Contrairement à ses dires, Israël aurait bien aidé à financer la Fondation humanitaire de Gaza
Le bureau du Premier ministre a démenti l'affirmation faite par la chaîne Kan, qui a évoqué un transfert discret des fonds pour empêcher le public d'en avoir connaissance

Le gouvernement israélien aurait transféré des centaines de millions de shekels pour financer le nouveau mécanisme d’aide humanitaire qui a été mis en place dans la bande de Gaza, a rapporté la chaîne d’information publique Kan, mercredi, contredisant les responsables du gouvernement qui ont insisté sur le fait qu’Israël n’avait eu aucun rôle dans son financement.
Selon le reportage, le gouvernement a approuvé le transfert de 700 millions de shekels à une bénéficiaire encore indéterminée, le mois dernier – ce bénéficiaire n’a été identifiée par le gouvernement que sous le terme « d’establishment de la Défense ».
Citant des officiels qui se sont exprimés sous couvert d’anonymat, Kan a signalé que l’argent avait été utilisé pour financer le nouveau mécanisme d’aide au sein de l’enclave côtière, un mécanisme qui a été pris en charge par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) et que la décision de transférer ces fonds avait été discrètement prise dans le but d’éviter que le public ne l’apprenne – apparemment dans la mesure où cette initiative aurait été très impopulaire auprès de la base électorale de la droite dure du gouvernement.
La GHF, qui est soutenue par Israël et par les États-Unis, a lancé ses opérations à Gaza à la fin du mois dernier. Jérusalem a fait savoir qu’elle pourrait servir d’alternative aux précédents mécanismes de distribution de l’assistance, avec pour objectif d’empêcher le Hamas de thésauriser cette dernière et de l’utiliser pour garder le contrôle de la population.
Dans le même temps, l’organisation et les responsables américains ont affirmé qu’il s’agissait d’un organisme indépendant et neutre.
Le gouvernement a insisté sur le fait qu’il n’avait aucunement pris part au financement de la GHF, qui a fait l’objet d’un examen minutieux en raison d’une absence d’informations en ce qui concerne l’origine de ses fonds.
L’organisation a affirmé avoir reçu plus de 100 millions de dollars de la part d’un donateur gouvernemental étranger, mais elle n’a pas voulu faire connaître le nom de ce dernier.

Le chef de l’opposition, Yair Lapid, avait laissé entendre, la semaine dernière, que le gouvernement finançait secrètement le groupe d’aide par l’intermédiaire de « sociétés écrans » étrangères, une hypothèse qui avait été rapidement rejetée par le bureau du Premier ministre.
« Israël ne finance pas l’aide humanitaire dans la bande de Gaza », avait déclaré Omer Dostri, le porte-parole du Premier ministre Benjamin Netanyahu. « Israël et les États-Unis travaillent en parfaite coordination et par différents canaux pour empêcher l’assistance d’arriver entre les mains du Hamas ».
En réponse au reportage diffusé par Kan, le bureau du Premier ministre et le bureau du ministre des Finances Bezalel Smotrich ont insisté sur le fait que le pays « ne finance pas l’aide humanitaire à Gaza ».
Le New York Times avait rapporté, à la fin du mois dernier, que l’organisation avait été conçue par plusieurs Israéliens, dont des hommes d’affaires entretenant des liens étroits avec le gouvernement. La chaîne a précisé, de son côté, que le projet n’avait pas été simplement élaboré en coordination avec Israël, mais qu’il s’agissait à l’origine d’une « idée israélienne ».
Une idée qui avait été proposée pour la toute première fois à la fin de l’année 2023 lors de « réunions privées entre responsables, officiers militaires et hommes d’affaires qui partageaient les mêmes idées et qui entretenaient des relations étroites avec le gouvernement israélien ». Ces hommes estimaient que le gouvernement ne disposait pas d’une stratégie à long terme pour Gaza, a noté le reportage.

La chaîne a supposé que la « genèse du projet » avait eu lieu lorsque « des centaines de milliers de civils israéliens ont rejoint l’armée en tant que réservistes, un grand nombre d’entre eux se hissant à des positions d’influence » après le pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre 2023.
Ce qui avait créé « une énorme cohorte d’Israéliens ayant un pied dans l’armée et un autre dans la vie civile, brouillant la frontière entre les deux mondes ».
L’idée centrale du groupe était de parvenir à contourner les canaux d’aide traditionnels tels que l’ONU en faisant appel à des entrepreneurs du secteur privé pour distribuer l’aide dans les territoires de Gaza placés sous contrôle israélien, affaiblissant ainsi l’emprise du Hamas sans assumer formellement la responsabilité de la population civile.
Les premiers jours des opérations de la GHF ont été marqués par la violence.
Dimanche, lundi et mardi, l’armée a indiqué avoir procédé à des tirs d’avertissement en direction de Palestiniens qui se trouvaient à l’extérieur d’un site de distribution des aides, après que les civils se sont approchés des troupes en s’écartant d’un itinéraire dûment approuvé au préalable. Les responsables du Hamas et la Croix-Rouge ont affirmé que les tirs avaient fait des dizaines de morts et des centaines de blessés. Tsahal, de son côté, a estimé que ces chiffres étaient exagérés, tout en précisant qu’une enquête militaire était en cours.
La GHF n’a pas ouvert ses sites de distribution dans la journée de mercredi après huit jours consécutifs d’activité. Elle a fait savoir que cette fermeture temporaire avait été mise en œuvre pour effectuer des travaux logistiques, avec pour objectif d’accueillir en toute sécurité un plus grand nombre de Palestiniens dans ses centres.
Pour renforcer la sécurité des civils à l’extérieur des sites de distribution, un porte-parole a déclaré que la GHF avait demandé aux militaires israéliens d’introduire des mesures visant à orienter la circulation des piétons de manière à minimiser les risques de confusion ou d’escalade aux abords du périmètre géré par les soldats israéliens. Elle a aussi appelé Tsahal à développer des directives plus claires qui aideront les Palestiniens à atteindre les sites de distribution en toute sécurité ; à renforcer la formation des soldats et à affiner ses procédures internes pour garantir que les civils ne seront pas mis en danger.