Les témoignages des survivants du massacre du Hamas compilés sur un site internet
Avec le soutien de la Fondation de la Shoah, October7.org présente les récits des témoins des atrocités du Hamas - des récits traduits en quatre langues, et ce n'est pas fini
Deux jours seulement après le massacre du 7 octobre, alors que les premiers témoignages atroces des survivants arrivaient jusqu’au grand public, Raz Elipsur et Adi Clinton, un frère et une sœur, avaient réalisé que le monde tout entier devait connaître leur histoire.
Ce sont les événements traumatisants vécus ce jour-là qui les ont convaincus de créer le site October7.org, répertoire en ligne des témoignages glanés sur les réseaux sociaux, des publications qui ont été d’abord traduites en anglais. Ils ont rapidement été rejoints dans leur initiative par des bénévoles qui ont aidé à traduire, à relire les témoignages, à mettre en place le site et à définir son design – en vérifiant bien au préalable que les survivants étaient d’accord pour que leurs histoires soient partagées avec le plus grand nombre.
« Nous pensons que le monde doit savoir ce qui est arrivé lors de cette funeste journée et nous pensons qu’October7.org a une grande valeur en matière de consignation des faits qui se sont déroulés ce jour-là, en présentant les histoires qui ont été rapportées par les témoins directs du massacre », ont indiqué les administrateurs du site dans un communiqué de presse.
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Environ 3 000 terroristes avaient franchi la frontière, le 7 octobre, massacrant 1400 personnes – en majorité des civils et un grand nombre de familles toutes entières – au fur et à mesure où ils prenaient le contrôle des communautés du sud d’Israël. Des hommes armés circulant en moto avaient tué 260 jeunes qui assistaient à une rave-party, le festival de musique électronique Supernova qui avait été organisé aux abords du kibboutz Reim.
Les terroristes avaient aussi enlevé, ce jour-là, plus de 240 personnes qui sont actuellement retenues en otage dans la bande de Gaza, avec parmi elles 30 enfants.
Elipsur et Clinton ont décliné une demande d’entretien soumise par le Times of Israel, expliquant ne pas souhaiter que leur histoire détourne l’attention du public des victimes du massacre.
Les témoignages sont bouleversants et ils glacent le sang – comme c’est le cas de celui de Naama G.: « Je saignais et j’ai fait semblant d’être morte sous des sacs à ordures pendant 30 minutes mais je savais déjà qu’il faudrait que j’utilise toute la force qu’il me restait pour ramper entre les cadavres ».
Ou celui d’Ido M. : « Ils avaient ce regard jubilatoire, heureux, alors qu’ils étaient en train de massacrer des innocents. »
Ou encore celui d’Omer B.D.: « Nous étions un groupe de douze à être partis à la fête mais nous n’avons été que neuf à en revenir ».
Le site présente, pour le moment, 120 témoignages – d’autres vont être ajoutés. Écrit initialement en hébreu, il propose des traductions anglaise, française, japonaise et espagnole.
Les récits seront bientôt proposés en allemand, en arabe, en russe, en italien et en portugais.
Les récits présentés sont ceux des résidents des communautés frontalières, des fêtards venus à la rave-party et de tous ceux qui ont été pris pour cible par les milliers de terroristes du Hamas qui ont franchi la clôture frontalière de Gaza, dans la matinée du 7 octobre. Tous ont été les témoins directs des atrocités.
Les victimes ont toutes donné à October7.org la permission de partager leurs histoires. Les noms de familles sont tus à des fins de confidentialité.
Le site October7.org cherche actuellement des partenariats – il en a déjà conclu avec avec l’USC Shoah Foundation, qui produit les témoignages audiovisuels des survivants de la Shoah, et avec Mapping the Massacres, une carte interactive présentée sur Internet des communautés frontalières attaquées et de toutes les victimes de l’assaut, qu’elles aient été assassinées ou kidnappées, avec leur lieu de résidence.
« Nous devons raconter ce que nous avons traversé », explique Miri Gad Mesika, survivante de l’attaque commise au kibboutz Beeri, « en particulier parce qu’il y a des gens qui, dans le monde, qui pensent que tout ça n’est jamais arrivé, qui pensent que peut-être, certaines choses ont été inventées ».
