l’épouse du Premier ministre, se faisait coiffer, Ben Gvir a simplement écrit dans le groupe : « Sauvez Sara. »

Des policiers montant la garde alors que des personnes manifestent contre l’épouse du Premier ministre, Sara Netanyahu, devant un salon de coiffure à Tel Aviv, le 1er mars 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

La police avait débarqué en masse devant le salon de coiffure, mais Ben Gvir s’était dit déçu de ne voir « ni matraques, ni grenades incapacitantes, ni rien ». En revanche, l’épouse du ministre avait été impressionnée et, sur les conseils des assistants de Ben Gvir, avait envoyé à Sara Netanyahu des vidéos de la mobilisation policière.

Ayala Ben Gvir avait également téléchargé une vidéo d’elle-même condamnant les manifestants, mais les assistants des ministres lui avaient déconseillé de la publier ; entre autres problèmes, avait souligné Dorfman, l’épouse du ministre se tenait devant une étagère contenant des livres de feu le rabbin extrémiste Meïr Kahane, mentor de Ben Gvir.

Sara Netanyahu (au centre) rencontrant les épouses de plusieurs des membres potentiels de la coalition : Yaffa Deri (2e à partir de la gauche), Maoz (à gauche), Ayala Ben Gvir (2e à partir de la droite) et Rivka Goldknopf (à droite). (Crédit : Likud)

Laisser Gaza tranquille

Tout au long de la guerre contre le groupe terroriste palestinien, Ben Gvir a déclaré que si le gouvernement l’avait écouté, le Hamas aurait été démantelé afin qu’il ne puisse pas mener le pogrom qui avait déclenché la guerre à Gaza. Cependant, dans des messages du groupe « Gouvernement de la stratégie » avant et après le début de la guerre, il semble hésiter à exiger le démantèlement du Hamas.

En février 2023, après une nuit au cours de laquelle les communautés frontalières de Gaza avaient été confrontées à un barrage massif de roquettes en provenance de la bande, Ben Gvir s’était demandé s’il devait exiger publiquement une riposte musclée. Dorfman le lui déconseilla : « Laissez Gaza tranquille. »

« Même les habitants du sud ne veulent pas d’une guerre pour chaque roquette », avait écrit son chef de cabinet.

Ben Gvir avait finalement accepté, notant qu’Israël avait « tué hier un nombre jamais vu de terroristes » à Jénine, en Cisjordanie.

Le chef du parti Otzma Yehudit, Itamar Ben Gvir (à gauche) s’entretenant avec son chef de cabinet, Chanamel Dorfman, lors d’une réunion de la commission spéciale de la Knesset pour discuter des changements proposés à l’ordonnance sur la police, le 18 décembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Ben Gvir ne semblait pas non plus vouloir éliminer le Hamas lorsque la guerre éclata huit mois plus tard. Le troisième jour de la guerre, il avait écrit dans le groupe : « Soyons réalistes : Israël ne détruira pas le Hamas. Malheureusement. »

Baharav-Miara, la procureure générale en difficulté, s’apprêterait à exhorter Netanyahu à évincer Ben Gvir pour des actions jugées illégales par son bureau, y compris des ordres à la police sur la répression agressive des manifestations anti-gouvernement, des tentatives d’interdire certains rassemblements et de conspirer pour évincer des responsables de la police.

En janvier, la Haute Cour avait émis une injonction ordonnant à Ben Gvir de cesser d’intervenir dans le maintien de l’ordre lors des manifestations, à la suite d’un jugement rendu l’année dernière lui interdisant de le faire. L’État s’apprête à répondre à un recours déposé auprès de la Haute Cour au début de l’année, demandant le licenciement de Ben Gvir pour violation répétée de la décision de justice.

Netanyahu a déclaré qu’une telle demande de la part de la procureure générale déclencherait une « crise constitutionnelle ».

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