Les travailleurs agricoles thaïlandais en Israël, victimes du Hamas
Au kibboutz Alumim, près de la frontière de Gaza, 9 travailleurs thaïlandais ont été massacrés, un a été grièvement blessé et 4 ont été kidnappés par des terroristes du Hamas

Depuis des années, les travailleurs étrangers originaires de Thaïlande font partie du paysage des exploitations agricoles israéliennes. C’est la « main d’œuvre » sur le terrain, comme l’a décrit mercredi Gad Shparer, qui supervise les vergers du kibboutz Alumim, près de la frontière avec Gaza.
La plupart d’entre eux viennent des zones rurales du nord-est de la Thaïlande pour gagner de l’argent qu’ils envoient ensuite à leurs familles restées au pays et avec lequel ces dernières se construisent leurs maisons, remboursent des emprunts ou scolarisent leurs enfants.
Quelque 30 000 ouvriers agricoles thaïlandais étaient employés en Israël jusqu’à ce que la guerre avec le Hamas éclate. Environ 5 000 d’entre eux travaillaient dans des communautés proches de la bande de Gaza, où sont cultivés 75 % des légumes du pays.
La plupart ont été évacués depuis le 7 octobre, date à laquelle 2 500 terroristes ont fait irruption en Israël depuis la bande de Gaza par voie terrestre, maritime et aérienne, massacrant plus de 1 400 personnes – pour la plupart des civils – dans les communautés proches de la frontière et prenant au moins 203 otages, sous le couvert de milliers de roquettes tirées sur les villes israéliennes.
Aujourd’hui, alors que les affrontements se poursuivent entre les troupes israéliennes et le groupe terroriste du Hezbollah le long de la frontière libanaise, les travailleurs agricoles thaïlandais ont été évacués en même temps que les Israéliens de 28 villes du nord du pays, sur instruction du front intérieur.
« Je n’ai pas le chiffre exact. J’estime qu’environ 12 000 d’entre eux vont partir. C’est un désastre pour l’agriculture israélienne », a déclaré Orit Astrachan, copropriétaire d’Oz Manpower, une agence de placement de travailleurs étrangers dans le secteur agricole, située à Rehovot, dans le centre du pays. « Bientôt, nous ne produirons plus assez pour nous nourrir. »
Le kibboutz Alumim, situé à moins de 4 kilomètres de la frontière de Gaza, employait 41 travailleurs étrangers, dont 24 Thaïlandais et 17 Népalais, étudiants en agriculture.
Le jour de l’assaut, le 7 octobre, neuf Thaïlandais ont été massacrés, un a été blessé et quatre ont été enlevés par des hommes armés du Hamas. Parmi les étudiants népalais, dix ont été abattus, quatre ont été blessés et un a été enlevé.
Tous les Thaïlandais d’Alumim travaillaient dans les poulaillers, les étables, les champs de légumes, les orangeraies et le centre d’emballage.
On déplore 21 Thaïs tués, 14 blessés et 11 kidnappés dans l’ensemble des communautés frontalières de Gaza.
Les Thaïlandais qui ont survécu à la tuerie d’Alumim sont rentrés chez eux lundi, dans des vols organisés par l’ambassade de Thaïlande, traumatisés par ce qu’ils ont vécu ce jour-là alors qu’ils se cachaient dans les champs de poivrons, en haut des arbres ou, dans un des cas, sur le toit d’un réfrigérateur contenant des médicaments pour les vaches.

Avant de partir, ils ont partagé leurs expériences avec Leila Djemal, 58 ans, psychologue organisationnelle et consultante de Tel Aviv, qui a grandi en Thaïlande, parle couramment le thaï et sert depuis mercredi d’interprète entre les travailleurs thaïlandais et les personnes parlant l’hébreu.
Les parents de Djemal ont fui la Syrie en 1947 et se sont retrouvés à Bangkok, où elle et ses trois frères et sœurs ont passé leur enfance. Ils ont ensuite été envoyés au Royaume-Uni pour y faire leurs études secondaires.

Djemal s’est rendu à deux reprises à l’hôtel Leonardo Plaza, sur la côte de Netanya, où séjournent les personnes évacuées du kibboutz Alumim. Lors de l’une de ces visites, son frère Joe, médecin, est venu lui aussi. Il a commandé des plats thaïlandais pour le groupe.
Les hommes étaient préoccupés par le sort de leur camarade, Himanchal Kattel, 25 ans, qui se trouvait à l’hôpital Soroka de Beer Sheva après avoir subi une intervention chirurgicale pour des blessures par balle, a déclaré Djemal.
Le kibboutz a organisé une camionnette pour leur permettre de lui rendre visite.

