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Libye : les puissants soutiens extérieurs des deux camps rivaux

D'un côté le Golfe, l'Egypte et de façon ambiguë la France, de l'autre l'Italie ou la Turquie

Des miliciens locaux appartenant à un groupe opposé à l'homme fort libyen Khalifa Haftar auprès de véhicules saisis aux forces de ces derniers sur une de leurs bases située à Zawiya, le 5 avril 2019. (Crédit : Mahmud TURKIA / AFP)
Des miliciens locaux appartenant à un groupe opposé à l'homme fort libyen Khalifa Haftar auprès de véhicules saisis aux forces de ces derniers sur une de leurs bases située à Zawiya, le 5 avril 2019. (Crédit : Mahmud TURKIA / AFP)

En Libye, les camps rivaux du maréchal Khalifa Haftar et du chef du gouvernement de Tripoli Fayez al-Sarraj bénéficient chacun de puissants appuis étrangers.

Haftar, favori du Golfe et de l’Egypte

Homme fort de la Cyrénaïque (est), le maréchal libyen Khalifa Haftar, dont les forces sont engagées dans une offensive pour prendre la capitale Tripoli, jouit du soutien de l’Egypte, des Emirats arabes unis, et plus récemment de l’Arabie saoudite, s’accordent les experts.

« Auparavant, l’Arabie soutenait discrètement le général Haftar tout en soutenant publiquement le gouvernement de Tripoli reconnu par la communauté internationale, mais fin mars, de manière significative, le roi Salman a invité le chef militaire libyen à Ryad », rappelle à l’AFP Neil Partrick, spécialiste des pays du Golfe.

Alliés de la première heure, « les Emirats et l’Egypte ont tous deux fourni des armes » à Haftar au nom de la lutte contre l’islam radical, ajoute-t-il.

« Le duo Arabie saoudite/Emirats est en train de procéder à une normalisation autoritaire dans le monde arabe, depuis le Yémen jusqu’à la Libye en passant par l’Egypte », commente Ali Bensaâd, professeur à l’Institut français de géopolitique (université Paris 8).

Le jeu ambigu de la France

Quant à la France, qui entretient des liens étroits avec Ryad, Abou Dhabi et Le Caire, elle se pose en médiateur entre les deux camps libyens, mais est accusée de favoriser sur le terrain le camp d’Haftar.

En juillet 2016, Paris avait dû annoncer la mort de trois de ses militaires dans un accident d’hélicoptère en Libye, où ils menaient une mission de renseignement auprès de forces de l’homme fort de l’est libyen.

« La position française est ambiguë : Paris a formellement signé cette semaine un communiqué commun avec Washington, Londres, Rome et Abou Dhabi (appelant les parties libyennes à la retenue, ndr), mais soutient de facto Haftar », affirme Arturo Varvelli, de l’Institut d’études politiques internationales (ISPI) de Milan.

Le gouvernement de Sarraj s’est implanté à Tripoli en 2016 avec le soutien de l’ONU et des pays occidentaux dont la France. Depuis, Paris a endossé un habit de médiateur politique et organisé deux rencontres entre les dirigeants libyens rivaux, en juillet 2017 puis en mai 2018.

Malgré tout, le maréchal Haftar semble conserver les faveurs de la France, dont le président Emmanuel Macron a fait de la lutte anti-terroriste une priorité de son quinquennat.

Ainsi, Paris a récemment salué les « progrès significatifs » accomplis par les forces de Khalifa Haftar dans le sud du pays contre les jihadistes et groupes criminels.

« La France ne joue plus le rôle de médiateur », déplore Ali Bensaâd. « Je m’inquiète de cette nouvelle posture de la France en Libye : son alliance stratégique avec les pays du Golfe la pousse à épouser leurs stratégies géopolitiques ».

Sarraj appuyé par l’Italie, la Turquie et le Qatar

Le gouvernement d’union nationale (GNA), dirigé depuis Tripoli par Fayez al-Sarraj et reconnu par la communauté internationale, bénéficie du soutien de l’Italie, ex-puissance coloniale jalouse de son influence et de ses intérêts économiques.

Le chef du gouvernement unitaire soutenu par l’ONU Fayez al-Sarraj, au centre, visite les commandants militaires et sécuritaires qui ont supervisé la re-capture du checkpoint 27 à Janzour, entre Tripoli et Zawiya, le 5 avril 2019 (Crédit : Mahmud TURKIA / AFP)

« Ce soutien a pour priorité l’assèchement des flux de migrants » en provenance des côtes libyennes, explique Arturo Varvelli.

En outre, « historiquement, les Italiens ont toujours entretenu de très bons rapports avec Tripoli et sa région », renchérit Ali Bensaâd, en pointant « les intérêts pétroliers » de Rome en Libye, pays riche en hydrocarbures où les géants pétroliers italien Eni et français Total bataillent pour des gisements près de Syrte et dans l’ouest du pays.

Du côté des puissances régionales, « Sarraj a le soutien de la Turquie et du Qatar, mais un Qatar affaibli actuellement par son isolement » diplomatique vis-à-vis de ses voisins du Golfe, notamment l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, commente cet universitaire.

« Le conflit en Libye a viré à une guerre par procuration entre ces pays du Golfe et le Qatar, qui soutient le gouvernement de Tripoli dominé par les islamistes », estime James Dorsey, chercheur à la S. Rajaratnam School of International Studies de Singapour

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