L’Autorité palestinienne impose un nouveau confinement en Cisjordanie
Le couvre-feu n'a pas permis de faire baisser le taux d'infection et les hôpitaux sont à pleine capacité ; la situation serait précédent depuis le début de l'épidémie
Les secteurs palestiniens de Cisjordanie vont entrer en confinement total pendant une semaine à partir de lundi, après une hausse des cas sans précédent depuis l’apparition de la pandémie, a annoncé dimanche l’Autorité palestinienne.
« Le virus se propage largement, à une vitesse incroyable. Il n’y a rien eu de similaire depuis le commencement de l’épidémie », a commenté le porte-parole du ministère de la Santé palestinien, Kamal al-Shakhra, au micro de la radio Voix de Palestine, samedi matin.
Jusqu’à présent et depuis deux semaines, la Cisjordanie était soumise à un couvre-feu nocturne assorti d’un confinement imposé pendant le week-end mais ces mesures semblent avoir été impuissantes à apaiser la vague des infections.
Un confinement total avait déjà été mis en place la semaine dernière, sur ordre du gouverneur local, dans de nombreux secteurs de Cisjordanie – et notamment à Ramallah, Bethléem, Tubas et à Tulkarem.
Le nombre de cas actifs de coronavirus a presque doublé en Cisjordanie au cours des quinze derniers jours, passant de 9 632 à 18 599 cas actifs. Le bilan des décès a lui aussi augmenté rapidement. Il y a eu 27 morts consécutives à une forme grave de la COVID-19 au cours des dernières 24 heures.
Mais avec un dépistage médiocre – seulement environ 5 500 tests ont été réalisés samedi par l’Autorité palestinienne sur une population qui dépasse les 2,8 millions d’habitants – le nombre de malades pourrait être largement supérieur aux chiffres connus. Environ 30 % des tests de dépistage sont revenus positifs, samedi, dans toute la Cisjordanie, indiquant que le virus se propage probablement sans être détecté.
« La situation est préoccupante et nous ne sommes pas sûrs de ce qui va arriver », a commenté Salwa Najjab, responsable de la santé palestinienne, auprès du Times of Israël au cours d’un entretien téléphonique.
Selon Najjab, les choses allaient beaucoup mieux depuis quelques temps en Cisjordanie que dans la bande de Gaza, densément peuplée. Mais l’enclave côtière est apparemment venue à bout du virus aujourd’hui, alors même que les infections se sont multipliées de manière incontrôlée dans les territoires de la Cisjordanie.
« Les écoles étaient ouvertes ici et finalement, peu de gens adhèrent aux obligations de distanciation sociale ou de port du masque », a dit Najjab, qui est membre de la commission nationale de lutte contre le coronavirus de l’Autorité palestinienne.
Comme de nombreux autres officiels de la Santé, Najjab a attribué la responsabilité de la situation au variant britannique de la COVID-19 qui se propage plus vite et qui est aussi plus meurtrier que la souche originale de coronavirus.
« Nous constatons que non seulement ce variant se propage plus rapidement, mais qu’+6il touche aussi les enfants et les jeunes », a noté Najjab. De tels cas étaient bien plus rares au cours de la première et de la seconde vague de la pandémie.
« Nous avons ouvert de nouvelles unités quand nous avons vu que la situation se détériorait. Mais les unités sont ouvertes et les chiffres continuent à grimper… Nous sommes à 100 % de nos capacités de manière générale, voire à 110 % dans certains de nos hôpitaux », a continué al-Shakhra.
Le nouveau confinement qui sera imposé à toute la Cisjordanie commencera lundi et devrait s’achever samedi soir, quand les responsables de la Santé se rencontreront pour évaluer à nouveau la situation.
Mais contrairement aux précédents confinements, les gouverneurs locaux auront le droit de faire leur choix dans les dispositions qui seront imposées.
