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Interview

Le chef de l’ADL se confie sur l’antisémitisme et les lois mal faites

Après l'agression de Monsey et la vague de crimes contre les Juifs, Jonathan Greenblatt fustige le maire de New York pour avoir gardé le silence sur les agressions à Brooklyn

Eric Cortellessa couvre la politique américaine pour le Times of Israël

Jonathan Greenblatt, chef de l'Anti-Defamation League, s'exprimant à l'hôtel Grand Hyatt à New York, le 2 octobre 2015. (Leigh Vogel/Getty Images pour le Concordia Summit)
Jonathan Greenblatt, chef de l'Anti-Defamation League, s'exprimant à l'hôtel Grand Hyatt à New York, le 2 octobre 2015. (Leigh Vogel/Getty Images pour le Concordia Summit)

WASHINGTON – Suite à une attaque antisémite dans la nuit de samedi à dimanche – au cours de laquelle un homme brandissant une machette a agressé des Juifs lors d’une fête de Hanoukka à Monsey, New York – le chef de l’Anti-Defamation League a vivement critiqué le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, pour avoir poussé à l’adoption d’une nouvelle loi sur la mise en liberté sous caution qui pourrait permettre à certains auteurs de crimes haineux d’être libérés.

« Si vous commettez un crime de haine, si vous attaquez une personne âgée parce qu’elle porte un chapeau noir, si vous agressez physiquement quelqu’un à cause de la façon dont il prie, il ne devrait pas y avoir de liberté sous caution pour vous », a déclaré Jonathan Greenblatt au Times of Israel. « Nous avons besoin d’une dissuasion avec des conséquences réelles quand ces choses se produisent ».

La loi, qui entre en vigueur le 1er janvier mais qui est déjà appliquée, mettra fin à la caution en espèces pour les délits et de nombreuses infractions non violentes. Elle ne s’appliquera pas dans l’affaire Monsey, mais certains de ses détracteurs soutiennent qu’elle permettra aux personnes qui commettent des crimes haineux de réintégrer la société immédiatement après avoir été arrêtées.

M. Greenblatt s’est dit d’accord avec des approches plus légères et plus réhabilitantes pour certains délits non violents, tels qu’un adolescent qui franchit un tourniquet ou qui vole à l’étalage, mais il a demandé des peines plus sévères pour les crimes violents motivés par la haine.

En même temps, il encouragea la réinsertion des jeunes contrevenants.

Le gouverneur de New York Andrew Cuomo s’adresse aux médias à l’extérieur de la maison du rabbin Chaim Rottenberg après une attaque à la machette qui a eu lieu à l’intérieur de la maison du rabbin pendant la fête juive de Hanoukka à Monsey, New York, le 29 décembre 2019. (Kena Betancur/AFP)

« Ces gens sont très souvent des mineurs », a-t-il précisé. « Il faut les aider à découvrir la communauté, les aider à comprendre leurs voisins. Les meilleurs antidotes à l’intolérance sont l’éducation et l’engagement. Il faut trouver des moyens de rapprocher les gens qui ne se comprennent pas. »

Avant l’attaque de Monsey, deux individus armés ont pris pour cible un supermarché casher de Jersey City au début du mois, tuant quatre personnes, dont un policier et deux membres de la communauté juive. New York a également connu une forte augmentation des agressions contre les juifs orthodoxes à Brooklyn.

Greenblatt a critiqué le maire de la ville de New York, Bill de Blasio, pour être resté pratiquement silencieux alors que les attaques se multipliaient.

Le maire de la ville de New York, Bill de Blasio, s’exprime lors de son discours sur l’état de la Ville à New York, le 10 janvier 2019. (AP Photo/Seth Wenig, File)

« Le maire de cette ville aurait dû être ici avant », a-t-il dit. « Il aura fallu une attaque au couteau à Jersey City, juste au-dessus de la ligne dans le New Jersey, alors que les gens souffrent à Brooklyn depuis un certain temps. C’est très décevant que nous n’ayons pas plus d’énergie pour ça. »

Dans une interview accordée lundi, M. Greenblatt a également demandé un certain nombre de réformes en réponse à la récente recrudescence de la violence antisémite, y compris une plus grande allocation de fonds fédéraux pour sécuriser les communautés juives dans tout le pays.

Il a approuvé un plan que le leader de la minorité au Sénat, Chuck Schumer, a dévoilé lundi et qui consiste à dépenser 360 millions de dollars en subventions pour la sécurité des synagogues et autres lieux de culte.

Il faut aussi, a ajouté M. Greenblatt, que les municipalités locales affectent davantage de forces de police aux centres communautaires juifs. « L’absence de présence policière crée un environnement où les gens pensent qu’ils peuvent commettre ce genre de crimes, parce qu’il n’y a pas de dissuasion », a-t-il expliqué.

