Les médicaments peuvent revenir dans votre assiette – ne les jetez pas
Après avoir retrouvé des traces de produits pharmaceutiques en mer, des chercheurs exhortent le public à confier les médicaments inutilisés aux cliniques et pharmacies
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.

Ayant découvert des résidus de trois médicaments répandus dans des créatures marines, à la fois en mer Méditerranée et en mer Rouge, des chercheurs de l’Université de Tel Aviv appellent le public à se débarrasser des médicaments usagés dans des conteneurs spéciaux se trouvant dans les pharmacies et les centres médicaux, et à ne pas les jeter dans les toilettes ou à la poubelle.
Cet avertissement arrive après avoir trouvé d’importantes concentrations de médicaments dans 10 des 11 échantillons prélevés le long de la côte israélienne. Les médicaments en question sont le Bezafibrate, qui aide à diminuer le cholestérol LDL et les triglycérides, et à augmenter le HDL ; la carbamazépine, utilisée pour le traitement de l’épilepsie et qui fait partie des traitements de la schizophrénie et des troubles bipolaires; et le diclofénac, un anti-inflammatoire courant, vendu sous des marques telles que Voltaren.
Parce que ces produits pharmaceutiques ne sont pas entièrement métabolisés par l’organisme, de grandes quantités d’ingrédients actifs sont excrétées. Les installations de traitement des eaux usées ne sont pas en mesure de les désactiver correctement et leurs concentrations, après traitement des eaux usées, ne sont pas surveillées. Après un passage par le traitement des eaux usées, ces ingrédients toujours actifs finissent dans la mer.
Le problème est exacerbé par les personnes qui jettent des médicaments non utilisés dans les toilettes ou à la poubelle.
« Beaucoup de ces composants sont très stables », a déclaré le professeur Noa Shenkar du Centre de Zoologie de l’université et du musée d’Histoire Naturelle de Steinhardt, qui a dirigé la recherche à l’aide de Gal Navon, étudianet en Master. La recherche a été publiée ce mois-ci dans la revue Marine Pollution Bulletin.
Ils mettent beaucoup de temps à se décomposer dans l’environnement marin et les dégâts qu’ils causent à la vie marine pourraient être énormes, car ces produits pharmaceutiques sont conçus pour affecter la biologie du corps humain.
Les médicaments que nous utilisons finissent dans la mer, généralement en passant par les eaux usées, et causent de graves dommages dans le milieu marin, affectant indirectement les êtres humains qui se nourrissent des produits de la mer provenant de ce milieu marin endommagé.
« Il existe différentes manières d’aborder ce problème. Sur le plan individuel, nous recommandons que la population, dans son ensemble, assume une responsabilité individuelle, en se débarrassant des produits pharmaceutiques inutilisés dans des conteneurs désignés à cet effet – que l’on peut trouver en pharmacies et dans des organismes de soins de santé ».
L’équipe de recherche, qui comprenait également le Laboratoire d’Hydrochimie du Centre de Recherche de l’Eau du centre Porter de l’université, dirigé par le professeur Dror Avisar, examinera l’impact des médicaments sur les organismes testés et élargira la liste des médicaments à étudier.
Les résidus de médicaments dans les écosystèmes marins – antibiotiques, anti-inflammatoires, analgésiques et antidépresseurs, etc. – sont un problème d’ordre mondial. Des études menées dans le monde entier montrent que les œstrogènes, présents dans les pilules contraceptives, dégradent la fertilité de certaines espèces de poissons mâles, car l’hormone encourage le développement de caractéristiques femelles. Le Prozac augmente l’agressivité et la prise de risque chez les crustacés (mollusques et crustacés). Et les antidépresseurs altèrent la mémoire et l’apprentissage de la seiche.

Les chercheurs israéliens recherchaient des traces de l’existence de trois médicaments chez les ascidies – des espèces invertébrés filtreurs, de quelques centimètres de long qui s’attachent à des surfaces dures telles que des rochers, pontons ou des brise-lames, où elles se nourrissent de petites particules. Sur les onze sites testés, neuf se trouvaient le long de la côte méditerranéenne (Achziv, Acre, la Marina de Haïfa, Sdot Yam, la centrale électrique d’Hadera, la plage Accadia à Herzliya, la plage HaSela à Bat-Yam, la Marina d’Ashdod et celle d’Ashkelon) et deux se trouvaient dans la mer Rouge (la Marina d’Eilat et le Dolphin Reef).
Noa Shenkar et Gal Navon ont détecté les trois substances dans des ascidies sur quatre sites – Ashdod, Ashkelon, Sdot Yam et Haïfa. Deux des composants étaient présents sur cinq sites – Achziv, Acre, Herzliya, Bat-Yam et la Marina d’Eilat. Le diclofénac et le bezafibrate ont été trouvés en « concentrations particulièrement élevées » à Akko, Ashdod et Ashkelon et une « concentration préoccupante » de diflofénac a été identifiée au Dolphin Reef d’Eilat.
Les seules ascidies retrouvées sans trace d’aucun de ces ingrédients se trouvaient près de la centrale électrique de Hadera, où elles avaient été récupérées en eau profonde.