L’armée émet un ordre d’évacuation à l’encontre d’une communauté de bergers palestiniens de la Vallée du Jourdain
300 personnes gardent leurs troupeaux dans un secteur déclaré comme zone restreinte. L'armée affirme que ce passage à l'action concerne des constructions illégales répétées
L’armée israélienne a ordonné à environ 300 Palestiniens d’évacuer une zone de la vallée du Jourdain où vivaient ces derniers, majoritairement dans des cabanes ou sous des tentes utilisées par les bergers et leurs troupeaux, a rapporté le quotidien Haaretz dimanche.
Cet ordre d’évacuation couvre un périmètre d’environ 10 hectares, sur des terres qui incluent les communautés d’Ain al-Hilweh et d’Um Jamel. Entre les deux, les habitants élèvent environ 4 000 moutons, 200 chameaux et 600 vaches, sur des terres qui appartiennent à des Palestiniens privés ou à l’église latine, a fait savoir l’article.
La semaine dernière, les soldats de l’armée israélienne ont affiché des dépliants indiquant aux résidents du secteur que l’armée appliquerait une ordonnance contre les « constructions non-autorisées ».
Ce dépliant n’a été affiché sur aucune des constructions mais le long des routes avoisinantes. S’il a été signé par le général de division Roni Numa, commandant des forces israéliennes en Cisjordanie, le 1er novembre, il n’a été distribué que jeudi dernier, a noté Haaretz.
Il interdit à tous ceux qui se trouvent dans le secteur d’y construire ou d’y amener des biens personnels et ordonne la démolition de ce qui s’y trouve dans les huit jours.
Ce même commandement a déjà été utilisé dans le passé pour faire disparaître des avants-postes illégaux en Cisjordanie établis par les habitants israéliens d’implantations, a fait savoir l’article.
Il y a deux semaines, les soldats sont arrivés dans le secteur et ont demandé aux résidents de montrer leurs papiers d’identité, ont déclaré les habitants. Les militaires ont également pris des photos à l’aide d’un drone.
De telles actions précèdent souvent des évacuations et les démolitions de constructions menées par l’armée israélienne et l’administration civile, même si les résidents ont noté qu’ils n’ont rencontré aucun responsable de cette dernière accompagnant les soldats.
Dans une déclaration faite samedi soir à Haaretz, le coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires a indiqué que l’ordre ne se réfère qu’aux constructions et nullement à l’entrée dans la zone.
« Le 9 novembre 2017, un ordre de restriction a été émis dans le cadre de mesures d’application de la loi à l’encontre des constructions illégales dans le secteur. Ce nouvel ordre concerne les constructions illégales et non ceux qui se trouvent dans le périmètre », a fait savoir le COGAT.
« Ces dernières années, un certain nombre de familles ont commencé de manière répétée à construire illégalement dans la zone. En ce qui concerne certaines des constructions, les autorités sont en train de réexaminer les dossiers suite à des appels formulés par leurs habitants. Aucune action ne sera entreprise dans leur cas avant le terme du réexamen ».
L’avocat Towfik Jabarin de la ville arabe israélienne d’Umm al-Fahm, au nord du pays, qui représente les habitants, a envoyé une lettre d’objection samedi à l’armée israélienne, via l’avocat général militaire. Il a déploré dans la missive la manière dont les dépliants ont été affichés et distribués huit jours après qu’ils ont été signés.
« A première vue, c’est un manque de bonne foi qui se cache derrière l’intention de priver les résidents palestiniens du droit à une audience ou à un appel contre l’ordre ou contre la déclaration », a écrit Jibrin. « C’est un ordre d’expulsion massif de la population palestinienne, contraire à la loi internationale ».
L’article précise que cela fait des décennies que les bergers se trouvent dans cette zone. Ils ne sont reliés ni au réseau d’eau, ni au réseau d’électricité, et ils n’ont pas l’autorisation d’ajouter des habitations pour accueillir les nouveaux arrivants. Israël n’autorise également pas l’Autorité palestinienne à enregistrer les habitants comme vivant dans le secteur, ces derniers devant s’inscrire comme résidents d’autres communauté des alentours.
D’autres ordres d’évacuation, de démolition et des confiscations de propriété ont été émis dans le passé mais pas d’une manière aussi générale à l’encontre de tous les habitants et pas sur la base d’une ordonnance de constructions non-autorisées, a ajouté Haaretz.
En 2008, une permission avait été donnée à l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture de construire des huttes pour les bergers, avec un financement japonais. Jibrin a déclaré dans sa lettre que même si l’administration civile avait initialement donné sa permission aux huttes, elle avait plus tard démenti l’avoir fait.