Départ du président iranien pour l’Italie et la France
Première visite officielle en Europe initialement prévue en novembre, elle sera essentiellement axée sur l'économie ; Rencontre avec le pape

Le président iranien Hassan Rouhani débute lundi en Italie sa première visite officielle en Europe, axée en grande partie sur l’économie, alors que de nombreuses entreprises veulent profiter de la levée des sanctions pour revenir ou s’implanter en Iran.
Dans cette course aux contrats, c’est Airbus qui a été le plus rapide, le ministre iranien des Transports annonçant samedi l’achat par la République islamique de 114 avions, un accord que Rouhani doit signer mercredi à Paris. Il s’agit de la première annonce commerciale d’envergure depuis la levée des sanctions, mise en œuvre le 16 janvier avec l’entrée en vigueur de l’accord historique sur le nucléaire.
La visite de Rouhani en Europe était initialement prévue en novembre, mais elle avait été reportée à la dernière minute, au lendemain des attentats de Paris, revendiqués par le groupe jihadiste Etat islamique.
« Ce voyage a lieu après l’accord nucléaire et la fin des sanctions et de ce fait il se déroule à un moment historique (…) », a déclaré Rouhani à l’aéroport, cité par la télévision.
« Nous voulons en profiter au maximum pour le développement du pays et l’emploi des jeunes », en renforçant la coopération économique et facilitant les investissements des sociétés italiennes et françaises en Iran », a ajouté Rouhani, qui sera en Italie lundi et mardi avant de se rendre en France mercredi.
Une importante délégation, formée de 100 acteurs économiques ainsi que des ministres des Affaires étrangères, du Pétrole, des Transports, de l’Industrie et de la Santé, accompagne le président iranien.
Selon Rouhani, « deux documents importants, des feuilles de route à moyen et long terme seront signés avec l’Italie et la France ».
Les discussions porteront également sur les investissements des sociétés italiennes et françaises en Iran et sur « le transfert de technologie ».
« Dans le domaine des transports, des documents seront signés en France, nous devons moderniser notre flotte aérienne et acheter des locomotives » pour le transport ferroviaire, a dit encore le président iranien.
Samedi, le ministre iranien des Transports Abbas Akhoundi a annoncé la signature d’un accord pour l’achat de 114 Airbus lors de la visite du président Rouhani en France.
« Des contrats importants seront probablement signés aussi bien avec Peugeot qu’avec Renault », a déclaré encore M. Rouhani, sans donner de détails.
Après un déjeuner avec son homologue italien Sergio Mattarella, le président iranien rencontrera le chef du gouvernement Matteo Renzi en soirée et le pape François mardi en fin de matinée.
Le Vatican se félicite du ton plus modéré de l’Iran depuis l’élection de Rouhani. François devrait évoquer avec lui le rôle de stabilisation que l’Iran peut jouer au Moyen-Orient, en le dissuadant de faire monter les tensions avec Ryad et en l’incitant à faire pression sur le camp du président Bachar al-Assad en Syrie.

Rouhani doit en outre s’exprimer mardi matin devant un forum économique Italie/Iran, un rendez-vous très attendu par les industriels transalpins.
Tous les Européens cherchent en effet à placer leurs pions pour tenter de reconquérir le terrain perdu au profit de la Russie et des pays émergents comme la Chine et la Turquie.
Dans leur course aux contrats, ils sont en effet avantagés par rapport aux Américains, car Washington – qui n’a plus de relations diplomatiques depuis 35 ans avec Téhéran – va maintenir des sanctions dans le secteur pétrolier contre toute entreprise soupçonnée de financer le terrorisme.
« L’Italie était le premier partenaire économique et commercial de l’Iran avant les sanctions », et entend retrouver cette place, avait souligné il y a quelques mois la ministre italienne du Développement économique, Federica Guidi.
Avant l’entrée en vigueur des sanctions, les échanges entre l’Italie et l’Iran s’élevaient à 7 milliards d’euros. Ils sont actuellement de quelque 1,6 milliard, dont 1,2 milliard d’exportations italiennes.
La plus grande partie des exportations italiennes en Iran est actuellement liée à la mécanique (58 %), suivie de loin par les produits chimiques (8%).
Multiplication des missions en Iran
Quelque 500 entrepreneurs italiens devraient assister au forum économique mardi matin.
Fin novembre, une très grande délégation économique, conduite par Carlo Calenda, alors vice-ministre italien du Développement économique, s’était rendue à Téhéran: 178 entreprises étaient représentées, ainsi que 20 associations entrepreneuriales et 12 groupes bancaires.
Parmi les entreprises présentes : le géant de l’énergie Enel, le groupe pétrolier Eni et le fabricant de câbles Prysmian.
Cette mission a révélé que « les secteurs de l’infrastructure et de l’énergie étaient ceux offrant les plus importantes opportunités pour nos entreprises », a déclaré le ministère à l’AFP, en précisant qu’une « nouvelle mission entrepreneuriale (était prévue) début février avec une attention spécifique sur ces deux secteurs ». D’autres missions devraient suivre.
Interrogé par l’AFP, Enel pour sa part a annoncé prospecter, à travers sa filiale Enel Green Power, sur les opportunités possibles dans le secteur des énergies renouvelables, en particulier dans le solaire, l’éolien et la géothermie.
Le groupe italien de BTP Pessina Costruzioni a de son côté d’ores et déjà annoncé le 19 janvier avoir signé un mémorandum d’accord avec l’Iran pour la construction de cinq hôpitaux, dont trois à Téhéran d’une capacité de chacun 1.000 lits.
Même de petites entreprises sont sur les rangs. Car, après des années d’isolement, le marché iranien, fort de ses 79 millions d’habitants, offre des perspectives considérables, en terme de modernisation des infrastructures, d’exploitation du gaz et du pétrole – présents en abondance – ou encore d’automobile et d’aéronautique.