Scepticisme, soulagement et colère au shuk de Jérusalem après le cessez-le-feu avec l’Iran
Quelques heures après la réprimande de Trump, les habitués du shuk espèrent pouvoir enfin dormir, tout en doutant que la guerre soit vraiment finie et que la menace ait disparu

Les habitués et les commerçants du marché Mahane Yehuda de Jérusalem étaient partagés entre colère, soulagement et cynisme après l’accord de cessez-le-feu conclu mardi entre Israël et l’Iran.
Le cessez-le-feu, entré en vigueur mardi matin à 7 heures et annoncé quelques heures plus tôt par le président américain Donald Trump, avait déjà été violé par les deux parties mardi après-midi, lorsque le Times of Israel s’est rendu dans le shuk de la capitale. Aux alentours de 10 h 30, soit près de trois heures et demie après le début du cessez-le-feu, l’Iran avait tiré deux missiles sur le nord d’Israël, et Israël avait répliqué quelques heures plus tard par une frappe ciblée contre un radar iranien au nord de Téhéran.
Trump, qui avait contribué à négocier le cessez-le-feu après douze jours de combats, a publiquement laissé exploser sa frustration, déclarant qu’Israël et l’Iran « ne savent pas ce qu’ils foutent ».
Pour David Sasson, qui tient une boucherie populaire sur le marché, c’était une insulte inacceptable.
« Le cessez-le-feu n’aurait jamais dû avoir lieu. C’est une très mauvaise chose », s’est écrié David Sasson, de sa voix puissante avec laquelle il interpelle les passants depuis de nombreuses années. « Pourquoi Bibi [le Premier ministre Benjamin Netanyahu] a-t-il cédé face à Trump ? Ils auraient dû aller jusqu’au bout. Nous devons terminer par la paix, pas par la guerre. »
Il s’est toutefois dit fier de la manière dont Israël a mené la guerre.
« Aucun pays n’aurait fait ce qu’Israël a fait », a-t-il affirmé. « Bibi a fait du très bon travail. »
Yehudit Adler, une habituée du marché, se disait quant à elle mitigée.
« Il y a du bon et du mauvais. Nous avons lancé cette guerre pour atteindre un objectif, et nous ne l’avons pas atteint », a-t-elle déploré. « Je ne sais pas ce qu’ils ont réellement détruit, mais nous savons que l’Iran possède encore plusieurs de ses installations nucléaires. En revanche, il est bon que cette guerre soit terminée. Il y a eu beaucoup de destructions et et des gens ont été tués. »
« De toute façon, tout cela n’est pas entre nos mains », a-t-elle ajouté. « Tout est entre les mains de Dieu. »

Victor Schmelzer, venu faire ses courses avec sa femme Susan, a exprimé des sentiments partagés sur l’accord de cessez-le-feu.
« Vous savez, nous avons vécu le 7 octobre et nous savons tout ce qui s’est passé depuis », a déclaré Schmelzer, faisant référence aux frustrations persistantes d’Israël dans ses négociations avec le groupe terroriste palestinien du Hamas pour la libération des otages enlevés lors du pogrom perpétré par le groupe terroriste contre Israël il y a vingt mois. « Si ce cessez-le-feu tient et que l’Iran respecte sa parole, ce serait une bonne chose. Mais j’ai du mal à croire que ce sera le cas. »
Schmelzer, chirurgien à la retraite qui partage son temps entre Jérusalem et Boynton Beach, en Floride, estime que les pressions exercées par Trump pour parvenir à un cessez-le-feu rapide étaient précipitées et prématurées.
« J’apprécie vraiment les efforts de Trump, mais je pense qu’il est un peu naïf dans sa lecture de cette région du monde. Je ne crois pas qu’il comprenne vraiment comment négocier avec ces gens, parce qu’ils vous disent une chose et en font une autre. Je pense que Trump cherche à faire pression pour mettre rapidement fin à la guerre, afin de pouvoir proclamer une victoire à son actif — mais pas forcément dans l’intérêt d’Israël. À mon avis, le travail n’est pas encore terminé. »

