Le lac de Tibériade se dirige vers son niveau le plus bas jamais enregistré
L’une des pires sécheresses depuis un siècle pousse les experts à chercher comment alimenter le lac en eau dessalée
Quelques jours avant que des dizaines de milliers d’Israéliens n’aillent au lac de Tibériade pour les vacances de Souccot, l’Autorité de l’eau a prévenu que le lac d’eau douce atteignait des niveaux dangereusement bas et devrait atteindre « le plus bas niveau jamais enregistré. »
Le nord d’Israël connaît l’une de ses pires sécheresses depuis 100 ans, ce qui entraîne un déficit de 2,5 milliards de mètres cubes d’eau des réserves du pays par rapport aux années sans sécheresse, a annoncé lundi Uri Schor, le porte-parole de l’Autorité de l’eau.
Le déficit correspond à l’équivalent d’un million de piscines olympiques, de l’eau qui alimente normalement les torrents et la nappes phréatiques d’Israël.
Pendant Rosh HaShana, plus de 40 000 Israéliens se sont rendus sur les plages du lac. Encore plus de visiteurs sont attendus durant Souccot, fête qui dure une semaine et commence mercredi soir. Ils devraient être accueillis par le lac à son plus bas niveau de l’histoire moderne d’Israël.

Le nord du pays doit recevoir au moins 85 % des chutes de pluie hivernales cet hiver, pour que le pays ne voie pas ses torrents, comme la rivière Banias du plateau du Golan, et ses sources d’eau s’assécher, ce qui n’est jamais arrivé depuis que les enregistrements des conditions météorologiques ont commencé dans la région il y a plus de 100 ans, a dit Schor. L’année dernière, le nord d’Israël n’a reçu que 10 % des pluies hivernales.
« Nous sommes maintenant dans une situation permanente de changement climatique », a dit Doron Markel, directeur de la division du lac de Tibériade de l’Autorité de l’eau. « Ce n’est pas une période de ‘une sécheresse, puis nous aurons une saison pluvieuse’. Ce n’est pas comme au temps de Pharaon, où sept années d’abondance précèdent sept années de sécheresse. »
Le niveau du lac de Tibériade se situe actuellement à 214,13 mètres sous le niveau de la mer, soit 1,1 mètre sous sa ligne rouge la plus basse.
En 2001, le lac avait atteint un niveau encore plus bas, à 214,87 mètres sous le niveau de la mer, ce qui a été baptisé la « ligne noire » du lac. Cette ligne noire est un niveau dangereusement bas qui peut créer des problèmes écologiques irréversibles, notamment une hausse de la salinité et de la quantité d’algues, ce qui peut entraîner un danger permanent pour la qualité de l’eau, la faune et la flore.
Yael Cohen-Paran, députée de l’Union sioniste, a affirmé lundi que le gouvernement devait adopter une « approche importante et stratégique plutôt qu’une solution temporaire. » Elle a ajouté que les fermiers du nord devaient être dédommagés par un fonds spécial pour les victimes des catastrophes naturelles, ce qui leur permettrait de renouveler leurs équipements pour adopter des techniques ou des cultures qui utilisent moins d’eau.
« La sécheresse est une partie de la crise climatique, et nous devons comprendre que c’est à nous d’adapter notre politique de l’eau aux conditions actuelles », a-t-elle dit.
Markel a prévenu que les Israéliens, qui sont obsédés par le niveau du lac de Tibériade au point que les bulletins météo incluent souvent cette donnée, doivent comprendre que le niveau d’eau ne dit pas tout.
En 2001 et 2008, quand le lac de Tibériade a atteint un niveau similaire à celui d’aujourd’hui, Israël pompait encore 300 millions de mètres cubes d’eau dans le lac pour sa consommation d’eau potable et agricole. Mais grâce aux cinq usines de désalinisation qui longent la côte méditerranéenne, Israël a cessé il y a deux ans de prendre de l’eau directement dans le lac. Environ 150 millions de mètres cubes d’eau sont toujours pris au nord du lac pour un usage local, un taux stable depuis 40 ans, mais il n’y a plus d’eau pompée dans le lac en lui-même.
Aujourd’hui, le lac est au même niveau qu’il y a des années, mais sans que des centaines de milliers de personnes ne consomment directement son eau.
La situation est devenue si mauvaise que des experts cherchent à ajouter de l’eau dans le lac de Tibériade. Cette possibilité n’est pas encore pour tout de suite, parce que les 600 millions de mètres cubes d’eau dessalée produits sont consommés. Mais, alors qu’Israël augmente ses capacités de désalinisation, notamment en construisant une sixième usine entre Akko et Nahariya, de l’eau dessalée supplémentaire sera d’abord pompée au nord du lac, pour que les habitants et les fermiers de la région n’aient pas besoin de prendre de l’eau dans le bassin versant du lac. Si cela ne résout pas le problème, Markel n’exclut pas la possibilité d’alimenter directement le lac en eau douce.

« Si le climat continue dans la voie que nous observons et que cela devient notre situation à long-terme, alors nous n’aurons pas d’autre choix que d’apporter de l’eau venue d’ailleurs », a-t-il dit.
Markel a souligné que, en plus de son importance écologique inestimable, le lac de Tibériade était aussi important pour la sécurité d’Israël.
« Tout défaut d’une usine de désalinisation peut entraîner un évènement dramatique avec l’approvisionnement de villes en eau non potable, et le lac de Tibériade est la seule source naturelle d’eau d’où, en appuyant sur un bouton, vous pouvez avoir de l’eau dans la plupart d’Israël », a-t-il dit.
« Le résumé de la situation, c’est que nous avons moins de pluie, il y a eu un changement spectaculaire des pluies, a dit Markel. Nous faisons face à un changement climatique et des niveaux de sécheresse que nous n’avons jamais connus. »