Contrairement à d’autres communautés qui ont été détruites lors de l’assaut du Hamas, Alumim est resté intact.
Mais le quartier des travailleurs étrangers, qui a été envahi en premier par les terroristes, a été brûlé et détruit.
« Ils faisaient partie intégrante du kibboutz, ces travailleurs », a déclaré Gad Shparer.

Les quartiers et les cuisines des Thaïlandais et des Népalais étaient adjacents aux étables, lesquelles étaient situées le plus près de la frontière de Gaza par rapport au reste du kibboutz.
Djemal raconte : « J’ai parlé aux deux ouvriers qui ont été les premiers à voir entrer les terroristes du Hamas. Les terroristes ont tiré sur la porte d’entrée, puis sur les portes des quartiers d’habitation ».
« L’un des hommes a réussi à esquiver les balles venant de la fenêtre et à se réfugier dans une petite pièce où se trouvait un réfrigérateur pour les médicaments des vaches. Ils ont commencé à tirer dans cette petite pièce. Il a grimpé sur le réfrigérateur, où il est resté jusqu’à 5 heures du matin le lendemain, avant de pouvoir se réfugier dans l’école du kibboutz, qui avait été sécurisée ».
« Il a entendu les terroristes tirer et tirer, tout en criant « Allahu Akbar » (Dieu est grand) », continue Djemal.
« Les terroristes sont entrés dans la cuisine des travailleurs népalais et ont tiré sur tout le monde, avant de se mettre à saccager la cuisine ».
ตอนนี้หัวหน้า คิวบูธ อลูมิม ได้ นำศพ แรงงานไทย ออกมาได้แล้ว ขอแสดงความเสียใจด้วยครับ กับเพื่อนเพื่อนของผม 
Posted by Chakkrit Thitkrathok on Monday, October 9, 2023
« Un autre homme, » poursuit Djemal « Ekarin Supapak, 36 ans, qui travaillait au kibboutz depuis deux ans et demi, est entré dans la cuisine pour échapper à la fumée des tirs dans son logement et s’est allongé parmi les cadavres népalais et thaïlandais. Les responsables de la sécurité du kibboutz leur avaient dit d’aller dans la cuisine parce que c’était un espace sécurisé. »
« Ils avaient tous reçu une balle dans la tête », raconte Djemal. « Il gisait dans le sang et l’eau parce qu’il y avait eu une sorte d’inondation, peut-être dû à une canalisation éclatée. Lorsqu’ils ont vu des images de la cuisine sur Facebook, les hommes ont constaté que tous les sacs de riz non cuit avaient explosé et couvraient également le sol. »
« Ekarin est sorti de là lorsque la fumée est devenue trop dense et qu’il a entendu un ami crier à l’aide depuis une chambre à coucher. L’ami a dit qu’on lui avait tiré dessus. Ekarin lui a tenu la main pendant qu’il mourait. »
Djemal poursuit : « Un autre travailleur a sauté hors des quartiers d’habitation thaïlandais et a couru jusqu’aux étables, où il s’est enterré dans la bouse de vache de sorte que seuls ses yeux et son nez étaient visibles, et il s’est caché là pendant plusieurs heures, au milieu des tirs incessants venant de tous les côtés. »
Les dix Thaïlandais qui ont survécu ont finalement été évacués du kibboutz à 17 heures dimanche.
Le ministre des Affaires étrangères thaïlandais, Parnpree Bahiddha-Nukara, a déclaré à l’Associated Press que 5 990 Thaïlandais s’étaient inscrits pour être évacués et que les fonctionnaires travaillaient 24 heures sur 24 pour les accueillir.

Astrachan, d’Oz Manpower, responsable des travailleurs thaïlandais qui souhaitent rentrer chez eux, a indiqué qu’il y avait d’autres exploitations agricoles dans des régions sûres du pays, telles que l’Arava, à l’extrême sud, loin de Gaza. « Mais leurs mères veulent qu’ils rentrent chez eux, et je les comprends. »
Inbal Mashash, directrice de l’administration des travailleurs étrangers au sein de l’autorité chargée de la population et de l’immigration, accomplit un « travail extraordinaire » pour trouver des travailleurs de remplacement, a-t-elle poursuivi.
Mais pourra-t-elle aider un agriculteur d’un moshav du nord qui s’est retrouvé sans travailleurs en pleine saison de récolte des pommes ou encore cet autre agriculteur qui vient de dépenser 400 000 shekels pour l’achat de plants de tomates cerises ?
Un travailleur a demandé à partir, dit Astrachan, et explique : « Il suffit qu’un travailleur décide de partit pour provoquer une réaction en chaîne. »
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