« Chaque gouvernorat sera autorisé à prendre les initiatives considérées comme appropriées pour protéger la santé publique tout en protégeant le bien-être économique de la population », a ainsi déclaré le porte-parole du gouvernement de l’AP, Ibrahim Melhem, devant les caméras de la chaîne officielle de l’Autorité palestinienne.
Pas de vaccins en vue
Si l’Autorité palestinienne a ouvert un site internet dans la journée de mercredi où les citoyens peuvent prendre rendez-vous pour se faire vacciner contre le coronavirus, il manque toutefois un élément majeur : les vaccins.
Si Israël a été leader mondial dans sa campagne d’immunisation massive, une telle campagne publique n’a pas encore seulement commencé chez les Palestiniens. L’AP a passé des contrats avec plusieurs fournisseurs – notamment AstraZeneca et avec la Russie et la Chine – pour obtenir des doses. Un nombre très modeste de vaccins est arrivé jusqu’à présent.
Les responsables de l’Autorité palestinienne ont fixé des calendriers publics répétés pour l’arrivée des vaccins – sans résultat. Ils devaient être potentiellement mis à disposition fin janvier, début février, mi-février et début mars, mais ces échéances sont restées vaines.
Ramallah affirme se préparer à recevoir deux millions de doses de vaccin AstraZenaca au cours du mois d’avril. Selon la ministre de la Santé de l’Autorité palestinienne, Mai al-Kaila, environ 100 000 vaccins Sinopharm chinois devraient entrer sur le territoire dans les prochaines semaines.
L’AP s’attend également à obtenir environ 37 000 vaccins Pfizer ainsi que 240 000 à 405 600 vaccins AstraZeneca dans le cadre du programme COVAX, un programme mondial de vaccination pour les pays pauvres ou à revenu moyen qui est soutenu par l’Organisation mondiale de la Santé.
Après de nombreux obstacles bureaucratiques, les vaccins Pfizer, qui doivent être administrés aux employés du secteur de la Santé, devraient arriver à Ramallah le 17 mars, a confié une source de l’Organisation mondiale de la Santé au Times of Israël.
Environ 12 000 doses de vaccins ont été livrées à l’AP jusqu’à présent – 2000 vaccins Moderna, donnés par Israël, et 10 000 doses du vaccin russe Sputnik V. Environ 2 000 doses de ces vaccins ont été envoyées dans la bande de Gaza et environ 200 en Jordanie, a fait savoir le ministère de la Santé palestinien.
Les 9 000 vaccins restants ont été alloués à la Cisjordanie, a ajouté le ministère de la Santé. Mais leur distribution a donné lieu à des accusations de népotisme et de corruption, avec un certain nombre de doses qui ont été administrées à des personnes proches des responsables du gouvernement au détriment des personnels de santé.
Dans un communiqué, Ramallah a reconnu que certaines doses avaient été données à des officiels gouvernementaux, à certains jeunes étudiants et aux membres de l’équipe national de football. Ils ont néanmoins maintenu que 90% des vaccins avaient été administrés aux personnels qui se trouvent actuellement sur le front de la pandémie.
Alors que le système de santé palestinien est proche de l’effondrement, al-Kaila a fait savoir mercredi que l’AP avait reçu une livraison de dix respirateurs et autres équipements médicaux de la part d’une organisation caritative dont le siège est aux Émirats arabes unis.
C’est l’International Charity Organization, un groupe soutenu par le gouvernement, qui était à l’origine de cette livraison, selon al-Kaila. Des fonds ont également été fournis par la communauté de la diaspora palestinienne qui vit aux EAU.
Un responsable de la Santé palestinien a déclaré aux journalistes que l’ONG débattait de la possibilité d’envoyer des doses de vaccin supplémentaires aux Palestiniens, en commençant avec les Palestiniens « pauvres et marginalisés » au sein de la société.
Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères des Émirats n’a pas répondu à notre demande de commentaire.