Tourisme et bâtiment, premières victimes collatérales du coronavirus en Israël
Si le virus n'est pas rapidement maîtrisé, tous les secteurs dépendant des importations de Chine pourraient souffrir de ralentissements, selon l'économiste de la banque Leumi
Même s’il est un peu prématuré d’évaluer l’impact économique du coronavirus sur l’économie israélienne, il est probable, estime un économiste israélien, que les secteurs du tourisme et de la construction seront les premiers touchés.
« Nous ne savons pas combien de temps cet épisode va durer, et sans savoir cela, il est difficile de se prononcer sur l’ampleur des dégâts », a déclaré Gil Bufman, économiste en chef à la banque Leumi, la deuxième banque en termes de capital de marché en Israël, dans une interview téléphonique accordée au Times of Israël.
Les touristes chinois représentent 3,5 % des arrivées, et le secteur touristique pourrait donc être lourdement impacté, a-t-il dit. Mais l’impact « le plus substantiel » pourrait arriver de manière indirecte, si les gens voyagent moins, par crainte d’être contaminés.
« Cela pourrait être préjudiciable pour le secteur touristique et hôtelier en Israël, au cours du premier trimestre de l’année, si les choses se tassent en un trimestre, comme cela a été le cas en 2003 avec l’épidémie du SRAS », a-t-il dit. Identifié en 2003, le SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère) avait touché 26 pays et contaminé plus de 8 000 personnes cette année.
L’industrie du bâtiment pourrait également être immédiatement impactées par le virus, a déclaré Bufman.
« Une grande partie de la main d’oeuvre, dans le bâtiment, est chinoise », a-t-il dit. Si les travailleurs attendus en Israël ne peuvent pas voyager en raison des restrictions de voyage, cela pourrait avoir un « impact négatif ».
Le coronavirus qui se propage en Chine et à partir de la Chine pourrait devenir une pandémie qui frapperait le monde entier, selon les experts mondiaux des maladies infectieuses, a rapporté le New York Times dimanche. Au cours des trois dernières semaines, le nombre de cas confirmés en laboratoire est passé d’environ 50 en Chine à plus de 17 000 dans au moins 23 pays ; il y a eu plus de 360 décès, selon l’article.
Dimanche, le Premier ministre a tenu une réunion d’urgence avec des ministres et des responsables de la santé pour évoquer les dangers du coronavirus pour Israël. Étaient présents les ministres de la Santé, des Finances, de la Justice, de l’Intérieur et du Transport, ainsi que le chef de la Sécurité intérieure, entre autres.
L’arrivée du nouveau coronavirus est « inévitable » en Israël, a soutenu Netanyahu, appelant les autorités médicales à plancher sur un vaccin pour contrer ce virus ayant émergé en Chine.
« Notre premier objectif est de reporter l’arrivée du virus en Israël. Je dis ‘reporter’ parce que son arrivée est inévitable », a déclaré Netanyahu à l’issue de cette réunion.
« Nous identifierons, traiterons, isolerons et soignerons les personnes infectées », a-t-il ajouté dans un communiqué.
« J’ai chargé l’Institut biologique de travailler le plus vite possible pour produire un vaccin contre le virus et de mettre en place une usine de fabrication de vaccins », a ajouté Netanyahu, sans toutefois fournir plus de détails sur l’identité des scientifiques mobilisés en Israël.
« Nous ne prenons aucun risque », a-t-il dit. « Le virus est déjà présent dans 5 continents et dans 25 pays. Nous sommes conscients que nous ne pouvons pas pleinement empêcher le virus d’entrer [en Israël]. Donc, nous nous préparons pour contenir le virus une fois qu’il sera là. »
Le ministre de la Santé Yaakov Litzman a annoncé jeudi qu’Israël n’autorisera plus de vols en provenance de Chine dans le pays, en raison des inquiétudes liées à la propagation du virus. Le transporteur national, El Al, a rejoint jeudi plusieurs autres compagnies aériennes pour interrompre les vols vers la Chine en raison de l’apparition du virus.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré l’épidémie comme une urgence mondiale et a averti que les gouvernements doivent se préparer à « contrôler les épidémies nationales » si la maladie se répand dans leur pays.
Si le virus n’est pas contenu dans les semaines à venir, Israël pourrait assister à une interruption de l’approvisionnement depuis la Chine, notamment en vêtements et en chaussures, ainsi qu’en matériaux de construction.