Rosalind Hershkovitz, chanteuse et compositrice vivant à Jérusalem, s’est dite, elle aussi, profondément sceptique.
« Je ne fais pas du tout confiance aux Iraniens », a-t-elle affirmé sans détour, exprimant ses doutes quant à la viabilité de l’accord. Selon elle, il est peu probable que le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, accepte une défaite, quelle qu’en soit la gravité pour son pays.
« Nos ennemis ont ceci de particulier qu’ils ne semblent jamais prêts à se rendre, peu importe l’ampleur de leur défaite », a ajouté Hershkovitz. « Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne et le Japon se sont rendus lorsqu’il était évident qu’ils avaient perdu. Mais le Hamas a été anéanti et refuse de l’admettre, et je pense que l’Iran réagira de la même manière. »
Hershkovitz espère toutefois que la situation va se calmer.
« Je ne sais pas si nous pouvons espérer la paix, mais j’espère vraiment que nous aurons un répit », a-t-elle déclaré. « J’ai surtout hâte de passer une bonne nuit de sommeil. »

Debra Neal, qui tient un salon de coiffure près du shouk, était plus enthousiaste quant aux perspectives du cessez-le-feu.
« J’espère qu’il est réel », a-t-elle confié. « Je veux simplement pouvoir retourner au travail. »
Neal a expliqué que la plupart de ses clients avaient annulé leurs rendez-vous depuis le début de l’opération « Rising Lion », lancée le 13 juin.
« Les clients sont nerveux, et il est difficile pour moi d’accéder à un abri en cas d’alerte aux missiles », a-t-elle indiqué. « En plus, si une alerte survient alors qu’une coloration ou un autre traitement capillaire est en cours, cela pourrait sérieusement abîmer les cheveux. »
Neal a déclaré que ses opinions sur le Premier ministre Benjamin Netanyahu avaient considérablement changé au cours de la guerre.
Neal a également confié que son regard sur le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait changé au cours de la guerre.
« Depuis la pandémie de coronavirus, j’ai eu le sentiment qu’Israël était devenu une dictature, et que tout ce qui s’est passé à Gaza avait, selon moi, détruit le pays », a-t-elle déclaré. « Mais, même si je n’aime pas le dire, je suis fière de lui. La façon dont Tsahal a été si précis dans ses frappes contre l’Iran était vraiment impressionnante. Je pense toujours que nous avons besoin d’un changement de gouvernement, mais je reconnais qu’il y a un côté plus ‘badass’ chez lui. »

D’autres observateurs adoptent une approche moins nuancée.
« L’objectif déclaré du régime iranien est de détruire Israël », a affirmé Michael, un Britannique de passage en Israël, portant une croix autour du cou. « Lorsque ce régime tombera, Israël et le reste du monde ne s’en porteront que mieux. »
Michael, qui a refusé de décliner son patronyme, a expliqué qu’il avait été bloqué en Israël après l’annulation de son vol retour.
« Mais je ne suis pas pressé de rentrer chez moi. Je resterai peut-être encore quelques semaines. »
Il a également salué les dirigeants israéliens et américains, qualifiant Netanyahu de « mec solide qui comprend la réalité quand d’autres refusent de la voir », et affirmant que Trump est « bien plus intelligent que les gens ne l’imaginent, vraiment beaucoup plus intelligent ».

Aryeh Dolinsky, originaire de Kfar Adumim, dans la banlieue de Jérusalem, a quant à lui exprimé sa déception.
« Je pense que c’est une très mauvaise chose », a-t-il déclaré avec fermeté. « Nous n’avons pas terminé le travail et nous avons abandonné parce que c’était trop difficile. »
Il a toutefois ajouté qu’il était convaincu qu’une puissance supérieure dirigeait les événements.
« Je pense que tout vient de Dieu et qu’Il sait ce qu’Il fait », a-t-il confié. « Voilà pourquoi je garde le sourire. »
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