Le nouveau train du parc d’attractions de Gaza simule le « retour » à Jérusalem
Le "Train du retour à Jérusalem" conduit les visiteurs à travers une vallée jusqu'à une maquette de la Vieille Ville, qui comprend un petit bâtiment représentant le Dôme du Rocher
Un parc de jeux situé dans le sud de la bande de Gaza a récemment ouvert une nouvelle attraction. Il s’agit d’un petit train simulant un voyage depuis l’enclave côtière vers la Vieille Ville de Jérusalem, qui abrite un certain nombre de lieux saints musulmans.
L’attraction, qui s’étend sur 550 mètres et propose deux pistes surélevées, est la dernière attraction en date du parc Asdaa Ville à Khan Younès. Elle a été construite sur la terre qui appartenait auparavant à l’implantation Ganei Tel, qui a été évacuée quand Israël a décidé de se retirer de Gaza en 2005.
Il aura fallu plus de deux ans pour construire l’attraction appelée « Le train du retour à Jérusalem », selon Wael al-Khalili, le président du comité de direction d’Asdaa.
« C’était le rêve de chaque Palestinien à Gaza, il est maintenant devenu réalité avec les efforts de l’intelligence palestinienne qui a bâti ce projet », a-t-il commenté dans un message publié sur la page Facebook du parc au début du mois de janvier.
Alors qu’Israël contrôle Jérusalem et la considère comme faisant partie de son territoire souverain, les Palestiniens la revendiquent comme leur « capitale » et comme un centre clef de la « culture palestinienne ».
Avant de monter à bord du train, les visiteurs peuvent voir un grand panneau avec le chiffre 99, représentant la distance en kilomètres d’Asdaa à Jérusalem.
La voie ferrée, inaugurée le 2 janvier, conduit les visiteurs à travers une vallée vers une maquette partielle de la Vieille Ville de Jérusalem, dont un petit bâtiment représentant le Dôme du Rocher.
Le mont du Temple à Jérusalem – le site accueillant les deux Temples juifs bibliques où ont été construits le Dôme du Rocher, puis la mosquée Al-Aqsa – a souvent été l’épicentre des tensions entre Israël et les Palestiniens, s’agissant du lieu le plus saint du judaïsme et du troisième lieu saint de l’islam.
Des vendeurs d’épices, de pain et de poteries vendent leurs produits aux visiteurs alors que d’autres passent à travers de larges portes symbolisant certaines des entrées principales menant à la Vieille Ville, comme on peut le voir dans une vidéo réalisée par Osama al-Kahlout, un journaliste basé à Gaza, et diffusée le 10 janvier.
Mousa al-Riati, un résident de Rafah, souriait en expliquant pourquoi lui et sa famille avaient décidé de prendre ce train.
« Nous voulions prendre ce train aujourd’hui parce que c’est nouveau et que c’est une première dans la bande de Gaza », a-t-il expliqué au journaliste, ajoutant : « Nous voulions faire comme si nous allions à Jérusalem parce que les citoyens ne peuvent pas aller dans la vraie Jérusalem ».
Israël impose des restrictions de mouvement sur les personnes et les biens pour entrer et sortir de Gaza. Les responsables israéliens affirment que les restrictions sont en place afin d’empêcher le Hamas, qui contrôle Gaza depuis 2007, et d’autres groupes terroristes d’importer des armes dans le territoire.
Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux début janvier, un des conducteurs de la ligne de train est vu en train de faire une annonce : « Nous vous souhaitons un agréable voyage. Inévitablement, nous reviendrons ».
Selon l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés palestiniens au Proche-Orient (UNRWA), 1,4 million de réfugiés palestiniens vivent à Gaza. L’UNRWA inclut les descendants des réfugiés dans son décompte.
Des officiels israéliens affirment que le retour de ces réfugiés et de leurs descendants sur des terres qui font maintenant partie d’Israël détruirait le caractère juif du pays.
Certains utilisateurs palestiniens des réseaux sociaux ont critiqué le projet de train.
« C’est en réalité un projet pour faire de l’argent. Rien de plus. Des gens viennent, paient leurs billets et font leur tour », a déclaré Khalid Walid, un Palestinien de Gaza, dans une vidéo publiée sur YouTube.
D’après ce dernier et la chaîne publique Kan, le prix du billet pour l’attraction s’élève à 5 shekels (1,29 euros).
En plus de Jérusalem, Asdaa propose également plusieurs autres maquettes dont le Tombeau des Patriarches de Hébron, que les Juifs révèrent comme le site de sépulture des patriarches et matriarches bibliques. Alors que les Juifs appellent le site le Tombeau des Patriarches, les musulmans qui le revendiquent aussi l’appellent la mosquée Ibrahimi.
On peut également visiter un complexe hôtelier avec piscine appelé Tiberias Resort – une référence à la ville de Tibériade au bord de la mer de Galilée dans le nord d’Israël.
Khalili décrit Asdaa comme un parc d’attractions qui associe tourisme et nationalisme palestinien.
« Son objectif est de promouvoir le tourisme et la détente ainsi que d’inculquer des concepts et des valeurs nationales par le biais de représentations de l’histoire et de la mémoire palestiniennes sur ses terres », a-t-il expliqué au journaliste Osama al-Kahlout.
Asdaa a vu le jour après la prise de contrôle de Gaza par le Hamas.
Khalili a refusé de répondre aux questions du Times of Israël, indiquant qu’il ne parle pas aux médias israéliens.
Dans ses commentaires au journaliste gazaoui, Khalili a affirmé qu’Asdaa avait dû surmonter des obstacles liés aux restrictions de mouvement des biens imposées par Israël afin de construire le projet de train. Le parc d’attraction a ainsi eu recours à des « alternatives » pour cela.
Il n’a pas précisé ce qu’il entendait par « alternatives ».
Le Coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires, l’organe du ministère de la Défense chargé de la liaison avec les Palestiniens (COGAT), a fait savoir qu’il ne pouvait pas commenter le projet de train à moins que le Times of Israël ne puisse lui fournir des preuves qu’Asdaa avait fait la demande d’importer des matériaux depuis l’État juif.
Peu après la prise de pouvoir du Hamas à Gaza, Israël a limité l’entrée dans l’enclave côtière des produits qu’il considère comme à « double emploi », qui, selon lui, peuvent être utilisés à la fois à des fins civiles et militaires. Pour pouvoir importer ces produits, les Palestiniens de Gaza doivent obtenir des autorisations spéciales.