Est-ce que le soutien international envers Israël s’affaiblit ?
Certains pensent que le monde désapprouve l’opération quasi-unanimement, d’autres pensent que les dirigeants la comprennent
Des responsables israéliens et des experts déclarent que la communauté internationale continue de soutenir l’opération Bordure protectrice. Ils rejettent les affirmations selon lesquelles l’opinion publique se retourne contre la campagne militaire à Gaza.
D’autres, cependant, mettent en garde Israël. Si le nombre de victimes civiles continue d’augmenter, même les dirigeants mondiaux favorables à la lutte d’Israël pourraient finalement lui tourner le dos.
« La communauté internationale soutient en masse Israël. Ce soutien a été réitéré récemment par les dirigeants des Etats-Unis et du Royaume-Uni », déclare un haut-fonctionnaire israélien. Il fait référence aux déclarations de Barack Obama et de David Cameron qui reconnaissaient le droit légitime d’Israël de se défendre.
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Pourtant, pour beaucoup d’observateurs en Israël et à l’étranger, qui admettent que dans un premier temps, la guerre d’Israël bénéficiait du soutien de presque tout le monde, le courant est train de se renverser.
Surtout après la bataille acharnée qui a eu lieu entre l’armée israélienne et les terroristes du Hamas tôt dimanche matin dans le quartier de Shejaiya à Gaza. Selon les sources palestiniennes, au moins 60 personnes ont été tuées pendant ce combat, dont 17 enfants, 14 femmes et 4 personnes âgées. (Treize soldats israéliens sont tués dimanche au cours des divers combats qui ont eu lieu à Shejaiya.)
« Je condamne ces actions atroces. Israël doit exercer la plus grande retenue et faire beaucoup plus pour protéger les civils », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, en référence au combat de Shejaiya.
« La communauté mondiale désapprouve presque unanimement l’utilisation massive de la force par Netanyahu à Gaza », affirme Zbigniew Brzezinski. C’est l’ancien conseiller à la sécurité nationale américaine et un chercheur au Center for Strategic and International Studies [cercle de réflexion et d’influence sur la politique étrangère des États-Unis].
Une étude rapide des déclarations et des communiqués de presse des dirigeants mondiaux suggère que la communauté internationale – avec quelques exceptions notables comme le Canada – perd de plus en plus patience.
« En Israël et à Gaza, la situation est extrêmement difficile », a déclaré Laurent Fabius mardi. « Rien ne saurait justifier la poursuite des attaques et des massacres qui font beaucoup de victimes et ne font qu’exacerber les tensions et les haines entre populations », a-t-il affirmé. Il a ensuite ajouté que Paris allait « agir avec beaucoup de force » et exiger un cessez-le-feu immédiat.
En Afrique du Sud, le leader de la majorité au parlement a appelé le gouvernement à expulser l’ambassadeur israélien à Pretoria et à rappeler l’envoyé sud-africain de Tel Aviv.
« Le Congrès national africain au parlement est indigné par les bombardements gratuits et injustifiés des forces armées israéliennes et la mort des civils innocents, qui incluent des enfants, dans le territoire palestinien de Gaza », a déclaré Phumelele Stone Sizani, le Whip en chef de l’ANC [le Whip en chef s’assure que les députés du parti assistent aux sessions parlementaires et votent selon la politique du parti]. Le ministère des Affaires étrangères de Jérusalem a déclaré que malgré les critiques très sévères contre la campagne israélienne à Gaza, le gouvernement de Prétoria a clairement affirmé qu’il n’avait nullement l’intention d’expulser ou de rappeler les ambassadeurs.
Même le Premier ministre anglais, David Cameron, qui a déclaré lundi qu’Israël avait
« le droit de se défendre », a eu des mots durs sur le nombre élevé des victimes civiles.
Bien que la crise actuelle à Gaza a été « déclenchée par le Hamas qui a fait pleuvoir des centaines de roquettes sur les villes israéliennes, ciblant aveuglément les civils en violations du droit et des normes humanitaires », affirme Cameron, il partage « la profonde préoccupation » du monde au sujet du « lourd bilan » des victimes civiles.
« Les chiffres sont perturbants », déclare-t-il. Il exhorte Israël à faire « tout [ce qu’il peut] pour éviter les victimes civiles, pour exercer de la retenue et pour qu’il aide à trouver une voie pour que cette situation prenne fin ».
Le leader du parti travailliste anglais, Ed Miliband, a été encore plus clair : « Nous nous opposons à l’incursion israélienne à Gaza », a-t-il déclaré dans une interview.
Ce week-end, Miliband – qui selon les sondages a une chance d’être élu Premier ministre aux prochaines élections – a critiqué Israël au sujet des victimes palestiniennes.
« En tant que parti, nous nous opposons à une nouvelle escalade de la violence telle que nous l’avons vue avec l’invasion israélienne à Gaza », affirme-t-il.
