Des médecins, pilotes, et survivants mobilisés contre l’expulsion des migrants
L'opposition grandit face au projet d'expulsion des migrants africains vers le Rwanda ou l'Ouganda

JTA – Des survivants de la Shoah, des rabbins, des médecins et des pilotes d’avions se sont mobilisés pour tenter de contrecarrer les projets d’expulsion de milliers de migrants africains, même si cela signifie qu’ils doivent les accueillir chez eux.
Le dernier groupe à s’être manifesté est un groupe de médecins et de personnel soignant, qui, dans une lettre envoyée dimanche au directeur général de l’Autorité de la Population et de l’Immigration (PIBA), a demandé au gouvernement de ne pas procéder aux expulsions prévues.
La lettre indique qu’en tant que personnes « chargées de ‘sauver de tout mal et de toute injustice’, nous sommes horrifiés à l’idée qu’au lieu d’intégrer ces victimes, qui sont venues vers nous en fuyant un génocide, la torture, la violence, les viols, nous parlons de les condamner et de les blesser davantage ».
Près de 300 des 400 signataires de cette lettre sont des médecins.
Au début du mois, le cabinet israélien a approuvé un projet et un budget pour procéder à l’expulsion de milliers de migrants originaire du Soudan et d’Erythrée.
Avant cela, l’Autorité de la Population et de l’Immigration avait fait savoir aux migrants soudanais et érythréens qu’à compter du 1er janvier, ils devront retourner dans leur pays d’origine ou dans un pays tiers, le Rwanda ou l’Ouganda, ou ils seront envoyés à la prison de Holot, avant d’être expulsés.

Les militants anti-expulsions ont fait appel à des pilotes de lignes pour refuser de transporter des migrants expulsés. En réponse à cet appel, trois pilotes d’El Al, le transporteur national israélien, ont annoncé sur Facebook qu’ils refuseront de piloter les avions qui serviront à déporter les migrants hors d’Israël. El Al n’a aucune ligne directe vers le Rwanda ni l’Ouganda.
La semaine dernière, un groupe de rabbins, menés par l’auteur et militante Susan Silverman, a appelé les rabbins israéliens à cacher des demandeurs d’asile africains chez eux, pour empêcher leur expulsion. Leur initiative, baptisée Miklat Israël (miklat signifie un sanctuaire en hébreu), et officieusement, le mouvement Anne Frank Home Sanctuary, Silverman a invoqué la mémoire de la jeune victime et de sa famille, qui ont été cachés des nazis dans l’annexe d’un bureau à Amsterdam.
Près de 130 rabbins se sont rassemblés, sous l’égide du mouvement Rabbis for Human RIghts, pour discuter de la supervision de cette initiative.
« Anne Frank est la personne cachée la plus connue, et elle a été cachée pour ne pas être envoyée à une mort certaine. Nous avons des preuves que ces personnes risquent la mort », a déclaré Silverman, la sœur de l’actrice Susan Silverman, au quotidien Haaretz.
Un formulaire sur Google Docs a donc été créé pour répertorier les noms, les villes, et les coordonnées téléphoniques des partisans de Miklat Israël, et pour demander combien de demandeurs d’asile une personne peut héberger.
Au début de la semaine, plusieurs survivants de la Shoah ont déclaré au quotidien israélien Yediot Aharonoth qu’ils étaient prêts à accueillir des migrants africains chez eux pour leur éviter l’expulsion. Cependant, certains d’entre eux ont rejeté la comparaison avec Anne Frank, indiquant que les Israéliens qui hébergeraient un migrant ne risquaient pas leur vie.
Selon le projet du gouvernement, les migrants qui acceptent de quitter le pays avant le 31 mars, recevront 3 500 dollars, les frais de voyage seront pris en charge, et ils toucheront d’autres avantages, selon les médias. La sécurité dans leur pays d’origine ou dans un pays tiers a déjà été garantie par les voies diplomatiques, ont assuré les autorités israéliennes.

Le pays tiers n’a pas été officiellement identifié, mais selon la plupart des médias, il s’agirait du Rwanda ou de l’Ouganda.
Les défenseurs des migrants africains ont déclaré que ceux qui ont été expulsés ont été victimes de vol, de rapt, ou pire, à leur arrivée.
L’Autorité de la Population et de l’Immigration a indiqué qu’aucune personne n’est entrée en Israël en 2017, et seulement un nombre restreint est arrivé en 2016, après la construction d’une barrière à la frontière sud d’Israël.
Israël a déjà expulsé 20 000 des 60 000 migrants africains qui sont entrés en Israël avant la construction de cette barrière.
Dans un tweet publié lundi, le gouvernement rwandais a déclaré que « face aux rumeurs qui circulent dans les médias, le gouvernement du Rwanda souhaite indiquer qu’il n’a jamais signé d’accord secret avec Israël au sujet de l’accueil des migrants africains ».
In reference to the rumors that have been recently spread in the media, the Government of Rwanda wishes to inform that it has never signed any secret deal with Israel regarding the relocation of African migrants. (4/5)
— Government of Rwanda (@RwandaGov) January 22, 2018
Un second tweet ajoutait que « la politique du Rwanda vis-à-vis des Africains à la recherche d’un toit, qu’il soit temporaire ou permanent, reste, selon les moyens dont dispose notre pays, une option ouverte ».
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a défendu dimanche les expulsions.
« Nous ne prenons pas de mesures contre les réfugiés », a déclaré Netanyahu en introduction de la réunion hebdomadaire de son cabinet. « Nous prenons des mesures contre les immigrants illégaux qui viennent ici pour travailler. Israël continuera d’être un refuge pour les vrais réfugiés et expulsera les clandestins illégaux. »
Israël a accordé l’asile à moins de 1 % seulement des migrants.
Ces dernières semaines, des grands groupes juifs américains ont appelé Netanyahu a ne pas mettre son plan d’expulsion à exécution. Des groupes de défense des droits de l’Homme et des ONG israéliennes se sont élevées contre ce plan.
Lundi, ce sont plus d’un millier de demandeurs d’asile africains, majoritairement des érythréens, et une centaine de partisans israéliens, ont manifesté devant l’ambassade du Rwanda, à Herzliya, contre les expulsions.
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