Les importateurs d’articles de mode, d’appareils électroniques et domestiques en Israël ont déjà averti d’une hausse des prix en raison d’une probable pénurie, si les usines chinoises situées dans les zones isolées ne rétablissaient pas leurs productions, selon le journal financier The Marker. Ces produits sont, pour la majorité, importés de Chine.
« Tout secteur qui importe ou qui dépend d’importations de la Chine pourrait être affecté », a déclaré Bufman, précisant qu’il ne pensait pas que les effets seraient immédiats.
« Avec un peu de chance, avant que les inventaires ne soient épuisés, la Chine pourra reprendre du service et les choses reprendront leur cours », a-t-il dit. « Mais si elles ne sont pas contenues à temps, nous verrons, au fil de l’année, une pénurie dans l’approvisionnement de certains produits finis, de certains matières premières et matières intermédiaires, et ces pénuries pourraient avoir un large impact sur la croissance israélienne. »
En ce qui concerne l’industrie technologique, Bufman a déclaré que la majeure partie de la croissance de l’industrie ces dernières années s’est produite dans les services technologiques – logiciels, cyber-sécurité et technologie financière, lesquels ne nécessitent pas beaucoup de matériel. Les puces à semi-conducteurs sont fabriquées à Taiwan et en Malaisie ainsi qu’en Chine, a-t-il dit. Cependant, certains fabricants de semi-conducteurs en Israël envoient leurs plaquettes pour être découpées en puces en Chine, et ils pourraient être affectés, a-t-il dit.
Si cette capacité en Chine est temporairement suspendue, cela pourrait avoir un impact, non seulement en Israël, mais pour tous les utilisateurs de semi-conducteurs dans le monde entier », a déclaré Bufman.
« Une fois de plus, les stocks pour le trimestre en cours seront probablement suffisants pour pallier à ces difficultés, mais si cela s’éternise, il pourrait y avoir des conséquences substantielles par la suite. »
Le fabricant de puces Mellanox Technologies Ltd, racheté par le géant américain des jeux et de l’infographie Nvidia pour 6,9 milliards de dollars l’année dernière, a déclaré dans un message texte qu’à « ce stade » la situation en Chine « n’affecte pas les activités commerciales de l’entreprise ».
Mellanox a des bureaux à Pékin, Shenzhen, Hangzhou et Shanghai, et ses activités en Chine comprennent la recherche et le développement, les ventes, le marketing et les chaînes de production. L’entreprise emploie 120 personnes en Chine, dont trois Israéliens. Deux des travailleurs israéliens sont rentrés en Israël et le troisième y est resté, à sa demande, a précisé l’entreprise dans le message texte.
Les vols pour les travailleurs israéliens en Chine et les travailleurs chinois en Israël ont été annulés, a déclaré la société, ajoutant qu’elle a « donné des masques à tous les travailleurs chinois et continue de suivre les directives du gouvernement ».
L’accord Mellanox-Nvidia est toujours en attente de l’approbation des régulateurs chinois.
Il est « bien trop tôt » pour dire quel sera l’impact du virus sur l’industrie technologique, car il s’agit d’une histoire qui se développe, a déclaré Jon Medved, un investisseur en capital-risque israélien qui dirige la plateforme de financement participatif OurCrowd, par téléphone.
« Pour l’instant, nous ne voyons pas beaucoup de répercussions », a-t-il déclaré.
Mais en général, les restrictions de voyage rendent les affaires plus difficiles, a-t-il ajouté. Une grande partie des activités de capital-risque et de technologie restent des activités « face à face » et, dans la mesure où les voyages sont entravés, « ce ne sera pas bon ». Malgré cela, des technologies telles que la vidéoconférence permettraient de surmonter les obstacles.
M. Bufman de Leumi a déclaré que les prochaines semaines seront cruciales.
« Nous avons probablement encore deux semaines environ pour voir si les efforts des autorités chinoises pour contenir la propagation portent réellement leurs fruits et, avec un peu de chance, dans deux semaines, nous commencerons à voir une baisse de la fréquence de détection du virus, puis les choses commenceront à revenir à la normale », a-t-il déclaré. « Mais si ce n’est pas le cas, cela pourrait se transformer en quelque chose qui a des effets économiques négatifs substantiels pour l’économie mondiale et pour Israël » – à la fois indirectement, puisque la nation est affectée par un ralentissement de l’économie mondiale, et directement, dans les industries spécifiques mentionnées plus haut, a-t-il dit.
L’indice des blue chips TA-35 de la Bourse de Tel Aviv a baissé dimanche, secoué par la propagation du virus en Chine, et s’est négocié en baisse de 1,7 % lundi à 12h18 à Tel Aviv.