Masques et gestes barrières, le nouveau quotidien des séries israéliennes
La troisième saison des "Shtisel", "La fille du policier" et d'autres programmes tentent d'inventer une nouvelle réalité de tournage face aux complications induites par le COVID-19

Les acteurs des « Shtisel », une série primée produite par YES Studio TV et qui raconte l’histoire d’une famille ultra-orthodoxe de Jérusalem, ont enfin pu commencer à tourner une troisième saison, très attendue par les téléspectateurs, à partir du début du mois de juillet.
Michael Aloni (Akiva), Dovale Glickman (Shulem), Shira Haas (Ruchami) et Zohar Strauss (Lippe) se sont tous retrouvés sur le plateau, chapeaux noirs et sheitels bien en place. Mais pour les acteurs, tout du moins, aucun masque en vue devant la caméra.
Toute l’équipe était retournée au travail début mai, cherchant des lieux pour le tournage et s’apprêtant pour la série. « Notre état d’esprit, c’était que le coronavirus était dorénavant derrière nous », commente le réalisateur Alon Zingman. « Pour nous, c’était évident qu’il était parti ; on était dans l’ignorance de ce qui allait encore se passer. »
Au mois de juin, Israël devait connaître une recrudescence de la pandémie. Mais le tournage avait néanmoins repris : quoi qu’il arrive, The show must go on – le spectacle a donc continué.

Cela a toutefois impliqué toute une panoplie de nouvelles règles à respecter pour l’équipe des « Shtisel » : moins de personnes sur le plateau et un respect minutieux des directives gouvernementales portant sur le port du masque et la distanciation sociale. Et ça a été compliqué, note Zingman.
Une grande partie du tournage des « Shtisel » est réalisée dans de vieux appartements de Jérusalem, certains occupés par des personnes âgées qui, malgré des préparatifs particulièrement attentifs, ont redouté le moment où ils laisseraient entrer les techniciens et les acteurs en raison du risque représenté par le COVID-19, raconte Zingman.
« En ce moment, ils ont peur de laisser entrer des étrangers dans leurs habitations », ajoute-t-il.
Et c’est également difficile pour les acteurs. Tout dure plus longtemps, avec des déclarations de santé quotidiennes à signer. Il faut aussi s’assurer que les acteurs les plus âgés du casting se sentent bien, note le réalisateur.
Pour l’instant, Zingman prie « pour que rien ne nous arrive », s’exclame-t-il. « Et si, Dieu nous en préserve, un assistant-réalisateur doit tomber malade, alors on sera tous mis en quatorzaine : on est tous en danger. »

C’est très exactement ce qui est arrivé sur le plateau de « La fille du policier », une production de YES Kids, explique Roi Florentin, le réalisateur de cette série basée sur le roman policier best-seller « Endgame », écrit par Liad Shoham.
Lors des premières semaines de tournage, l’une des actrices principales a été placée en quatorzaine après avoir été brièvement en contact avec sa sœur, qui avait été contaminée. Un autre acteur, sur un plateau différent, avait rencontré une personne qui était par la suite tombée malade, obligeant Florentin à changer une fois encore le planning de la série.
L’acteur Lior Ashkenazi, qui joue le rôle d’un détective enquêtant sur un meurtre auquel a assisté la fille d’un policier, a aussi réalisé quelques épisodes – ses premiers tournages pour une série télévisée. Il est venu pour ses épisodes, explique Florentin et, par chance, il a échappé à une éventuelle quatorzaine.
« Si quelqu’un est malade ou ne se sent pas bien, je lui dis de ne pas venir », continue Florentin. « Le plus important, c’est que les gens puissent rester en bonne santé de manière à ce qu’on puisse terminer le tournage au mois de septembre. »
Le réalisateur des « Shtisel », Zingman, ne veut pas tourner pendant les journées chaudes de l’été israélien, lorsque les acteurs étouffent sous la chaleur de leurs costumes épais ou de leurs robes. Il espère dorénavant avoir terminé le tournage d’ici le mois de septembre.
L’équipe des « Shtisel » était occupée à chercher des lieux pour le tournage lorsque le virus a fait son apparition. Tout s’est arrêté pendant les deux mois de confinement et de fermeture de l’économie.