« Je défends le droit d’Israël de se défendre contre les attaques de roquettes. Mais je ne peux expliquer, justifier ou défendre les morts horribles de centaines de Palestiniens, y compris des enfants et des civils innocents ».
Le président américain Barack Obama a également réitéré le droit d’Israël de se défendre mais a exprimé « son inquiétude sérieuse au sujet du nombre croissant de morts de civils palestiniens et la perte des vies israéliennes ».
Dans le quotidien Forward, J.J. Goldberg explique que le soutien de la communauté internationale s’est transformé en condamnation. Ce changement remonte au moment où les images et les comptes-rendus de la bataille sanglante de Shejaiya ont fait surface.
« Entourez cette date dans vos calendriers : c’était le 20 juillet que l’élan [pris par Israël] s’est retourné contre lui. A un moment donné, aux alentours de midi, le vent a tourné et la marée a commencé à se soulever et Israël a commencé à perdre la sympathie internationale envers l’opération Bordure protectrice à Gaza ».
Toute l’empathie dont bénéficiait Israël auprès de la communauté des nations à cause de l’enlèvement et du meurtre des trois adolescents – Eyal Yifrach, Gil-ad Shaar et Nafatali Fraenkel – et les attaques constantes de roquettes qu’il subissait se dissipent rapidement, écrit Goldberg.
« Jusqu’à ce week-end, les protestations contre les actions israéliennes étaient limitées aux manifestations de personnes de gauche ou de musulmans dans différentes villes du monde, sans aucun appui gouvernemental. Maintenant les gouvernements commencent à passer de l’autre côté ».
Goldberg fait référence aux manifestations anti-Israël qui ont eu lieu dans plusieurs villes européennes. A Londres, Paris, Berlin ou d’autres villes importantes dans le continent, des dizaines de milliers de manifestants sont descendus dans les rues pour dénoncer l’opération Bordure protectrice.
Et pourtant, quelques observateurs restent confiants. Ils pensent que la manière responsable dont Jérusalem gère la guerre garantit la sympathie internationale et va surpasser l’outrage autour du bilan élevé des victimes civiles.
« Je ne suis pas particulièrement inquiet au sujet du soutien international pour l’opération, et cela pour deux raisons. La première est que personne n’aime le Hamas – et cela inclut le monde arabe et l’Autorité palestinienne », explique Avi Primor, un ancien ambassadeur en Europe et actuellement président du Israel Council on Foreign Relations [Conseil d’Israël sur les relations étrangères].
« Deuxièmement, nous avons accepté le cessez-le-feu ; nous avons longuement hésité avant de lancer les raids aériens ; par la suite, nous avons encore hésité avant de lancer l’offensive terrestre. Nous voulons manifestement un cessez-le-feu immédiat, mais le Hamas refuse ». Le monde sait que le problème est le Hamas, et non pas Israël, analyse-t-il.
Toutefois, il admet qu’il y a des minorités musulmanes du monde « qui sont émotionnellement impliquées » pour Gaza, mais même si les manifestations semblent importantes en Europe, elles ne représentent pas l’opinion de toute la population du continent, et « certainement pas [celui du gouvernement] ».
La plupart des manifestants ne sont pas des citoyens des pays où ils résident, explique-t-il. Il ajoute qu’à Paris, on menace d’expulser tous les résidents non citoyens qui participeraient à des manifestations anti-Israël non autorisées.
« Je ne suis pas inquiet », affirme-t-il, expliquant que la plupart des gouvernements européens voient les militants pro-palestiniens qui manifestent comme une menace pour la sécurité intérieure de leur propre pays et les jugent sévèrement. Même les manifestations pacifiques contre la guerre de Gaza ne vont pas influencer les gouvernements, analyse-t-il.
En effet, le monde occidental comprend qu’Israël est attaqué par une organisation terroriste et a besoin de se défendre. Les manifestations locales ne vont pas les faire changer d’avis, affirme un haut-responsable israélien. « Ils savent que les gens qui descendent dans la rue sont les suspects habituels : les musulmans, les marginaux et les personnes d’extrême gauche », explique-t-il. « Le grand public ne manifeste pas contre Israël ».
Alors comment se fait-il que de plus en plus de gouvernements dénoncent le bilan des victimes et exhortent Jérusalem à exercer plus de retenue ? Selon un haut-responsable, même les pays qui soutiennent Israël sont – et ont toujours été – réticents à faire face aux conséquences réelles de l’action militaire.
« Ils voudraient que tout se passe dans un milieu aseptisé. Ils affirment qu’Israël a le droit de se défendre mais ils veulent que personne ne soit blessé. Vous pouvez vous défendre mais ne causez aucun dégât ».
En conséquence, même les dirigeants mondiaux qui comprennent pourquoi Israël doit se battre finiront par condamner l’opération Bordure protectrice, surtout si le nombre de morts continue à augmenter, déclare le responsable.
« Nous avons déjà vu ça avant. Au bout d’un moment, les réactions deviennent automatiques ».
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