Un colonel réprimandé pour avoir permis des travaux illégaux sur un lieu saint à Hébron
Les travaux au Tombeau des Patriarches doivent être approuvés par Israël, l'AP et la Jordanie ; l'officier aurait été informé que son action aurait pu nuire à la sécurité en temps de guerre
Un commandant de brigade régionale de l’armée israélienne a été réprimandé le mois dernier pour avoir enfreint les ordres et permis à des résidents d’implantations d’effectuer des travaux de rénovation non autorisés sur le site sacré sensible du Tombeau des Patriarches dans la ville de Hébron, en Cisjordanie.
Une enquête de l’Administration civile contre le colonel Yishai Rosilio, qui était jusqu’à jeudi le commandant de la brigade régionale de Judée, a été lancée après que le Waqf islamique de Jérusalem soutenu par la Jordanie, un organisme musulman qui gère en partie le site, a demandé à Israël des éclaircissements sur des vidéos prises par des Palestiniens lors des travaux d’entretien dans la nuit du 10 juillet, a initialement rapporté le quotidien Haaretz.
Tsahal a confirmé l’incident au Times of Israel.
Les travaux – l’installation d’une toiture dans la partie juive du site – ont été effectués à l’insu des responsables gouvernementaux jordaniens ou israéliens, en contradiction avec les conditions convenues régissant le site.
Le Tombeau des Patriarches est un lieu saint pour les Juifs et les musulmans, qui le désignent sous le nom de Mosquée Ibrahimi. Pour garantir le calme sur le site, qui est partagé par Israël et l’Autorité palestinienne (AP), la maintenance doit être coordonnée entre les deux parties et les responsables jordaniens.
Les vidéos ont suscité des appels sur les réseaux sociaux parmi les Palestiniens pour « empêcher les Juifs de s’emparer » du lieu saint, tandis que le gouverneur de l’AP à Hébron, Khaled Douin, a accusé Israël d’établir des « faits sur le terrain », qualifiant les travaux « d’agression. »
قوات الاحتلال قامت بوضع قوالب حديدية على صحن الحرم الإبراهيمي في محاولة لتحويله إلى "كنيس يهودي"#بدنا_نحمه pic.twitter.com/TqWKWWyl0l
— ????Ahmad Taha (@AhmadTaha__1) July 11, 2024
Rosilio a tenté de se montrer surpris que la maintenance ait été effectuée cette nuit-là, alors qu’il était au courant de l’intention d’effectuer les travaux, ont déclaré à des sources anonymes ayant eu connaissance de son interrogatoire.
Les commandants de la police des frontières, qui assure la sécurité du site, ont contredit les affirmations du colonel, déclarant aux enquêteurs que Rosilio lui-même avait coordonné les travaux avec l’administration des résidents d’implantations de Hébron, approuvant l’entrée des ouvriers et d’une grue sur le site.
L’enquête a finalement établi que la version de Rosilio était erronée et qu’il avait sciemment approuvé les travaux d’entretien sans l’accord de ses commandants et des responsables politiques. Le chef du Commandement du Centre de Tsahal, le général Avi Bluth, a ordonné le démantèlement du toit en présence de représentants du Waqf jordanien et d’autres responsables, alors que les autorités israéliennes étaient en contact avec l’AP et la Jordanie afin d’apaiser les tensions.
Selon Haaretz, Avi Bluth a convoqué Rosilio à son bureau pour une audience, rejetant la défense du commandant selon laquelle la maintenance faisait partie des travaux en cours, et lui reprochant d’avoir provoqué un incident qui aurait pu avoir des répercussions majeures sur la sécurité d’Israël dans le cadre de la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas.
Un commandant ayant connaissance des conclusions de l’enquête a déclaré au journal sous le couvert de l’anonymat que l’incident constituait « une très grave défaillance de la part du commandement » et était « très embarrassant ».
« Un tel incident aurait pu enflammer Hébron et toute la Cisjordanie en deux temps trois mouvements. Il a simplement décidé d’effectuer les travaux sans en avertir aucun responsable. Il pensait que nous nous réveillerions le matin devant un fait accompli et que personne ne le remarquerait », a affirmé le commandant.
Le bureau du porte-parole de l’armée a déclaré que « dans la nuit du 10 juillet, des travaux ont été effectués pour remplacer le toit du côté juif du Tombeau des Patriarches. Ces travaux […] ont été effectués sans l’approbation des commandants, sans permis officiel et sans aucune des autorisations requises à cet effet par Tsahal et l’Administration civile. Lorsque les commandants ont appris l’existence de ces travaux, ils ont ordonné l’enlèvement immédiat des infrastructures qui avaient été installées. »
Rosilio a été réprimandé, mais l’incident ne figurera pas dans son dossier permanent.
Rosilio est originaire de l’implantation de Dolev en Cisjordanie et a étudié à la yeshiva nationaliste religieuse Har Bracha, dirigée par le rabbin extrémiste Eliezer Melamed.
Il a déjà été au centre d’autres problèmes disciplinaires au cours de sa carrière militaire.
En 2019, il avait été reconnu coupable de « ne pas avoir respecté les ordres contraignants de l’armée » à la suite de la noyade du soldat Evyatar Yosefi lors d’une randonnée et avait été démis de ses fonctions de commandant d’un bataillon de reconnaissance de parachutistes. Deux ans plus tard, le chef d’état-major de Tsahal de l’époque, Aviv Kohavi, l’avait nommé à la tête de la brigade de Judée.
Une source de sécurité a également déclaré à Haaretz en janvier que la brigade de Rosilio était responsable de préjudices causés aux Palestiniens des collines du sud de Hébron, et que les mesures prises pour empêcher les soldats de commettre des actes destructeurs n’étaient pas suffisantes.
Le prochain poste de Rosilio sera celui de commandant à l’école de commandement et d’état-major de Tsahal.