La police accusée d’avoir ignoré les graves brûlures d’un manifestant d’origine éthiopienne
Fekadu Abera, ancien soldat dans une unité d'élite de Tsahal, se souvient avoir attendu 20 minutes qui devait arriver, selon la police - en vain
Un manifestant qui a été gravement brûlé pendant une manifestation en hommage à Rafael Adana contre le racisme qui avait été organisée par des Israéliens d’origine éthiopienne a indiqué que la police avait ignoré ses demandes de pouvoir être pris en charge par un médecin.
Le protestataire, Fekadu Abera, a expliqué avoir « supplié la police en lui demandant d’être évacué en ambulance mais on m’a ignoré », a-t-il raconté dimanche devant les caméras de la Douzième chaîne. Des images filmées suite à l’incident, survenu le 30 août à Tel Aviv, montrent un agent de police dire à Abera, brûlé par un cocktail Molotov qui avait été jeté par un autre manifestant, « de rester sur le côté de la route et d’attendre ».
Abera, ancien combattant dans une unité d’élite de l’armée israélienne, a raconté dans l’entretien qu’après avoir attendu une vingtaine de minutes, il était allé dans une rue jouxtant le mouvement de protestation où il avait croisé une ambulance, lui demandant de l’emmener à l’hôpital. Les vidéos montrant Abera à la manifestation ont été prises sur l’autoroute Ayalon, au moment où elle était brièvement bloqué par les manifestants.
La police a dit au Times of Israel, dans un communiqué, qu’un agent de police qui se trouvait sur les lieux avait appelé une ambulance pour prendre en charge Abera mais qu’à cause des embouteillages, celle-ci avait été dans l’incapacité de venir sur place.
En plus d’Abera, six agents de police ont été blessés et quatre personnes ont été arrêtées lors de ce mouvement de protestation dénonçant la prise en charge, par la police, d’un accident de la route suivi d’un délit de fuite qui avait tué, il y a quelques mois, le petit Rafael de 4 ans appartenant à la communauté éthiopienne à Netanya.
Abera était encore à l’hôpital Sourasky de Tel Aviv dans la journée de mardi, souffrant de graves brûlures, a indiqué Kefale, le frère du blessé, au Times of Israel. Il a refusé de commenter la prise en charge par la police de Fekadu Abera. La victime, elle aussi, n’a pas souhaité s’exprimer auprès du Times of Israel, précisant qu’il ne se sentait pas suffisamment bien pour prendre la parole.
Le rassemblement, où des panneaux dénonçant les discriminations présumées à l’encontre des Israéliens d’origine éthiopienne en raison de la couleur de leur peau ont été brandis, avait été le dernier d’une série de manifestations sur le sujet.
Il y a environ 100 000 Israéliens d’origine éthiopienne dans le pays. Leur immigration au sein de l’État juif avait commencé dans les années 1980 avec l’arrivée de Juifs qui avaient réalisé un voyage périlleux depuis l’Éthiopie, traversant le Soudan et l’Égypte. Les officiels israéliens avaient ensuite commencé à envoyer des émissaires en Éthiopie qui avaient initié l’immigration organisée, ou alyah, des populations appartenant aux importantes et anciennes minorités juives d’Éthiopie, connues sous le nom de Beta Israel.
Des initiatives qui avaient culminé avec le départ, par avion, de milliers d’Éthiopiens issus de la communauté Beta Israel dans le cadre de l’Opération Salomon, en 1991.
L’année suivante, certains immigrants avaient exercé des pressions sur le gouvernement en lui demandant de permettre à un autre groupe éthiopien d’immigrer – les Falash Mura ou Falasha, des descendants des Éthiopiens de la communauté Beta Israel qui avaient été dans l’obligation de se convertir au christianisme au 18e siècle.
La réticence initiale de certains responsables du gouvernement face à l’immigration des Falasha, qui ne sont pas reconnus comme Juifs par les autorités rabbiniques, et des retards accumulés dans le transport de ces nouveaux immigrants ont été présentés par certains Éthiopiens de la communauté Beta Israel comme une discrimination raciste.
D’autres Israéliens de la communauté Beta Israel s’opposent à l’alyah des Falasha qui, selon eux, n’ont pas suffisamment d’affinités avec le judaïsme. De nombreuses personnes proches de la communauté Falasha démentent ce point de vue, disant que ces derniers ont su préserver leur identité juive, et ce, contre toute attente.
Jusqu’à présent, environ 25 000 Falasha ont immigré en Israël, laissant souvent derrière eux leurs proches. Des milliers d’entre eux attendent encore que le gouvernement israélien apporte son approbation au grand voyage.
D’autres scandales ont concerné le traitement des membres de la communauté Beta Israel, avec notamment le refus secret, pendant des années, de la Banque du sang israélienne d’accepter des dons des Israéliens d’origine éthiopienne.
De nombreux Éthiopiens déplorent des brutalités policières et des interventions excessives des forces de l’ordre dans leurs communautés – ainsi qu’une certaine indifférence de la part des forces de l’ordre, telle qu’elle s’est illustrée dans l’accident meurtrier qui a coûté la vie au petit garçon de quatre ans, Rafael Adana, à Netanya, qui avait entraîné le mouvement de protestation du 30 août à Tel Aviv.