Demandant « pardon », une foule accompagne le cortège funéraire des Bibas
Dans un élan de douleur partagée, le public s'est tenu le long du parcours de 60 kilomètres ; la famille a fait savoir que Yarden, époux et père en deuil, "s'excuse de ne pas pouvoir descendre pour embrasser personnellement chacun d'entre vous"
Des milliers de citoyens, brandissant des ballons de couleur orange et des drapeaux d’Israël, sont descendus dans les rues du centre et du sud du pays dans la journée de mercredi pour saluer le cortège funéraire de Shiri Bibas et de ses jeunes fils, Ariel et Kfir, pris en otage par les hommes armés du Hamas, le 7 octobre, avant d’être assassinés « à mains nues » en captivité.
Une foule bouleversée s’est tenue le long de la route reliant Rishon Lezion à Tsoher, dans le sud, où la mère et ses deux petits enfants devaient être inhumés – soit un parcours de plus de 60 kilomètres qui a traversé Yavne, Ashdod et Ashkelon.
« Le cortège est parti accompagné par de très nombreux Israéliens », a dit la famille Bibas dans un communiqué. « Nous vous voyons tous et nous vous entendons tous – nous ressentons de l’émotion et de la force grâce à vous ».
Yarden Bibas, l’époux de Shiri et le père des deux petits garçons, « s’excuse de ne pas avoir pu descendre et embrasser personnellement chacun d’entre vous », a continué le communiqué. Yarden, qui avait également été pris en otage, a été libéré au début du mois dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu conclu avec le groupe terroriste de Gaza, accord qui a ouvert la porte à la remise en liberté des captifs.
« Nous attendons avec impatience le jour où nous pourrons à nouveau nous unir dans des moments de joie plutôt que dans des moments de tristesse », a poursuivi le communiqué.
Ariel avait quatre ans quand la famille avait été enlevée de son habitation du kibboutz Nir Oz, le 7 octobre 2023, et Kfir n’était âgé que de huit mois et demi. Ce kibboutz aura été l’un des plus durement touchés ce jour-là : les terroristes étaient entrés dans toutes les maisons de la communauté, à l’exception de six d’entre elles.

Un grand nombre des personnes qui se tenaient au bord de la route et sur les ponts ont doucement entonné l’hymne national au passage du convoi.
Des bougies ont été allumées en hommage aux victimes.
Sur les nombreuses banderoles brandies à l’arrivée du cortège, sur la route, le mot « Pardon » – des excuses ont également été criées dans la foule, un pardon réclamé pour l’incapacité d’Israël d’avoir pu ramener la famille en vie.

Les funérailles elles-mêmes devaient se dérouler dans l’intimité. Les éloges funèbres ont toutefois été retransmis en direct.
Ce sont des milliers de personnes qui se sont rassemblées sur la place des Otages à Tel Aviv pour suivre la cérémonie sur des écrans géants à cette occasion.
Dans le véhicule qui transportait le corps sans vie de Shiri se trouvait sa sœur, Dana Silberman – ce sont trois générations de sa famille qui ont été assassinées par des hommes armés lors du pogrom. Ses parents, Yossi et Margit Silberman, avaient ainsi perdu la vie au kibboutz Nir Oz, brûlés dans leur maison le 7 octobre 2023.
Shiri et les enfants seront inhumés dans le cimetière où reposent Yossi et Margit.

Alors qu’elle se rendait aux funérailles de sa belle-sœur et de ses neveux, Ofri Bibas, la sœur de Yarden, a publié un message sur Facebook : « Par la fenêtre, je vois aujourd’hui une nation brisée ».
« Nous ne nous relèverons pas et nous ne nous rétablirons pas tant que le dernier des otages ne sera pas rentré chez lui », a-t-elle ajouté.
« Merci à tous », a-t-elle continué dans son post.
The whole nation stands with the Bibas family in silent grief as Shiri, Ariel, and Kfir are laid to rest.
May their memory always be a blessing. pic.twitter.com/DDFvnQE1Bo
— Israel ישראל (@Israel) February 26, 2025
De nombreuses personnes présentes, le long de l’itinéraire, portaient des vêtements de couleur orange – une couleur devenue le symbole du calvaire vécu par la famille Bibas en raison de la chevelure rousse des deux petits garçons.
Certains n’ont pas pu retenir leurs larmes au passage du cortège qui était suivi – une escorte improvisée – par un groupe formé d’une centaine de motards.
D’autres, en bord de route, s’étaient munis d’affiches ou de panneaux à l’effigie de Batman, en souvenir d’anciennes photos de la famille Bibas où tous portaient un sweat-shirt à l’image du super-héros préféré du petit Ariel.

Les automobilistes se sont arrêtés pour permettre au cortège de continuer son chemin. Un grand nombre, descendant de leur véhicule, se sont tenus debout, inclinant la tête pour rendre un dernier hommage aux défunts.
Les soldats et les policiers qui étaient déployés le long de la route ont salué le passage du convoi.