« J’ai moi-même l’impression d’avoir fait un terrible cauchemar à cause de l’horreur absolue, de la monstruosité de ce qui nous est arrivé, de ces choses que nous avons traversées », ajoute-t-elle. « C’est la raison pour laquelle il faut répéter encore et encore ces témoignages. Que ce soit par les mêmes personnes ou par d’autres. Il ne faut pas cesser de raconter ».
J’ai moi-même l’impression d’avoir fait un terrible cauchemar à cause de l’horreur absolue, de la monstruosité de ce qui nous est arrivé, de ces choses que nous avons traversées
La professeure Anna Shternshis, directrice du centre d’études juives Anne Tanenbaum et professeure en études yiddish à l’université de Toronto, compare les récits présentés sur le site October7.org aux témoignages des victimes de la Shoah pendant la guerre – comme ceux qui avaient été rassemblés dans « Le Livre noir », une compilation faite par Ilye Eherburgh et Vassily Grossman en 1944. Elle note qu’il y a d’ailleurs des thématiques communes.
« Quelque chose que j’ai pu remarquer, c’est la raillerie et la moquerie qui s’expriment à l’égard des victimes au moment où elles vont être assassinées », dit Shternshis. « Et le plaisir qui est pris par les tueurs, comme s’ils savouraient ces violences. Ils disent, par exemple : « Est-ce que je vais te laisser vivre encore deux minutes ou est-ce que je vais te tuer tout de suite ? »
Autre thématique, ce que Shternshis qualifie de « décompte angoissant ».
« Les témoignages ont tendance à compter le nombre d’être chers qui ont été tués », dit-elle. « Nous avons été dix à partir à la rave mais seulement deux sont revenus’. »
…Et le plaisir qui est pris par les tueurs, comme s’ils savouraient ces violences
Shternshis explique que cette quantification est une tentative qui vise à dépasser les limites du langage.
« Dire : ‘c’était effrayant’ ou ‘c’était le chaos’ ne capture pas l’expérience telle qu’elle est, ne transmet pas le bon message à celui qui n’était pas là », explique-t-elle.
Cette compilation de témoignages n’est pas un phénomène uniquement juif, ajoute-t-elle, évoquant les efforts livrés par les Ukrainiens pour consigner les atrocités qui ont été commises par les Russes.
October7.org affirme ne pas avoir d’agenda politique et ne proposer « qu’un travail simple de sensibilisation avec le partage de récits de témoins directs ». Le site a d’ailleurs été créé avant que l’opinion publique internationale ne commence à se retourner contre Israël, font remarquer ses créateurs.
Mais Yaniv Hegyi, au kibboutz Beeri, qui est le chef des dirigeants communautaires du mouvement des Kibboutz, déclare que le 7 octobre a été une rupture radicale avec les vieilles conceptions politiques.
« Après ce qui est arrivé, j’ai compris, une bonne fois pour toutes, que c’est eux ou nous », explique Hegyi, qui se dit de gauche.
Hegyi dit avoir été impliqué, au fil des années, dans de nombreuses initiatives visant à renforcer le dialogue et les liens avec les résidents de Gaza, qui vivent à seulement quelques minutes en voiture de son habitation.
« J’ai toujours rêvé et espéré le changement. J’ai toujours travaillé pour. J’avais essayé de mettre en place un projet de pigeons voyageurs qui auraient relié les fermes pédagogiques des deux camps, pour les enfants », raconte-t-il. « L’armée avait accepté d’apporter son aide logistique pour les pigeons qui iraient dans les deux sens, mais le Hamas ne voulait pas de normalisation ».
Hegyi est impliqué dans un projet similaire à celui d’October7.org, avec les messages textos envoyés par les victimes qui pourront consigner les heures d’horreur passées par les résidents quand les terroristes étaient allés d’une maison à une autre, tuant, violant, pillant et kidnappant.
Un grand nombre de ces messages ont été écrits par des personnes qui ont été assassinées ou enlevées.
Si presque un dixième de la population de Beeri, qui était de 1 100 personnes – un pourcentage qui comprend des bébés, des femmes ou des personnes âgées – a été assassiné ou kidnappé, Hegyi déclare ne pas avoir de désir de vengeance.
« Je veux juste qu’ils ne reviennent jamais parce que leur objectif est de nous détruire. Ils enseignent la haine à leurs enfants dès le premier âge », déplore-t-il.
« Les témoignages sont un moyen de faire connaître la vérité au monde ».
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