Sanders et Clinton cherchent un terrain d’entente sur Israël
Le parti démocrate apparaît divisé sur la question, mais chaque camp tente des ouvertures
Deux délégués du comité de l’élaboration du programme du parti démocrate – l’un nommé par Hillary Clinton, l’autre par Bernie Sanders – ont déclaré jeudi que le programme devait refléter les épreuves rencontrées par les Israéliens comme par les Palestiniens.
Quelques jours après que la coalition juive républicaine a fortement critiqué des membres du comité démocrate pour leurs opinions sur Israël, Keith Ellison s’est associé mardi avec Luis V. Gutierrez pour écrire une lettre aux supporteurs de J Street, mettant l’accent sur leur soutien à la solution à deux Etats et à la reconnaissance des droits israéliens et palestiniens.
Ellison, qui a été nommé au comité par le candidat démocrate Bernie Sanders, et Gutierrez, l’un des représentants des anciens secrétaires d’Etat d’Hillary Clinton, se décrivent dans la lettre comme des « soutiens de la solution à deux Etats », qui « viennent de revenir d’un voyage en Israël et en Palestine ».
« Certains ont spéculé sur des divisions au sein de notre parti à propos du futur de la politique étrangère américaine au Moyen-Orient », écrivent-ils. « La vérité est que, lorsqu’on en vient au conflit israélo-palestinien, nous sommes sur la même longueur d’ondes. Nous sommes d’accord sur les principes majeurs qui façonneront la vision de notre parti ».
« La façon dont le conflit doit se terminer est claire. Les Israéliens doivent pouvoir vivre en sécurité, libérés de la terreur », continuent-ils dans leur lettre. « Les Palestiniens doivent pouvoir se gouverner eux-mêmes dans leur propre Etat, sans checkpoints, couvre-feu et démolitions de maisons. Les futurs de ces deux peuples sont inextricablement liés, et dépendent de la solution à deux Etats ».
Les éléments concernant Israël dans le programme démocrate ont fait l’objet de disputes, tant en dehors qu’au sein du parti. Sanders a pu nommer cinq délégués pour ce comité parfois querelleur. Trois des cinq – le directeur de l’institut arabe américain James Zogby, le professeur et activiste Cornel West, et Ellison – ont été cités dans une série de publicités sur Internet mises en ligne par la coalition juive américaine comme preuve de l’existence d’un mouvement anti-Israël au sein du parti démocrate.
« La vraie question va être qu’une promesse de sécurité pour nos chers frères et sœurs en Israël ne pourra jamais être basée sur l’occupation des chers Palestiniens », s’est plaint West. « Nous allons devoir parler sérieusement de l’occupation », a-t-il continué, avant d’ajouter qu’il ne savait pas si le programme allait autoriser l’emploi du mot « occupation ».
L’ancien représentant Robert Wexler, nommé par Clinton au comité, a répondu qu’il « ne soutiendrait pas, et s’opposerait même, à l’emploi du mot ‘occupation’ pour la simple et bonne raison qu’il sape notre objectif commun. L’objectif du parti démocrate est d’achever le projet négocié de deux Etats ».
La lettre d’Ellison et de Gutierrez ne partage pas les inquiétudes de Wexler.
« Les Israéliens aujourd’hui vivent dans la peur des actes terroristes qui peuvent changer des marchés et des quartiers paisibles en scènes de violence et d’horreur », ont-ils prévenu. « Les Palestiniens luttent sous une occupation injuste qui les prive de leurs droits, des opportunités et de l’indépendance qu’ils méritent ».
Ellison et Gutierrez soutiennent que leur point de vue n’était « pas controversé » et reflétait même « les objectifs de consensus et les principes partagés par la grande majorité des démocrates, de toutes races, ethnicités et croyances ».
L’organisation J Street est elle-même intervenue dans le débat plus tôt dans le mois, pour peser sur ce qu’elle croit être les points fondamentaux de consensus qui devraient être soulignés dans le programme du parti.
S’exprimant juste avant la session d’ouverture pendant laquelle West et Wexler ont échangé des piques, le président de J Street Jeremy Ben-Ami a affirmé qu’un programme de consensus pourrait « plaider pour le droit du peuple juif comme du peuple palestinien à avoir leur propre Etat », mettant l’accent sur le fait que le soutien à la solution à deux Etats est une politique de longue date, soutenue par les administrations démocrates comme républicaines. Ben-Ami a argué que, d’une façon similaire, « toutes les administrations depuis Lyndon Johnson ont exprimé l’opposition américaine à la construction de colonies et leur expansion ».
Malgré le soutien affiché de West au mouvement BDS, Ben-Ami a considéré que le programme démocrate devrait aussi « exprimer une opposition partagée par de nombreux Américains au mouvement BDS ». Ben-Ami a souligné le fait que, dans le programme démocrate, « l’engagement des Etats-Unis pour la sécurité d’Israël devrait être annoncé d’une manière évidente et sans ambiguïté ».
« Vous pouvez obtenir un vrai consensus autour de la dénonciation de la violence, du terrorisme et de l’incitation [à la violence], tout en affichant l’opposition américaine aux mouvements unilatéraux comme l’expansion des colonies », a-t-il poursuivi.
Pendant que les délégués démocrates discutent de la position de leur parti sur Israël et les Palestiniens, leurs opposants ont souligné les cas de West, Ellison et Zodby comme preuves que les votants pro-Israël devraient abandonner le parti démocrate.
Lors des deux dernières élections présidentielles, les Juifs ont voté à une écrasante majorité pour les candidats démocrates, mais les républicains espèrent inverser la tendance.
Le comité d’élaboration du programme du parti démocrate devra terminer son travail avant la convention de nomination du parti, qui aura lieu à Philadelphie fin juillet. Malgré des ouvertures comme celles d’Ellison et de Gutierrez, les soutiens de Clinton et de Sanders semblent prêts pour le conflit sur un certain nombre de sujets, Sanders ayant pour l’instant refusé de concéder sa défaite et de reconnaître Clinton comme candidate du parti.