Trouver des lieux pour les tournages représentent souvent le plus grand défi à relever pour les équipes face à cette crise sanitaire, commente Florentin.
Quand ce dernier a commencé à tourner « La fille du policier » au mois de juin, l’un des lieux choisis pour tourner la série était Bnei Brak, une localité ultra-orthodoxe située aux abords de Tel Aviv qui a représenté un épicentre du coronavirus au printemps, et qui a été soumise à un confinement placé sous l’autorité du Commandement intérieur de l’armée israélienne.
Quelques semaines plus tard, alors que l’équipe filmait une scène dans laquelle apparaissait un acteur vêtu de la traditionnelle tenue des ultra-orthodoxes, un voisin a commencé à interpeller l’équipe avec colère depuis son balcon.
« Il criait à l’acteur : ‘Vous êtes un mauvais exemple, vous voulez vraiment que tout le monde s’imagine qu’on est tous comme ça ?' », dit Florentin. « Il leur a véritablement hurlé dessus. »
L’équipe porte le masque en permanence, ajoute Florentin, et elle s’efforce de conserver la distance obligatoire de deux mètres préconisée entre deux individus. Mais cela est particulièrement difficile à respecter dans certains cadres et à certains postes – comme c’est le cas pour l’assistant-réalisateur, assis aux côtés de Florentin, qui l’informe des détails sur le plateau.

Florentin déclare avoir essayé de maintenir un nombre minimum de personnes sur le plateau, ajoutant qu’il s’efforcait de faire en sorte que les équipes chargées du maquillage et des costumes se tiennent à l’écart pendant la plus grande partie de la journée.
« Conserver ses distances, c’est quelque chose d’étrange », commente Florentin. « Se rapprocher les uns des autres est de l’ordre de l’instinct, et je dois me souvenir qu’il ne faut pas que je pose ma main sur le bras ou sur l’épaule de la personne dont je veux me faire comprendre. Sincèrement, c’est une période vraiment bizarre. »
Au mois de juin, Ananey Studios, firme de ViacomCBS, a filmé ses toutes nouvelles stars – les chefs pâtissiers Keren et Itzik Kadosh, propriétaires de l’emblématique boulangerie éponyme à Jérusalem – déambulant dans les rues de la Ville sainte, présentant les meilleures boulangeries de la capitale pour « Baking Jerusalem ».
« Quand les caméras ont été allumées, les masques ont disparu », a commenté Keren Kadosh dans un post publié sur Instagram au sujet de l’émission, dont les six épisodes permettront de découvrir les boulangeries-pâtisseries uniques de Jérusalem.
Heureusement, les restaurants et les cafés sont à nouveau ouverts – pour le moment.
Ananey produit actuellement huit émissions, notamment pour les enfants et les adolescents, explique sa directrice-générale Orly Atlas Katz. Parmi elles, le drame à suspense « Sky », la série « Craft Party » diffusée sur DIY (qui a été achetée par la BBC), « Rescue Team », une émission pour les tout-petits, la sitcom pour les adolescents « Alone at home » et plusieurs autres.
Le travail continue, dit Atlas Katz, mais la période n’en est pas moins éprouvante.
En studio, un inspecteur sanitaire est présent sur le plateau, qui s’assure que l’obligation du port du masque est respectée par tous. De multiples dispositifs ont été installés pour se laver les mains, des toilettes séparées pour les techniciens ont été mises en place, et les acteurs sont tenus en permanence à l’écart de l’équipe pour faire en sorte que les rassemblements regroupent le moins de personnes possible.
Les repas sont dorénavant servis à l’assiette et non en buffet. Seules quatre personnes peuvent s’asseoir à la même table, dans un ordre préétabli et permanent, dit-elle.
L’éventualité de scènes intimes n’a pas été un problème, confie Atlas Katz : les émissions actuellement en cours de tournage sont destinées aux enfants et aux ados, et ne présentent par conséquent pas de telles scènes.
The mesmerizing Shira Haas transforming into our beloved Ruchami Weiss #shtisel 3. #inproduction @yestv @diklabarkai @abot_hameiri
Posted by yes Studios on Tuesday, June 30, 2020
La question est la même pour « La fille du policier » et pour « Les Shtisel », deux séries qui évoluent autour de personnages ultra-orthodoxes qui ne se prêtent guère à des démonstrations publiques d’affection.
C’est au moins un détail dont n’auront pas à s’inquiéter les réalisateurs de cette série pendant ces tournages… particuliers.
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