Israël en guerre - Jour 642

Rechercher

Sur une île en Thaïlande, un centre holistique soigne des Israéliens traumatisés

Le David’s Circle permet aux rescapés, soldats et endeuillés de trouver un soutien mutuel et une voie vers la guérison, loin du tumulte de la guerre

Participants au David’s Circle à Koh Phangan, en Thaïlande, en mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)
Participants au David’s Circle à Koh Phangan, en Thaïlande, en mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

KOH PHANGAN, Thaïlande – À des milliers de kilomètres de la guerre contre le Hamas à Gaza, au cœur d’une jungle luxuriante, un refuge thérapeutique hors du commun a vu le jour sur l’île de Koh Phangan. Il accueille des Israéliens profondément marqués par les événements du 7 octobre, venus chercher un répit, loin des tensions et des souvenirs omniprésents.

Sous des toits de bambou, de jeunes survivants du festival Supernova, des soldats récemment démobilisés, des bénévoles engagés et d’autres encore se rassemblent autour de longues tables partagées et dans des espaces de création. Leurs voix s’élèvent, portées par le murmure apaisant d’une rivière voisine. Bienvenue au David’s Circle, un lieu de reconstruction où les blessures du traumatisme croisent l’espoir d’une guérison.

Plus d’un an et demi après le pogrom perpétré par le Hamas dans le sud d’Israël – au cours duquel les terroristes du groupe ont assassiné plus de 1 200 personnes et kidnappé 251 autres emmenés en otages dans la bande de Gaza – des milliers d’Israéliens ont quitté leur pays en quête de répit, loin des rappels constants d’une guerre apparemment sans fin déclenchée par l’assaut meurtrier. Daniel, un réserviste israélien fait partie de ce groupe. C’est ainsi qu’après avoir effectué de nombreuses et longues heures de réserve à Gaza, il s’est retrouvé en Thaïlande avec sa femme et ses enfants.

« Je n’étais pas stable émotionnellement, je luttais vraiment », confie-t-il lors d’une visite du Times of Israel. « La première fois que je suis arrivé au David’s Circle, j’ai rencontré Segev [un ancien officier de santé mentale de Tsahal]. Cette rencontre m’a redonné espoir, à un moment où tout semblait impossible. »

Alors que plus de 300 000 Israéliens se sont rendus en Thaïlande rien qu’au cours de l’année dernière et que les experts estiment que jusqu’à 31 % des Israéliens qui ont été directement exposés aux atrocités du 7 octobre pourraient souffrir de TSPT, le David’s Circle représente une approche révolutionnaire de la guérison collective pour les Israéliens à l’étranger.

Les thérapies classiques peinent à atteindre les survivants plongés dans un environnement saturé de rappels du conflit. Cet espace niché dans la jungle offre une alternative une voie différente. Ici, la guérison s’opère à travers une approche holistique, mêlant soutien entre pairs marqués par des expériences similaires, expression créative, activité physique et vie communautaire — bien loin d’un cadre clinique formel, plutôt qu’un cadre clinique formel.

Participants au Cercle de David à Koh Phangan, Thaïlande, mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

Depuis son ouverture en septembre 2024, le David’s Circle a accueilli plus de 900 visiteurs. La majorité des participants ont entre 21 et 26 ans. Environ la moitié sont des soldats démobilisés, un quart sont des survivants du festival Supernova ou des résidents de communautés proches de la frontière de Gaza, et le dernier quart regroupe des personnes confrontées à diverses formes de traumatisme et de deuil.

Selon une étude qualitative menée en 2025 par le Tel Hai Academic College, l’approche non clinique du centre aide les participants à explorer ce que les chercheurs ont identifié comme des thèmes récurrents de « dislocation émotionnelle, de méfiance et d’incertitude existentielle », en s’appuyant sur la force du lien communautaire et de l’expression artistique.

Participants au Cercle de David à Koh Phangan, Thaïlande, mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

Un sanctuaire né d’une tragédie

Le David’s Circle est basé sur l’île pittoresque de Koh Phangan, en Thaïlande, où résident environ 600 familles israéliennes et qui en accueille des milliers de visiteurs pour de brefs séjours.

Le projet a été initié par Yael Shoshani-Rom, spécialiste israélienne du traumatisme, qui accompagnait les survivants du festival de musique Supernova, où plus de 360 festivaliers ont été assassinés dans l’un des massacres les plus meurtriers et cruels, le 7 octobre 2023.

« Certains de mes patients me disaient qu’ils ne pourraient pas guérir en Israël, car la situation y était — et reste — insupportable. Tout était déclencheur : les sirènes, l’état d’alerte permanent… Le traumatisme ne s’interrompt jamais », explique Shoshani-Rom.

Yael Shoshani-Rom, fondatrice du Cercle de David. (Crédit : Inor Kagno)

Constatant que beaucoup de survivants quittaient Israël, elle a eu l’idée de créer « quelque chose comme une maison Habad, mais thérapeutique », un lieu où les Israéliens pourraient poursuivre leur chemin vers la guérison à l’étranger, a expliqué Shoshani-Rom, en évoquant les centres de sensibilisation juifs établis aux quatre coins du monde entier par le groupe hassidique Habad.

Le projet a pu voir le jour grâce à un partenariat avec Let’s Do Something, une ONG fondée par des amis de David Newman, assassiné par des terroristes du Hamas lors du festival Supernova.

