Le chef du Barreau israélien fustige le projet de neutralisation de la Haute cour
Selon Avi Himi, les Israéliens doivent "descendre dans la rue" pour s'opposer à la clause dite "dérogatoire" concernant la Haute cour et aux réformes dans la nomination des juges

Le responsable de l’Association du barreau israélien a dénoncé, lundi, les réformes envisagées par les membres de la nouvelle coalition au pouvoir présumée qui est formée de partis de droite, d’extrême-droite et religieux – des réformes qui réduiraient de manière considérable l’autorité des tribunaux et qui permettraient aux politiciens de décider des nominations faites dans le système judiciaire.
Avi Himi a appelé les Israéliens à se mobiliser massivement contre ces propositions – ces projets prévoient notamment d’autoriser la Knesset à passer outre les jugements rendus par la Haute-cour de justice et de changer les critères pris en compte lors du choix du président de la plus haute instance judiciaire d’Israël.
« On veut faire de nous une nouvelle Hongrie avec tout ce que cela implique », a dit Himi au quotidien Haaretz, se référant au gouvernement autoritaire du Premier ministre Viktor Orban.
Il a ajouté que les réformes nuiront à terme « au citoyen moyen d’Afula, de Yeruham, de Kiryat Shmona et de partout ailleurs », citant plusieurs villes où le parti du Likud de Benjamin Netanyahu et ses factions alliées ont remporté la majorité des suffrages lors des élections du 1er novembre.

« Ce que cela signifie, c’est qu’il y aura un gouvernement sans aucune retenue, sans aucune supervision qui pourra faire absolument tout ce qu’il veut », a-t-il continué.
L’Association du Barreau israélien a rejeté les affirmations qui ont pu laisser entendre que la clause dite « dérogatoire » – qui accorderait à une majorité de députés le pouvoir de rejeter des décisions prises par la Haute cour – serait nécessaire pour garantir que le gouvernement pourra faire correctement son travail, évoquant « une légende urbaine sans aucune base logique ».
« Notre méthodologie judiciaire ancre des valeurs universelles qui sont les fondements de nos vies partagées. S’il n’y a plus d’égalité, de moralité ou de justice, et que des lois portent préjudice à une minorité ou à une autre alors Israël ne sera plus une démocratie », a-t-il poursuivi.
« Le nouveau gouvernement présumé n’a pas le droit de changer la méthode de gouvernance en Israël – mais c’est ce qu’il veut faire et c’est ce qu’il va faire », s’est-il exclamé.

Interrogé sur la perspective d’une éventuelle tentative, de la part de Netanyahu, de mettre un terme à son procès pour corruption, Himi a affirmé qu’une telle initiative était « inconcevable ». Le chef du Likud, qui n’a cessé de clamer son innocence, a souligné qu’il ne chercherait pas à interférer dans la procédure lancée à son encontre. Les audiences sont actuellement en cours.
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Himi a lancé un appel, demandant aux Israéliens – « des dizaines de milliers »- à descendre dans la rue pour dénoncer les réformes proposées. Il a également déclaré ne pas s’attendre à ce que les juges de la Cour suprême donnent leur accord à un changement dans la méthode de sélection de leur président, qui repose sur l’ancienneté. Certains alliés de Netanyahu ont demandé le changement de cette méthode de manière à avoir une influence sur la nomination et le choix du prochain premier magistrat.
« Les citoyens doivent descendre dans les rues », a-t-il insisté.
Par ailleurs, la Douzième chaîne a fait savoir lundi que certains partenaires politiques de Netanyahu avaient donné au numéro deux du Likud, Yariv Levin – qui devrait probablement devenir le prochain ministre de la Justice – toute la liberté d’action nécessaire pour faire avancer les changements qu’il juge appropriés.
Le reportage, qui n’a pas cité ses sources, a indiqué que deux factions avaient indiqué au Likud que : « Prenez une feuille blanche. Dites à Yariv Levin d’y écrire tout ce qu’il veut et nous le soutiendrons ».

La chaîne n’a pas précisé quels alliés du Likud – parmi les membres de deux partis ultra-orthodoxes et ceux de trois formations d’extrême-droite – ont relayé ce message.
La semaine dernière, la présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, a déclaré que le système judiciaire israélien « sera fort » face aux projets de refonte du futur gouvernement présumé et elle a répété qu’un système judiciaire indépendant avait une importance cruciale, sans mentionner une réforme envisagée en particulier.
Les changements proposés – et en particulier la clause dite « dérogatoire » – ont été dénoncés par les adversaires politiques de Netanyahu, un groupe de professeurs de droit et par un éminent avocat américain, Alan Dershowitz.