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Rescapée d’Oradour, Camille Senon, 93 ans et « révoltée » de toujours

Connue aujourd'hui pour son inlassable travail de mémoire, elle adhère au parti communiste dès 1952 et s'est aussi très tôt illustrée par son caractère combatif et son engagement pour la défense des opprimés

Camille Senon, l'un des derniers survivants du massacre d'Oradour-sur-Glane, dans sa maison à Limoges, le 6 septembre 2017 (Crédit : AFP PHOTO / PASCAL LACHENAUD)
Camille Senon, l'un des derniers survivants du massacre d'Oradour-sur-Glane, dans sa maison à Limoges, le 6 septembre 2017 (Crédit : AFP PHOTO / PASCAL LACHENAUD)

Elle a milité au PCF, manifesté contre Dieudonné et la loi Travail, a refusé une médaille que le Premier ministre Manuel Valls voulait lui remettre : Camille Senon, 93 ans, l’un des derniers témoins du massacre d’Oradour où elle perdit toute sa famille, a toujours été « une révoltée ».

Camille Senon parle du drame, des autres, mais très peu d’elle-même. « Syndrome du survivant », disent certains.

Elle avait vingt ans le 10 juin 1944, jour du massacre commis par les SS de la division Das Reich. « Je travaillais à Limoges, mais je rentrais à Oradour les week-ends. Ce jour-là, j’ai pris le tramway, comme d’habitude, et rapidement on a vu les fumées noires au loin. La panique a gagné les wagons et en un instant nous étions arrêtés par des soldats allemands », raconte-t-elle.

« Ils nous ont gardés plusieurs heures, nous expliquant ce qu’ils avaient fait à Oradour et nous laissant croire que, peut-être, ils nous tueraient nous aussi. Ce que j’ai vu ensuite est difficile à raconter : il n’y avait plus âme qui vive », lâche-t-elle.

Parmi les 642 villageois tués, dont une majorité de femmes et d’enfants, se trouvaient une vingtaine de ses proches parents et amis.

Connue aujourd’hui pour son inlassable travail de mémoire, Camille Senon, qui adhère au parti communiste dès 1952, s’est aussi très tôt illustrée par son caractère combatif et son engagement pour la défense des opprimés.

« En m’intéressant à Camille, j’ai découvert toute une part de son histoire jamais racontée », souligne le réalisateur François Perlier, qui l’a suivie tout au long de l’année 2016 pour son documentaire « La dame du pays rouge ».

« Comment elle a quitté son Limousin pour Paris après-guerre. Comment elle s’y est engagée sur toutes les batailles sociales et pour les droits des femmes, jusqu’à devenir une féministe intransigeante et la responsable syndicale de l’une des plus importantes sections féminines de la CGT des PTT. C’est cette Camille secrète que j’ai voulu raconter », résume-t-il.

« Ne pas tricher avec ses valeurs »

« Quand j’ai commencé à travailler, il faut imaginer qu’il n’y avait pas de statut des fonctionnaires, et les femmes devaient encore demander la permission à leur chef de service pour se marier ! La misogynie et le sexisme ordinaire étaient partout, y compris, il faut le rappeler, dans les milieux syndicaux », se souvient la vieille dame.

Inspirée par un père et un frère « fondamentalement de gauche, ouvriers et très cultivés politiquement », cette éternelle célibataire assure pourtant : « si le drame personnel que j’ai vécu a forcément nourri ma réflexion politique et humaine, j’étais ce que j’ai fait bien avant Oradour ».

« Je suis comme ça : aussi longtemps que je vivrai, je serai une révoltée et je n’accepterai pas les injustices », lance-t-elle avec ce sourire, rehaussé de dizaines de rides, qui ne la quitte presque jamais.

Cet engagement joyeux mais inébranlable « n’a fait que se renforcer en vieillissant », s’amuse encore Camille.

Pour preuve, à plus de 90 ans, elle se portait candidate en 2014 aux élections municipales à Limoges sur une liste « Front de gauche ». La même année, elle avait donné de la voix contre la venue du polémiste Dieudonné dans sa ville.

En 2016, c’est encore avec le sourire qu’elle a défilé contre la loi Travail portée par Myriam El Khomri. Et dans la foulée du 49-3 imposant cette loi, elle opposait une fin de non recevoir cinglante au Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, qui proposait de l’élever au rang de commandeur de l’Ordre national du mérite.

Recevoir cette médaille dans de telles circonstances serait « renier toute ma vie militante pour plus de justice et de solidarité, de liberté, de fraternité et de paix », expliquait-elle alors.

« Que voulez-vous, j’ai toujours refusé de mentir sur qui je suis, mais ça m’a plutôt réussi », soupire-t-elle aujourd’hui.

« C’est important de rappeler aux jeunes qu’il ne faut pas tricher avec ses valeurs, et rester, quelles que soient les circonstances, toujours optimiste », dit-elle.

« Parce que même si le monde qui se prépare est inquiétant, la vie m’a prouvé qu’il n’est jamais temps de désespérer ».

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