Israël en guerre - Jour 432

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Opinion

Le Royaume-Uni laissera-t-il May se saisir de la question du terrorisme islamiste ?

La Première ministre britannique reconnaît pleinement la nature du combat. Un niveau de reconnaissance inversement proportionnel à celui de son adversaire, Jeremy Corbyn, lors des élections de jeudi

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

La Première ministre britannique Theresa May devant le 10 Downing Street, à Londres, le 18 avril 2017. (Crédit : Daniel Leal-Olivas/AFP)
La Première ministre britannique Theresa May devant le 10 Downing Street, à Londres, le 18 avril 2017. (Crédit : Daniel Leal-Olivas/AFP)

Alors que le Royaume-Uni a été frappé par trois attentats terroristes en trois mois et que les services de sécurité ont déjoué cinq projets d’attaques supplémentaires au cours de la même période, la Première ministre Theresa May a établi dans la matinée de lundi les spécificités de sa stratégie visant à « nous battre et à vaincre nos ennemis ».

La déclaration de May, succincte et déterminée, prononcée quelques heures après que les terroristes ont tué au moins sept personnes dans une série de meurtres commis dans le centre de Londres, soulève deux interrogations : Son gouvernement aura-t-il la volonté de riposter de la manière dont elle l’a spécifiée et lui donnera-t-on l’opportunité de le faire lors des élections générales qui auront lieu jeudi ?

En l’observant depuis Israël – pays contraint depuis longtemps à affronter le culte de la mort islamiste –
May a donné toutes les indications montrant qu’elle a parfaitement intégré ce contre quoi elle, le Royaume-Uni et le monde entier veulent lutter.

Ce qui « lie ensemble » cette série d’attentats terroristes au Royaume-Uni, a-t-elle indiqué, est « la seule idéologie diabolique de l’extrémisme islamiste ».

Le terrorisme alimente dorénavant le terrorisme sur le mode de l’imitation. La situation est devenue intolérable. Assez, c’est assez. « Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas prétendre que les choses peuvent continuer telles qu’elles sont ».

Elle a ajouté de façon saisissante : « Il y a, pour être sincère, trop de tolérance envers l’extrémisme dans notre pays et nous devons donc déployer beaucoup plus d’énergie pour l’identifier et l’éradiquer à travers tout le secteur public et à travers la société. »

Pour cette riposte, May a réclamé une révision complète de la stratégie anti-terroriste du Royaume-Uni. Elle a également demandé que les groupes terroristes soient frappés sur le terrain au Moyen-Orient. Et elle a fait part de sa volonté de les affronter, eux et leurs idéologues, sur Internet – pour « détourner les esprits de la violence ».

Des agents de police et des véhicules d'urgence dans la rue située aux abords de Borough Market, le 4 juin 2017, lors de la matinée qui a suivi une attaque terroriste sur le pont de Londres et le quartier de Borough à Londres (CHRIS J RATCLIFFE/AFP PHOTO)
Des agents de police et des véhicules d’urgence dans la rue située aux abords de Borough Market, le 4 juin 2017, lors de la matinée qui a suivi une attaque terroriste sur le pont de Londres et le quartier de Borough à Londres (CHRIS J RATCLIFFE/AFP PHOTO)

Le Royaume-Uni a-t-il été suffisamment choqué et ensanglanté pour épouser cette stratégie globale établie par May ? Une stratégie de lutte contre le terrorisme plus efficace implique des ressources bien plus grandes ; des mesures de sécurité équivalentes à celles qui nous sont familières en Israël, de la collecte et du contrôle de renseignement à une échelle entièrement différente. Les présages ne sont guère encourageants pour le moment. Les attentats commis le 7 juillet 2005 dans le centre de Londres – une série coordonnée menée par des terroristes ayant grandi au Royaume-Uni au cours de laquelle plus de 50 personnes avaient trouvé la mort – n’avaient pas, bien évidemment, entraîné un réexamen tel que May le réclame aujourd’hui.

Un grand nombre de personnes dans le pays avaient préféré croire qu’elles avaient été visées en raison de l’alliance passée alors entre le Premier ministre Tony Blair et le président américain George W. Bush (tout comme May a été raillée dans certains quartiers britanniques en raison de sa défense perçue de Donald Trump), et Blair avait été de plus en plus critiqué, même tourné en ridicule, pour ses appels sans relâche à défier l’extrémisme islamique.

S’agissant de l’intervention sur le terrain au Moyen-Orient, il faut toutefois rappeler que le Parlement britannique avait convenu, lors d’une session d’urgence en août 2013, de voter contre tout rôle dans l’action militaire proposée par Barack Obama contre le président syrien Bashar Assad, qui venait juste de franchir la ligne rouge en gazant sa population.

