Le consultant hassidique de qui Google n’a jamais exigé de diplôme
Issamar Ginzberg, le consultant en marketing autodidacte qui étudie la Torah plusieurs heures chaque jour, est fier d'être un pont entre deux mondes
JTA – Lorsque Issamar Ginzberg entre dans son bureau à Jérusalem par cette journée d’été torride, il porte un long manteau noir avec une corde à la taille et un chapeau noir. Sa longue barbe en bataille et ses papillottes, ne l’aident guère face à la chaleur.
Le bureau est – Dieu merci – climatisé et Ginzberg m’offre des bonbons casher posés dans un bol sur son bureau, à côté de son ordinateur portable et d’un téléphone LG, sur lesquels sont installés des filtres « casher » qui empêchent l’accès à de nombreux sites Web. Alors que certains hommes ultra-orthodoxes refusent de posséder un smartphone, Ginzberg en a deux. Il possède également un Blackberry utile pour ses voyages d’affaires aux États-Unis.
Sur une étagère se trouve une série de CD de cours audio en yiddish sur la façon de réussir en affaires que Ginzberg produit et vend.
Descendant d’une dynastie rabbinique hassidique, Ginzberg vit dans un quartier haredi de Jérusalem, allant tous les jours à la synagogue et étudiant la Torah plusieurs heures chaque matin. Mais l’après-midi, le soir et la nuit, il est consultant en marketing pour plus de 100 clients, parmi lesquels Google et Oracle.
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« Ma clientèle clé est le monde des affaires et les entrepreneurs dans le monde non-juif, non-orthodoxe », a confié Ginzberg, 35 ans, père de quatre enfants. « Une des raisons pour lesquelles on me fait tant confiance dans la communauté orthodoxe est parce qu’ils savent que je suis honnête, parce que je travaille en fait dans le monde réel. »
Ce natif de Brooklyn s’est installé à Jérusalem il y a sept ans, juste au moment où il était beaucoup question en Israël d’intégrer les haredim dans l’armée et dans le monde du travail. Le taux d’emploi chez les hommes ultra-orthodoxes a augmenté ces dernières années et se situe à 45 %; beaucoup d’hommes ultra-orthodoxes choisissent encore d’étudier la Torah à plein temps plutôt que de travailler.
Beaucoup de haredim voient une contradiction entre la culture dans un environnement de travail laïc et la leur, mais Ginzberg dit que son chapeau noir et sa barbe sont une fonctionnalité, pas un bug. Il met l’accent sur son parcours religieux dans ses documents promotionnels, se faisant appeler « Rabbi Issamar », tel « un personnage à peine sorti d’un Violon sur le toit. »
« C’est plus difficile d’être pris au sérieux, mais le fait que vous ayez un look différent vous accorde 10 secondes, ‘Laissez-moi voir ce que ce gars a à offrir’, dit-il.
« Si vous rencontrez 20 WASP [White Anglo-Saxon Protestant] et un gars qui me ressemble, duquel vous vous souviendrez six mois plus tard ? »
Ginzberg qui a grandi en parlant le yiddish et l’anglais dans un quartier orthodoxe de New York, a eu rapidement le goût pour les affaires.
Comme adolescent, il a utilisé les petites annonces et le début de l’Internet pour acheter en vrac des ordinateurs 386 et les revendre. Il est devenu un courtier en prêts hypothécaires il y a 15 ans et avec les bénéfices a créé une société de conseil. Il a maintenant 120 clients réguliers qui lui paient 3 000 dollars pour des forfaits de 10 heures.
Pour se conformer à son mode de vie ultra-orthodoxe, Ginzberg commence ses journées à 7 h du matin, en répondant aux courriels tardifs de clients américains avant de se rendre à la prière du matin à 8 ou 9 h. Il étudie ensuite la Torah avec un partenaire jusqu’à 13 h, avant de reprendre son travail de conseil, consacrant une heure à chacun de ses clients. Dans la soirée, Ginzberg passe deux heures et demi avec sa famille avant de travailler après minuit avec des entreprises de la côte ouest des Etats-Unis, ce qui lui laisse cinq heures de sommeil tout au plus.
« Lui et moi pensons qu’il est préférable d’étudier [la Torah], mais vous ne pouvez pas apprendre toute la journée parce qu’il n’y a pas de salaire », a dit Moti Feldstein, le directeur de Kemach, une organisation qui a aidé 7 400 hommes ultra-orthodoxes à trouver du travail. « Vous avez des enfants. Vous avez besoin d’un gagne-pain. Il ajoute : « Regardez-moi : avec mon costume et mon chapeau, j’apprends la Torah et je travaille ».
Les clients disent ce qui rend Ginzberg précieux est sa capacité à comprendre rapidement de nombreux sujets variés malgré l’absence de formation professionnelle dans ces domaines.
Ginzberg dit que cela provient du fait d’être autodidacte avec une éthique de travail acquise en étudiant en yeshiva. Il n’a pas de diplôme d’études universitaires, mais il a appris par lui-même, dit-il, en lisant avec avidité des livres et des articles sur le monde des affaires et sur la psychologie.
« J’aime sa façon d’arriver au but », a dit Yael Sela-Shapiro, une traductrice qui a travaillé avec Ginzberg et l’a aidé à mettre en place un séminaire qu’il a donné au siège israélien de Google en 2013.
« Il parle pendant quelques minutes et parvient à cerner la question exacte qui lui permet d’obtenir l’information dont il a besoin pour vous donner les meilleurs conseils ».
Depuis son arrivée en Israël, Ginzberg s’est impliqué dans l’accroissement du taux de travail chez les haredim. Il joue le rôle d’interface entre Kemach et des employeurs potentiels comme Google et Intel, en aidant à combler les lacunes culturelles entre le monde de l’high-tech et celui des ultra-orthodoxes. Et il donne des conférences dans des yeshivot en Israël et en Amérique, présentant aux étudiants les rudiments du monde des affaires.
« Il leur explique ce qu’est le travail, le professionnalisme », a déclaré Feldstein. « Vous travaillez dans une équipe, vous avez un patron, vous devez arriver à l’heure, la façon de travailler quand il y a quelqu’un de différent à côté de vous. »
A en juger par la page Facebook de Ginzberg, il ne se contente pas d’utiliser Internet pour gagner sa vie – il y prend du plaisir aussi.
En plus des conseils d’affaires, il publie des liens vers des articles sur le Moyen-Orient, sur le Shabbat et, dans un cas récent, sur le fait d’avoir été confondu avec un homme Amish. Ginzberg affirme que tout cela fait partie de la promotion de son travail.
« Vous ne pouvez pas fuir les médias sociaux », a-t-il dit. « Les affaires sont en trois dimensions. Les gens sont en trois dimensions. Quand j’écris Shabbat Shalom, je dis en fait que je suis fier d’être un Juif religieux. Je rappelle aux gens, qu’ils soient religieux ou non, que Shabbat arrive. Je montre à tous que j’ai la chance d’être qui je suis et de faire ce que je fais ».
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