Greenblatt a reconnu les conséquences négatives que l’intensification des activités policières a souvent eu sur les communautés de couleur. Néanmoins, a-t-il affirmé, il existe des méthodes qui peuvent protéger les Juifs des attaques antisémites sans nuire aux autres minorités.

« Il y a une façon intelligente de procéder qui est respectueuse des minorités raciales et qui assure que tous les groupes religieux sont adéquatement protégés », a-t-il dit.

Quelle est l’origine de tout ça ?

Des données récentes de l’ADL montrent que les incidents antisémites sont en hausse aux États-Unis. Rien qu’en 2018, il y a eu 1 879 actes antisémites enregistrés, selon l’organisation des droits civils juifs, dont 13 % ont été perpétrés par des tenants de la suprématie blanche. Cela inclut la fusillade de la synagogue Tree of Life, qui a tué 11 personnes, la plus meurtrière attaque antisémite jamais perpétrée sur le sol américain.

« Je pense que nous devons commencer par comprendre le fait que quelque chose a changé », a dit Greenblatt. « Il n’y a aucun doute que la haine est en hausse en Amérique comme jamais auparavant. »

Greenblatt a accusé le président américain Donald Trump d’avoir contribué à enhardir les extrémistes, en déclarant : « Sa façon de s’exprimer a certainement contribué à cette atmosphère d’intolérance ». Mais il a ajouté qu’il était important d’internaliser le fait que la résurgence de l’antisémitisme aux États-Unis était le résultat de nombreuses sources différentes.

« Il est juste de dire que certains programmes politiques sont à l’origine de cela, mais nous devons aussi éviter la tendance à être réductionnistes – à essayer de tout comprimer dans un récit particulier prédéterminé », a-t-il ajouté.

Des policiers de Ramapo escortent Grafton Thomas, le suspect de l’attaque de Monsey, depuis l’hôtel de ville de Ramapo jusqu’à un véhicule de police, à Ramapo (New York), le 29 décembre 2019. (Julius Constantine Motal/AP)

« L’antisémitisme existe depuis des milliers d’années. Il existait avant que nous ayons des partis politiques dans ce pays. Donc je pense que nous nous rendons un mauvais service en disant que c’est uniquement la faute des uns ou des autres. »

Si le tireur de Pittsburgh était un partisan du président américain, les dernières attaques à Jersey City et à Monsey ont été menées par des Afro-Américains dont les convictions politiques sont inconnues. Le tireur de Poway, pour sa part, a accusé Trump d’être un « traître pro-sioniste ».

« La banalisation de l’antisémitisme… vient de toutes parts et a été utilisée comme arme par toutes sortes de personnes ayant des programmes politiques », a déclaré M. Greenblatt. Cela est dû en grande partie, a-t-il ajouté, à « une diminution des contraintes qui ont maintenu un discours quelque peu civilisé ».

La raison pour laquelle ces contraintes se dissipent, a-t-il ajouté, est multiple – de l’émergence de dirigeants qui ont permis à des points de vue autrefois marginaux de se généraliser, à l’essor des réseaux sociaux.

Les plateformes de réseaux sociaux, a-t-il dit, ont donné aux sectaires une tribune pour amplifier les idées nocives et les théories du complot.

Le co-fondateur et PDG de Facebook Mark Zuckerberg témoigne devant la House Financial Services Committee dans le bâtiment Rayburn House Office à Capitol Hill le 23 octobre 2019 à Washington, DC. (Chip Somodevilla/Getty Images/AFP)

« L’une des raisons pour lesquelles nous vivons ces temps-ci, dans ce genre de climat, ce sont les réseaux sociaux, qui ont normalisé certains des plus malsains », a-t-il dit. « Les réseaux sociaux ont créé un potentiel extraordinaire à bien des égards, mais vous avez la possibilité de diffuser des calomnies antisémites par un simple glissement ou un clic. Vous ne pouviez pas les trouver auparavant dans un journal, ou dans une librairie, ou à la télévision. Maintenant, elles sont omniprésentes. »

Greenblatt a appelé à des règles plus strictes sur les plateformes de réseaux sociaux pour éliminer les contenus antisémites et autres contenus racistes et haineux.

Le principal remède, a-t-il affirmé, est de renvoyer les utilisateurs qui crachent des discours haineux. Il a fait valoir que le fait de diffuser du vitriol antisémite équivalait à crier des insultes anti-juives dans un café ou un restaurant – dans ce cas, les gestionnaires vous feraient partir.

« Si vous allez sur Facebook, YouTube, Twitter ou l’une de ces plateformes, et que vous dites des choses terribles sur les Juifs, les Mexicains ou les Musulmans, ils devraient vous exclure », a-t-il ajouté. « Ce sont des entreprises. Ce ne sont pas des zones de liberté d’expression – elles sont régies par les mêmes lois que Starbucks ou une cafétéria. »

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