Ces rabbins Habad qui aident les Juifs d’Australie rurale à célébrer Rosh HaShana
Connu pour son rayonnement religieux, le mouvement Habad installe des avant-postes dans les villes à faible population juive, mais son action dans l'outback est incroyable
MELBOURNE (JTA) — Ruth Hannah vit à Mallacoota, sur la côte australienne depuis plus de 30 ans. Agée de 72 ans, cette fille de survivants de la Shoah ne connaît qu’un seul Juif dans sa ville, qui compte 1 183 habitants.
Réputée pour ses belles plages et sa faune, Mallacoota est située à proximité d’une route côtière de plus de mille kilomètres de long qui relie Melbourne à Sydney. Le long de cette route, il n’y a pas une seule ville de plus de 50 000 habitants à moins de 5 heures de route. Dans ces conditions, la préparation des fêtes juives peut être difficile.
« Mallacoota est l’une des villes les plus reculées de l’État de Victoria, nous n’avons donc pas de shul », ou synagogue, dit Hannah.
Depuis les années 1980, le mouvement Habad-Loubavitch – branche hassidique qui se consacre à la sensibilisation des Juifs dans le monde entier – comble le vide pour Hannah et des milliers d’autres Juifs installés dans les zones peu peuplées de l’outback. La plupart des émissaires Habad s’installent et travaillent au même endroit, mais le rabbin Menachem Aron et son épouse, Rebbetzin Shevi Aron, installés à Melbourne, coordonnent eux le Habad de RARA, abréviation de Regional and Rural Australia [NDLT : Australie rurale].
« Les gens veulent du lien. On voit à quel point ils en ont besoin et cela nous fait plaisir. C’est vraiment gratifiant », explique Menachem Aron à la Jewish Telegraphic Agency. « Cela se voit sur leur visage. Ils vivent loin des communautés juives, mais également loin de tout. Ils n’ont pas accès aux choses les plus élémentaires… comme l’épicerie ou les soins. Il faut parfois huit semaines avant de voir un médecin. C’est difficile pour tout le monde. »
Comme d’autres branches du Habad, RARA envoie souvent aux Juifs des colis de médicaments, de nourriture et d’effets pour célébrer les fêtes. Pour Rosh HaShana, les Juifs comme Hannah auront des biscuits au miel et un shofar.
Mais le Habad de RARA dépêche également des rabbins itinérants, qui parcourent des milliers de kilomètres à travers l’outback australien pour rendre visite aux Juifs et leur remettre les fournitures en personne. Les Aron coordonnent des groupes de jeunes étudiants Habad des yeshivot du monde entier qui viennent en Australie, au moment de l’été dans l’hémisphère nord, pour rendre visite aux Juifs installés dans les recoins les plus reculés d’Australie, voire de toute la planète.
Ainsi, les jeunes rabbins Menachem Manssouri et Mendel Junik, originaires de Los Angeles, se sont envolés pour l’Australie début juin, pour un mois, pour parcourir 4 000 kilomètres à la recherche de Juifs. Le voyage a commencé à Darwin, l’une des capitales les plus reculées d’Australie, dépourvue d’infrastructures juives mais qui compte, selon le recensement australien de 2021, 91 Juifs.
« Nous avons commencé à Darwin avec une liste de personnes de confession juive. A Darwin, nous avons vu environ 40 Juifs », dit Manssouri.
Après Darwin, Manssouri et Junik se sont envolés pour Broome, dans l’Ouest de l’Australie, et ont parcouru des milliers de kilomètres le long de la côte.
« Nous avons fait quelque chose de totalement unique par rapport à d’autres voyages RARA. Nous avons couvert énormément de villes. South Hedland, Roebourne, Monkey Mia, Denham, Exmouth. Personne n’était jamais allé dans le coin », explique Manssouri.
Interrogé sur ses méthodes pour rencontrer des Juifs là où il ne dispose pas de listes, Manssouri fourmille de conseils pratiques. « Nous allons au poste de police. A l’hôpital. Nous allons dans tous les magasins en cherchant des indices. Cela a très bien marché ».
Manssouri est impressionné par le lien qu’il a noué avec des Juifs dans les endroits les plus inattendus, comme dans cette station-service d’un coin perdu, à Karratha, dans la région très faiblement peuplée de Pilbara. Manssouri a parlé à des Juifs qui faisaient le plein de leur camping-car et vivaient à plus de 15 heures de route de la synagogue la plus proche.
« Quand on y repense, c’est bluffant ». « Les gens se disent inspirés par les rabbins, mais en réalité, ce sont les rabbins qui trouvent leur inspiration chez les gens. »
Selon le gouvernement australien, on estime à 7 millions – soit 28 % de la population australienne – le nombre de personnes installées dans des zones reculées ou rurales. Selon Aron, il y a environ 10 000 Juifs dans les régions rurales et reculées de l’Australie : il a dit être en contact avec 4 000 d’entre eux environ. (Il y a quelque 120 000 Juifs dans tout le pays.)
Le mouvement Habad ne cesse d’étendre son empreinte dans le monde : ces dernières années, des émissaires ont établi une présence dans des endroits comme la Zambie ou le Costa Rica, en passant par les îles Canaries. Dans certains pays, leurs méthodes de développement au sein des communautés sont parfois sujets à controverse – voire frictions – avec les communautés existantes.
Mais leur croissance est indéniable. Avant la pandémie de COVID-19, une centaine de Juifs vivait à Cairns, en Australie, petite ville de l’État du Queensland située à plus de 1 600 km de Brisbane, la plus grande ville de l’État. Aujourd’hui, la ville compte près de 500 Juifs et ce qui est probablement le plus grand seder de Pessah de toute l’Australie, avec plus de 130 personnes en 2021. C’est l’un des centres Habad connectés à la branche RARA.
Selon Aron, c’est Groote Eylandt, une île du golfe de Carpentarie, sur la côte nord de l’Australie, non loin de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui est de loin l’endroit le plus exotique où il ait envoyé un shofar en 2022. C’est une femme de confession juive qui travaillait dans les mines de manganèse qui en avait fait la demande.
« L’Australie fait les quatre-cinquièmes de la taille des États-Unis d’Amérique. C’est un pays immense avec très peu d’habitants, 25 millions seulement », explique Aron. « Il y a plus de Juifs à Boca Raton que dans toute l’Australie. On peut conduire 27 heures durant et être encore dans le même État, mais cela ne doit pas être un obstacle à la connaissance des autres et au partage entre Juifs. »
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