Encore deux enfants morts en Egée entre la Grèce et la Turquie
Berlin se rapproche du million de migrants arrivés en 2015 ; Merkel critiquée pour sa politique de la porte ouverte aux réfugiés, en particulier venant de Syrie
Deux enfants migrants se sont noyés dans la nuit de mercredi à jeudi près de l’île grecque de Kos, alors que des manifestations contre l’enchaînement de tels drames se tenaient à Lesbos en marge d’une visite du Premier ministre grec, Alexis Tsipras et du président du Parlement européen Martin Schulz.
Les deux enfants se sont noyés après le naufrage, dans la nuit, du canot, parti de Turquie, où ils avaient embarqué avec leurs familles, à 250 mètres des côtes nord de Kos, en Égée orientale, a indiqué la police portuaire. La dépouille de l’un d’entre eux a été retrouvée, tandis que le corps du second, un garçon de six ans, restait recherché.
Figurant parmi les 14 rescapés de ce naufrage, le père du garçon a affirmé aux sauveteurs avoir échoué à le sauver de la noyade et avoir alors abandonné sa dépouille pour aider d’autres passagers.
Plus au nord sur l’île de Lesbos, principale porte d’entrée des migrants en Europe, des manifestants ont protesté dans la matinée contre la politique européenne envers les réfugiés, et appelé à un changement de cap pour garantir un accès sécurisé aux arrivants.
Alors que MM. Tsipras et Schulz arrivaient sur l’île, un premier groupe a investi la mairie, y accrochant une banderole proclamant « L’Égée est remplie de cadavres de migrants, Européens assassins des peuples », ont rapporté les médias grecs.
D’autres manifestants — portant les gilets de sauvetage orange devenus un symbole de l’exode en cours et de ses périls mortels — se sont rassemblés dans le camp d’enregistrement et de sélection (dit « hotspot ») de Moria, pendant la courte visite qu’y ont effectué les deux responsables.
Ils brandissaient des panneaux exhortant « Ouvrez la barrière, Plus d’autres noyades » en grec et en anglais.
Les appels se multiplient en Grèce et sur les médias sociaux pour l’ouverture d’un passage sécurisé pour les réfugiés à la frontière terrestre gréco-turque, où une barrière a été érigée en 2012.
Selon le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU, 3 440 migrants se sont noyés ou ont été portés disparus cette année sur l’ensemble de la Méditerranée. Environ 90 d’entre eux sont morts la semaine dernière entre la Turquie et la Grèce.
Berlin se rapproche du million de migrants arrivés en 2015
L’Allemagne a enregistré au mois d’octobre 181.166 migrants comptant demander l’asile, un nouveau record portant le total depuis le début de l’année à 758.473, a indiqué jeudi le ministère de l’Intérieur.
Si les arrivées continuent à ce rythme au cours des deux derniers mois de 2015, les prévisions les plus récentes du gouvernement, parlant de 800.000 à un million de migrants sur l’ensemble de l’année, seront nettement dépassées.
Les données proviennent du système EASY allemand qui comptabilise les migrants arrivant dans le pays et prévoyant de demander l’asile mais ne l’ayant pas encore fait. Des « doublons ou des non-enregistrements ne peuvent être exclus », selon le ministère.
Le mois de septembre avait déjà battu tous les records avec 163.772 arrivées.
Dans le détail, 88.640 personnes disant venir de Syrie sont entrées en Allemagne en octobre, portant le total depuis janvier à 243.721. Quelque 31.000 ressortissants afghans sont aussi arrivés le mois dernier, doublant quasiment le total depuis le début de l’année qui s’établit 67.191.
L’Allemagne a d’ailleurs prévenu qu’elle allait multiplier les expulsions d’Afghans pour faire face à cet afflux injustifié selon le ministère de l’Intérieur.
Par ailleurs, les pays des Balkans n’entrent plus dans le top-5 des pays d’origine des migrants, alors que les autorités allemandes ont multiplié les campagnes et les mesures pour juguler les arrivées de ressortissants albanais, kosovars ou serbes qui arrivaient en masse bien que statistiquement leurs chances d’obtenir le statut de réfugié est inférieur à 1 %.
Berlin tente en vain depuis des mois de répartir la charge de l’accueil des migrants qui visent dans leur grand majorité l’Allemagne, entre les membres de l’Union européenne.
La chancelière Angela Merkel est pour sa part de plus en plus critiquée dans son pays pour sa politique de la porte ouverte aux réfugiés, en particulier venant de Syrie. Il lui est reproché au sein de son propre parti d’avoir ainsi créé un appel d’air encourageant les candidats à l’immigration en Allemagne à venir.
La coalition au pouvoir réunissant les conservateurs de Mme Merkel (CDU), ses alliés bavarois (CSU) et les sociaux-démocrates a d’ores et déjà pris des mesures à l’automne pour faciliter les expulsions de migrants économiques et en étudie d’autres pour encore accélérer le processus.
Des pourparlers sont prévus jeudi après-midi entre ces partenaires de la coalition ainsi qu’avec les dirigeants régionaux pour durcir encore le dispositif.
Il s’agirait cette fois de mettre en place d’éventuelles « zones de transit » directement aux frontières pour y effectuer un examen accéléré des demandes d’asiles et renvoyer les migrants n’ayant aucune chance de voir leur requête aboutir.
Les autorités bavaroises, qui voient transiter l’essentiel des demandeurs d’asile à l’issue de leur périple à travers la Turquie, la Grèce, les Balkans et l’Autriche, réclament depuis des semaines que Mme Merkel mette fin à sa généreuse politique d’accueil.