Le confinement accélère le vieillissement, selon un gériatre israélien
L'isolement érode rapidement les fonctions cognitives, la mémoire et les capacités physiques, avertit un médecin, qui exhorte le gouvernement à revoir son traitement des seniors

Le confinement accélère le processus de vieillissement des personnes âgées, et ses effets néfastes à long-terme sur les retraités pourraient l’emporter sur les risques d’une politique plus clémente en matière de coronavirus, selon un éminent gériatre.
Le Dr Yoram Maaravi a expliqué au Times of Israel : « Le confinement a en fait réduit le fonctionnement physique et cognitif de nombreuses personnes âgées, accélérant le processus de déclin d’une manière inhabituelle et inquiétante ». « C’est inquiétant, car en médecine gériatrique, lorsque les patients ont des problèmes cognitifs, nous constatons une détérioration plus importante et plus rapide de leur état de santé général ».
Il a déclaré que si le confinement peut avoir un impact sur le bien-être de tous les âges, il en a un particulièrement fort sur les personnes âgées. Pour elles, rester actif et maintenir des interactions sociales sont la clé pour éviter la détérioration, a-t-il dit.
M. Maaravi a commenté : « Je crains qu’en termes de santé des personnes âgées d’Israël, cela puisse causer plus de dommages qu’une approche différente du coronavirus qui utilise des mesures plus légères et rend les personnes âgées moins isolées. Tout le monde parle de protéger les gens contre le coronavirus, mais on ne parle pas assez du mal qu’il y a à isoler les gens, en particulier les personnes âgées ».
« La soi-disant protection que nous constatons peut même provoquer une détérioration qui peut les tuer, car l’effet de l’isolement a un tel impact sur la santé générale. Il affecte de nombreux systèmes du corps, et pas seulement l’esprit. Nous avons besoin d’un équilibre. Vous ne pouvez pas évaluer les risques pendant la pandémie sans avoir une vue d’ensemble ».

Israël est placé sous confinement depuis la mi-septembre, et a commencé à assouplir ses règles à la mi-octobre. La semaine dernière, le président Reuven Rivlin a souligné que l’impact de la crise actuelle sur la santé va bien au-delà des cas de virus. En visite dans une association de santé mentale à but non lucratif, il a déclaré : « Parallèlement à la pandémie de coronavirus, une pandémie de solitude et d’isolement se développe et nous devons la traiter ».
Le docteur Maaravi, médecin en chef du département de gériatrie du centre médical Hadassah, a fait savoir que la période la plus intense de confinement, qui s’est terminée le 18 octobre, a touché le plus durement les personnes âgées.
Mais même maintenant que les règles de la fermeture ont été assouplies, les encouragements de longue date du gouvernement pour que les personnes âgées limitent leurs interactions et que les jeunes gardent largement leurs distances continuent de guider beaucoup de personnes.
M. Maaravi pense que cette attitude est « condescendante » et qu’elle ne permet pas aux personnes âgées de prendre des décisions éclairées sur la distance à parcourir pour se protéger du coronavirus.
M. Maaravi dit avoir constaté un vieillissement accéléré chez les personnes âgées depuis la première fermeture d’Israël au printemps. Cependant, il a indiqué que ce vieillissement est plus marqué que jamais depuis le début du second confinement.
« Je le vois tout le temps maintenant », a-t-il dit. « Les personnes âgées qui ont décliné rapidement – cognitivement, dans un sens fonctionnel, et psychologiquement ».
Il a ajouté : « Ce sont souvent des personnes qui étaient complètement saines et indépendantes, qui se plaignent maintenant de perdre la mémoire et d’avoir un fonctionnement cognitif altéré. Ce sont des personnes qui ne sont pas particulièrement exposées au coronavirus, mais qui sont très exposées aux conséquences de l’isolement ».
L’effet est observé chez les personnes qui vivent avec un partenaire, ainsi que chez celles qui vivent seules, a-t-il dit.
L’impact de l’isolement sur les personnes âgées a reçu une attention limitée dans les cercles médicaux, mais il y a eu quelques articles et études. Un éditorial du Journal of Clinical Nursing affirme qu’il y a « un besoin urgent de soutenir les personnes âgées pour atténuer les impacts négatifs de l’isolement social sur leur santé physique et mentale ».
Il affirmait : « Un élément immédiat qui doit être souligné est la possibilité que des personnes âgées auparavant vigoureuses deviennent de plus en plus fragiles en raison de la réduction de leurs activités, en particulier la marche, et mènent un style de vie (imposé) plus sédentaire, ce qui aura probablement un impact sur leur mobilité et leur bien-être au fil du temps ».
L’arrivée de l’hiver et la perspective d’un temps plus froid qui gardera encore plus les personnes âgées à l’intérieur, ont mis la question de plus en plus au premier plan des défenseurs des seniors.
L’organisation caritative britannique Age vient de mener une enquête qui, selon elle, indique un déclin rapide. « Cette pandémie a mis en évidence le vieillissement de millions de personnes âgées », a souligné Caroline Abrahams, directrice de l’organisation.

Maaravi souhaite que le gouvernement utilise les dispositifs d’isolation avec plus de prudence, trouve des cadres créatifs pour que les personnes âgées puissent se rencontrer, et change son message sur la protection des retraités.
Il a travaillé avec la Fédération des autorités locales pour développer un format de réunions en plein air dans un « espace sécurisé » où les personnes âgées peuvent aller pour la musique et l’activité physique. Ces réunions ont lieu dans certains endroits, mais il souhaite que d’autres initiatives soient prises ailleurs.
Concernant le discours national « condescendant » : « Le langage utilisé par le gouvernement doit être révisé. Il est inacceptable que les fonctionnaires disent : ‘Vous devez tous rester chez vous’. Ils devraient expliquer ce que nous savons sur les risques de la pandémie et encourager les gens à décider de ce qu’ils doivent faire ».
« En réalité, les personnes âgées ne constituent pas un groupe à risque unique, mais plutôt un ensemble de personnes présentant différents niveaux de risque, et cela doit être souligné et compris. Il est faux de dire simplement à toutes les personnes âgées qu’elles sont à haut risque et de dire aux familles de ne pas rendre visite à leur grand-mère parce qu’elles risquent de lui causer du mal ».
« Et en plus d’être mieux informée, la conversation doit respecter les choix personnels. J’ai des patients qui me disent : ‘Si je veux mourir parce que j’ai embrassé mon petit-fils, c’est mon choix. Je préfère mourir d’avoir été étreinte que de mourir seule' ».