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Nemmouche face à la douleur des proches et au film de la tuerie

La mère d'Alexandre Strens, décédé à 26 ans, deux semaines après l'attaque, des suites d'une balle dans la tête, doit être la première à s'exprimer pour les parties civiles

Hommage aux victimes de la fusillade de Bruxelles à l'entrée du Musée juif de la ville, en mai 2014. (Crédit : Georges Gobet/AFP)
Hommage aux victimes de la fusillade de Bruxelles à l'entrée du Musée juif de la ville, en mai 2014. (Crédit : Georges Gobet/AFP)

Mehdi Nemmouche l’écoute, l’observe parfois. Il ne réagit pas. Devant lui, une mère, qui évoque, face aux assises, le « demi-kilo de cervelle » perdu par son fils, l’une des quatre victimes qu’il est accusé d’avoir assassiné en 2014 au musée juif de Bruxelles.

« Je vis comme une maman à qui on a coupé ses ailes », explique d’une petite voix Annie Adam, micro à la main, une ancienne femme de ménage de 68 ans.

Son fils, Alexandre Strens, employé du musée, est mort à 26 ans, deux semaines après l’attaque, des suites d’une balle en pleine tête.

C’est la première fois, depuis l’ouverture de son procès devant les assises de Bruxelles que le jihadiste français Mehdi Nemmouche est confronté à la douleur des proches des victimes.

Annie Adam raconte. Le coup de téléphone à la police pour savoir si Alexandre fait partie des victimes. La question du médecin à son arrivée à l’hôpital : « On débranche, avec un demi-kilo de cervelle qui est tombé ? » Les larmes qui coulent sur les joues de son enfant après son opération.

« Le professeur qui l’a opéré m’a dit qu’il pouvait m’entendre. Je devais me mettre du côté gauche car la balle était entrée à droite », raconte-t-elle.

« Je lui ai dit: ‘La petite princesse (sa nièce, ndlr) te passe le bonjour. On trouvera celui qui t’a fait ça' ».

« Cruauté » du tueur

Mehdi Nemmouche (Crédit : AFP)

Selon son avocat, Me Christian Dalne, elle craignait par dessus tout « d’affronter le regard » de l’assassin présumé de son fils, qui lui déclenche encore « des crises d’angoisse ».

Se disant innocent mais dans l’incapacité de se « défendre convenablement », les témoins qu’il souhaitait voir à la barre ayant été refusés, l’accusé, un délinquant multirécidiviste radicalisé en prison puis passé par la Syrie, refuse de s’exprimer.

Après avoir entendu l’accusation détailler deux jours durant les preuves contre lui (ADN, empreintes, témoins, vidéos de revendication), celui qui a été arrêté six jours après les faits en possession du revolver et de la Kalachnikov utilisés pour les assassinats laisse ses avocats parler en son nom.

Leur défense: il « n’est pas le tueur », mais a été « piégé ». Et selon eux la tuerie du 24 mai 2014 n’est pas un attentat du groupe jihadiste Etat islamique (EI), mais « une exécution ciblée d’agents du Mossad« , les services secrets israéliens.

Ils affirment qu’une image du tueur issue de la vidéosurveillance du musée, prouvant selon l’accusation la présence sur les lieux de Mehdi Nemmouche, a été truquée pour le confondre.

Les images vidéo de l’homme qui assassine en moins d’une minute et demie un couple de touristes israéliens, une bénévole française et Alexandre Strens seront diffusées vendredi à l’audience.

« Elles montrent la cruauté de l’exécution par un tueur froid », déclare à l’AFP Me Adrien Masset, l’avocat du Musée juif, qui les a déjà visionnées.

Hezbollah

« Chacun pourra se faire une idée sur la physionomie du tueur », souligne l’avocat, balayant la thèse du complot avancée par la défense.

Issu d’une fratrie de huit enfants, Alexandre Strens (né Reydouane Latrach, selon le quotidien Le Soir) avait changé son nom, comme l’ensemble de sa famille, après l’adoption de son père en 1992 par un châtelain belge, a expliqué Mme Adam vendredi.

Lui dont les parents ont divorcé en 2003 n’avait pas vu depuis des années son père, qui était musulman chiite.

« Une note de la Sûreté de l’Etat dans le dossier assure, après enquête, que l’attentat n’a rien à voir avec ses éventuelles activités politiques », avait déclaré Me Dalne avant l’audience pour prévenir toute nouvelle exploitation complotiste.

« Devant le chagrin d’une maman on s’incline. C’est la raison pour laquelle nous n’avons posé aucune question », a commenté l’avocat de Mehdi Nemmouche, Me Sébastien Courtoy.

Mais « pour comprendre le mobile, il faut comprendre qui sont les personnes qui ont été visées », a-t-il ajouté.

Concernant Alexandre Strens, il existe, dit-il, « une piste évoquée par la Sûreté de l’Etat, qui mène vers l’Iran et le Hezbollah » car son père était « fiché pour des activités séditieuses à l’ambassade d’Iran ».

Une femme présente au musée le jour de l’attentat et qui devait manger avec Alexandre Strens sera également auditionnée, ainsi que le directeur du musée, Philippe Blondin.

Les proches du couple Riva, les deux touristes israéliens assassinés, seront eux entendus fin janvier.

Le procès, au cours duquel Mehdi Nemmouche, 33 ans, est jugé avec un co-accusé, Nacer Bendrer, soupçonné de lui avoir fourni des armes, doit durer jusqu’au 1er mars.

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