De petits rassemblements ont également été organisés dans de nombreuses villes et localités qui ne se trouvaient pas sur l’itinéraire des funérailles.
Un décompte de l’AFP a établi que 37 enfants et adolescents avaient été tués lors de l’attaque sanglante perpétrée le 7 octobre.
Toutefois, Ariel et Kfir avaient été les plus jeunes à avoir été pris en otage par le Hamas – et une vidéo glaçante qui montrait une Shiri désemparée, serrant ses fils contre sa poitrine alors que les terroristes les emmenaient, avait fait du sort qui leur était alors réservé un symbole de l’horreur du pogrom et du calvaire vécu par les captifs.

La jeune mère et ses deux petits enfants avaient été kidnappés au kibboutz Nir Oz le 7 octobre 2023, quand des milliers de terroristes placés sous la direction du Hamas avaient pris d’assaut le sud d’Israël. Ils avaient massacré plus de 1 200 personnes et ils avaient enlevé 251 personnes, qui avaient été prises en otage à Gaza – un pogrom qui avait été à l’origine de la guerre au sein de l’enclave côtière.
Yarden avait été kidnappé, lui aussi, et emmené à Gaza séparément de son épouse et de ses deux fils.
Les dépouilles de Shiri, Ariel et Kfir Bibas ont été restituées dans le cadre du cessez-le-feu conclu il y a un mois entre Israël et le groupe terroriste – un accord qui a ouvert la porte à la remise en liberté des captifs. Yarden Bibas a ainsi été rapatrié en vie le 1er février.
Les corps sans vie d’Ariel et de Kfir ont été restitués jeudi – en même temps que la dépouille d’un autre otage, Oded Lifshitz et de celle d’une femme gazaouie non-identifiée que le Hamas avait déclaré être Shiri Bibas. Le groupe terroriste a finalement rendu le corps sans vie de Shiri vendredi, aux premières heures de la matinée, suite aux vives protestations d’Israël.

Dani Elgarat, le frère de l’otage Itzik Elgarat, est venu au carrefour de Rishonim pour pouvoir se recueillir au passage du cortège, a rapporté la signalé la chaîne publique Kan.
Elgrat a évoqué « un sentiment de perte lorsque nous avons vu les cercueils passer ».
« Mon cœur est triste » a-t-il dit. Le corps sans vie d’Itzik Elgarat devrait être rapatrié en Israël mercredi soir ou jeudi, aux côtés de ceux de trois autres Israéliens.
« C’est un des moments les plus durs depuis le 7 octobre », a dit, au bord des larmes, un commentateur de la 12, chaîne de télévision israélienne qui retransmettait la procession en direct.
Zohar Freidman a déclaré au site d’information Walla qu’il avait quitté son travail pour rendre hommage aux disparus.
« J’ai ressenti un sentiment d’appartenance à quelque chose de plus grand, à cette famille qui nous a unis et qui continue à nous unir tous », a-t-il expliqué. « Je crois que tous les membres du peuple juif, quel que soit leur secteur d’appartenance, ont été touchés au cœur par cette famille ».
« Quand je pense au 7 octobre », a dit à l’AFP Aviv Nahman, un habitant de Rishon Letzion, « c’est à cette famille que je pense en premier (…) Et malheureusement, ils sont revenus, mais pas vivants ».

« Je pense que si je dois y réfléchir plus d’une fraction de seconde, je vais me sentir tellement mal, tellement mal », s’est exclamée Simi Polonasky, 38 ans, qui a fait le voyage depuis Miami pour soutenir les familles d’otages.
« Ce n’est pas une situation normale : si vous ne vous anesthésiez pas, d’une certaine manière, vous vous sentez tellement brisé qu’il est presque difficile de continuer », a-t-elle confié à l’AFP, sans retenir ses sanglots.
« Nous sommes ici pour nous serrer dans nos bras les uns les autres, pour nous sentir plus forts, pour donner autant de force que possible », a dit Mottel Gestetner, 41 ans, qui a fait le déplacement depuis l’Australie.

Selon les évaluations qui ont été faites par les autorités israéliennes, des évaluations qui ont été diffusées après l’autopsie de son corps sans vie, Shiri Bibas a été « brutalement » assassinée par ses ravisseurs au mois de novembre 2023 ainsi que ses fils, qui ont été tués « à mains nues ». Les conclusions de l’examen médico-légal vont à l’encontre des affirmations qui avaient été faites par le Hamas, qui avait annoncé que la mère et ses deux enfants avaient perdu la vie lors d’une frappe aérienne israélienne.
Yarden, leur époux et père, avait été kidnappé séparément par les terroristes du Hamas après avoir quitté la pièce blindée de l’habitation familiale, à Nir Oz, pour tenter de détourner l’attention des hommes armés, essayant de sauver sa famille, le 7 octobre 2023. Il a été libéré des geôles du Hamas, à Gaza, le 1er février.
Avant le début de la cérémonie, le Parlement israélien à Jérusalem a observé une minute de silence à la mémoire de la famille Bibas et des autres victimes du pogrom du 7 octobre.
Sur les 251 otages enlevés ce jour-là en Israël, 62 sont toujours retenus à Gaza, dont 35 sont morts, selon l’armée israélienne.