L’insistance mise par les parlementaires britanniques à se tenir à l’écart avait été un facteur central de la décision prise par le président américain de ne pas mener l’action punitive qu’il avait promise contre Assad — un spectacle de faiblesse occidentale qui avait été fêté par les terroristes et les états qui les parrainent, enhardis par ce recul, à travers toute la région.

Concernant la bataille contre ceux qui font se propager l’idéologie du terrorisme – même si la stratégie déclarée de May doit être mise en oeuvre – elle paraît inappropriée. Arrêter la dissémination de la haine sur Internet est absolument central pour empêcher la création d’une nouvelle vague de meurtriers islamistes, mais l’idéologie de la terreur doit également être confrontée dans le système éducatif, parmi les leaders spirituels et au niveau politique – et pas seulement au sein du Royaume-Uni mais dans le monde entier.

Et c’est là qu’une véritable coopération mondiale, avec toutes les nations partenaires utilisant chaque once de leur influence en termes diplomatique, économique ou autre qu’il leur sera possible d’utiliser, est nécessaire pour marginaliser l’extrémisme et encourager la modération.

Toutefois, May reconnaît pleinement la nature du combat. Un niveau de reconnaissance inversement proportionnel à celui de son adversaire lors des élections de jeudi, Jeremy Corbyn.

Corbyn est célèbre pour s’être référé à ses « amis » du Hamas et au Hezbollah — des organisations terroristes qui tuent des civils en toute impunité et qui mettent en danger avec cynisme leur propre population civile.

Le chef du parti d'opposition du Labour Jeremy Corbyn lors d'un discours pour les élections législatives à Londres, le 29 avril 2017 (Crédit : Niklas HALLE’N/AFP Photo)
Le chef du parti d’opposition du Labour Jeremy Corbyn lors d’un discours pour les élections législatives à Londres, le 29 avril 2017 (Crédit : Niklas HALLE’N/AFP Photo)

Le directeur des Communications de son parti, Seamus Milne, avait affirmé en 2014 alors que le Hamas – qui s’est saisi de Gaza après le retrait d’Israël de la bande – lançait des milliers de roquettes en Israël, que « ce n’est pas du terrorisme que de se défendre… Le terrorisme est le meurtre des citoyens par Israël à l’échelle industrielle ».

Immédiatement après le 11 septembre, Milne avait déclaré que les « Américains ne comprennent tout simplement pas… Peut-être est-ce exagéré d’espérer que, alors que les secours combattent pour tirer les pompiers des décombres, une petite minorité de gens feront la connexion entre ce dont ils ont été victimes et ce dont ont été victimes de larges parties du monde de la part de leurs gouvernements ».

Le manifeste publié par le parti en vue des élections qui auront lieu cette semaine réclament un terme au blocus de Gaza – considéré par Israël comme crucial pour empêcher le Hamas d’importer des armements pour nourrir son objectif déclaré de détruire l’état juif. Le programme du parti travailliste promet également – sans exiger de négociations pour garantir la capacité à survivre d’Israël – qu’un « gouvernement du Labour reconnaîtra immédiatement l’état de Palestine ».

Il n’y a pas moyen de savoir comment les attentats terroristes survenus samedi soir à Londres impacteront les élections de jeudi. Les sondages d’opinion sont tournés en dérision au Royaume-Uni comme ils le sont aux Etats-Unis et en Israël de nos jours. Ils avaient méjugé des résultats des élections législatives en 2015 et prédit à tort que les Britanniques voteraient en faveur d’un maintien dans l’Union européenne, l’année dernière.

May était considérée comme imbattable lorsqu’elle a réclamé la tenue des élections anticipées au mois d’avril et depuis lors, les enquêtes montrent que Corbyn rattrape son retard. Elle a fait une mauvaise campagne – elle a paru lâche (en refusant de débattre avec Corbyn), opportune d’une manière confinant au cynisme (en adaptant sa position sur le Brexit) et raide lors de ses apparitions publiques – tandis que Corbyn a su transmettre sa conviction traditionnelle et une nouvelle amabilité.

Les Britanniques blâmeront-ils May, l’ancienne secrétaire d’état à l’Intérieur, pour avoir échoué à prévenir la vague de terrorisme, ou concluront-ils que Corbyn se montrera moins enclin à tenter de le contrer de manière efficace ? Considéreront-ils que le genre de riposte stratégique dévoilée par May est une nécessité minimale ou préféreront-ils penser que la réponse ne pourra être apportée que par une plus grande tolérance et ouverture, celle de Corbyn ? Les Britanniques sont un peuple merveilleusement stoïque. On peut simplement espérer que leur extraordinaire résilience ne les aveuglera pas sur la cause à l’origine du terrorisme qui anéantit actuellement le pays – et l’impératif d’y riposter.

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