Ce qui n’était au départ qu’un groupe WhatsApp destiné à collecter du matériel humanitaire a évolué vers trois axes principaux : l’investissement dans des technologies de défense de nouvelle génération pour Israël, le soutien aux survivants de la guerre – principalement via le David’s Circle – et la production de contenus en ligne favorables à Israël. Let’s Do Something a adopté la vision de Shoshani-Rom d’un centre thérapeutique en Thaïlande, donnant ainsi naissance au David’s Circle, en mémoire de Newman.

Une oasis dans la jungle

Pour pénétrer dans le David’s Circle, les visiteurs franchissent une arche décorative en bambou qui les conduit vers un espace de guérison holistique. Le rythme quotidien y alterne entre activités structurées et moments de liberté, la plupart se déroulant sous une vaste structure couverte, divisée en différentes zones.

Activité artistique au David’s Circle à Koh Phangan, Thaïlande, mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

Dans l’espace social, les participants disputent d’intenses parties de backgammon et de cartes, des volutes de fumée s’élevant pendant qu’ils rient, échangent des plaisanteries ou chantent des chansons folkloriques israéliennes. L’atelier d’art déborde de créativité : certains s’attellent à des mandalas minutieux ou à des œuvres mixtes, tandis que des peintures vibrantes aux thèmes de résilience recouvrent les murs. Dans la cuisine en plein air, d’autres préparent les repas, l’arôme du couscous maison emplit l’air, apportant le réconfort des saveurs familières.

Sur le côté de la zone principale, un foyer soigneusement entretenu attend le rassemblement du soir. À la tombée de la nuit, les participants forment un cercle autour des flammes crépitantes pour partager leurs histoires, exprimer leurs émotions et se retrouver à travers des discussions guidées sur des thèmes allant de l’adaptation face à l’épreuve, la lutte intérieure ou la résilience. De l’autre côté de la rivière, accessible par une petite passerelle, se trouve le shala, un pavillon thaïlandais traditionnel où sont proposés divers ateliers, tels l’ouverture de la voix, les bains de glace, ou encore les discussions sur les troubles du sommeil liés au TSPT.

« Ce qui m’a séduite, c’est qu’on peut mener un travail thérapeutique très professionnel, fondé sur la recherche et les techniques les plus avancées, sans avoir besoin d’un cadre clinique », explique Yael Shoshani-Rom. « On peut le faire sur un pouf, sur un tapis, pendant des activités saines et intégrées à leur univers, sans leur faire sentir qu’ils sont en crise. »

Au-delà de la thérapie traditionnelle

« Il y a quelque chose, dans les traitements conventionnels, qui ne prend pas vraiment en compte la personne dans sa globalité », confie Ahia Meir Malul, artiste de 28 ans et survivant du festival Supernova, qui s’est épanoui dans l’environnement informel du David’s Circle après avoir éprouvé des difficultés en Israël. « Vous êtes bien plus que votre problème, vous êtes un monde à part entière. Quand les thérapeutes se concentrent uniquement sur le problème, ils passent à côté de 99 % de ce qui se joue réellement. »

Ce qui distingue le David’s Circle, ce n’est pas seulement son cadre détendu, mais aussi l’adoption d’un modèle de soutien par les pairs.

Participants au Cercle de David à Koh Phangan, Thaïlande, mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

« Le traumatisme a été collectif », explique Shoshani-Rom. « L’idée était donc de créer une communauté qui guérit ensemble, tout en aidant chacun à guérir individuellement. »

Yarden Asher, 27 ans, survivant du festival Supernova et désormais formé pour devenir mentor au sein du centre, voit dans ce rôle une étape essentielle de son propre processus de guérison.

« Cela me donne un sens. C’est l’une des étapes de la croissance post-traumatique, ce moment où l’on commence à redonner. Jusqu’ici, j’ai reçu, j’ai appris, j’ai acquis du savoir. L’étape suivante, c’est d’être en position de transmettre, de contribuer à mon tour », explique-t-il.

Des participants prennent des bains de glace thérapeutiques au David’s Circle à Koh Phangan, en Thaïlande, en mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

Retrouver des connexions et l’espoir

Pour Daniel, le réserviste de Tsahal, le David’s Circle est devenu une bouée dans le tumulte émotionnel.

« Je me souviens parfaitement du jour où je suis arrivé », raconte-t-il. « J’allais de mal en pis – tout me paraissait impossible, je n’avais plus aucun espoir. » Grâce à des visites régulières, les lundis et mercredis, Daniel a peu à peu retrouvé un équilibre.

« J’ai avancé dans cette thérapie à petites doses, lentement mais sûrement », confie-t-il, soulignant combien les ateliers artistiques et les liens communautaires l’ont transformé. « Aujourd’hui, c’est déjà autre chose. Je parle en regardant en arrière, c’est comme un autre monde. »

Participants au Cercle de David à Koh Phangan, Thaïlande, mars 2025. (Crédit : Inor Kagno)

Parmi les participants, l’artiste Ahia Malul incarne sans doute le mieux l’esprit du centre : une guérison qui passe par la créativité, le lien humain et la solidarité vécue.

« Je comprends que ce qui m’est arrivé là-bas n’est pas ce qui me définit », dit-il. « Ce qui compte, c’est de transmettre de l’espoir, une étincelle de lumière… Ma mission, c’est de montrer qu’il est possible de traduire ses émotions en matière, de dessiner des mots en couleurs. »

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.