Italie : Dégradation d’une plaque pour Liliana Segre, survivante de la Shoah
La sénatrice de 93 ans tire la sonnette d'alarme sur les divisions existant au sein de la société italienne depuis des années
Une plaque commémorative en l’honneur de la femme politique et survivante de la Shoah Liliana Segre a été dégradée à Saltrio, dans le nord de l’Italie, près de la frontière avec la Suisse.
Le nom de la sénatrice de 93 ans a été effacé avec un objet pointu. La plaque doit ainsi être remplacée et protégée à l’avenir par une vitre en plexiglas.
En tant que l’une des survivantes de la Shoah les plus entendues du pays, Segre tire la sonnette d’alarme sur les divisions existant au sein de la société italienne depuis des années.
Elle s’est exprimée au sujet des attaques du Hamas du 7 octobre lors d’une cérémonie en novembre dans une synagogue de Milan pour les victimes et les otages.
È avvilente vedere che la targa dedicata a #LilianaSegre sia stata vandalizzata in provincia di Varese. Questo atto è vergognoso e inaccettabile. La storia di Liliana Segre e la sua lotta contro l'odio e l'antisemitismo dovrebbero essere rispettate e onorate da tutti. Condanniamo… pic.twitter.com/5eiyLR4RD9
— Enrico Borghi (@EnricoBorghi1) January 6, 2024
« Je n’ai pas envie de parler de ce sujet parce que sinon j’ai l’impression d’avoir vécu en vain », a-t-elle déclaré, qualifiant les images des attaques « d’une tristesse infinie ».
La position critique et les efforts infatigables de Liliana Segre pour avertir ses compatriotes des dangers de l’indifférence et de la haine ont fait d’elle une héroïne pour beaucoup – mais aussi une cible pour beaucoup d’autres. Faisant l’objet de multiples menaces de mort, Segre est sous protection policière depuis 2019.
Ses protestations insistantes et souvent poétiques sur la montée des idéologies d’extrême droite en Italie et en Europe résonnent depuis des années.
« La violence raciste est désormais un fleuve sans rives, le produit d’une folie collective sagement nourrie par les semeurs de haine », a-t-elle déclaré dans une interview à La Repubblica en 2018, peu après que le président Sergio Mattarella l’a nommée « sénatrice à vie » – une distinction réservée à cinq nominés présidentiels notables parmi les 321 législateurs du Sénat italien.
« Ceux qui, comme moi, ont vécu la guerre, sont habitués à l’idée de la mort et de la perte, et à la nécessité de résister, d’être forts et d’aller de l’avant », avait-elle ajouté.
Segre, militante de longue date pour l’éducation sur la Shoah, avait déjà 87 ans à l’époque de sa nomination, mais elle est rapidement devenue l’une des membres les plus visibles et actifs de la Chambre haute.
Elle a d’ailleurs créé une commission gouvernementale pour la lutte contre le racisme, un geste approuvé par le Sénat en 2019 malgré l’opposition de la Ligue du nord, un parti populiste de droite alors au pouvoir.
La France, l’Europe et les États-Unis connaissent une forte hausse de l’antisémitisme depuis les attaques du Hamas le 7 octobre contre le sud d’Israël. De nombreux graffitis, dégradations et actes antisémites ont ainsi été constatés.