Un laboratoire israélien tente de découvrir si le COVID-19 devient plus « doux »
Alors qu’un médecin italien estime que le virus s’est transformé de "tigre agressif" en "chat sauvage", une virologue de Tel Aviv est chargée de tester cette théorie d'atténuation
Des chercheurs israéliens ont entamé des travaux visant à déterminer si le coronavirus évoluait pour devenir moins dangereux, analysant son génome.
La virologue évolutionniste Adi Stern a déclaré au Times of Israël avoir été chargée par le ministère de la Santé de mener une analyse de dizaines d’échantillons de patients récents touchés par le coronavirus et de les comparer à d’anciens échantillons.
« L’hypothèse est que le virus s’est atténué, ce qui signifie qu’il est devenu moins virulent, et il pourrait y avoir un signal génétique qui le montre », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle séquençait le génome du virus dans les cas d’infections récentes et le contrastait avec des échantillons de mars.
Stern, qui dirige un laboratoire de virologie de l’université de Tel Aviv, a déclaré que si cela se révélait correct, cela pourrait expliquer pourquoi une proportion plus faible de patients COVID-19 étaient aujourd’hui hospitalisés dans un état grave. Cela aurait également un impact majeur sur la façon dont les gouvernements et les médecins planifient la suite de la pandémie, a-t-elle commenté, ajoutant que l’analyse prendrait encore plusieurs semaines.
Alors que les chercheurs israéliens entament leurs recherches, un médecin italien a fait les gros titres en affirmant que le virus devenait moins offensif.
« C’était un tigre agressif en mars et avril, mais maintenant c’est un chat sauvage », a déclaré le professeur Matteo Bassetti au Sunday Telegraph.
Bassetti, qui dirige le service des maladies infectieuses à l’hôpital général de San Martino à Gênes, a ajouté : « Même les patients âgés de 80 ou 90 ans peuvent maintenant s’asseoir dans leur lit et respirer sans aide. Ces mêmes patients seraient auparavant morts en deux ou trois jours. »
Des cas similaires existeraient dans les hôpitaux israéliens.
« La maladie perd sa virulence par mutation », a déclaré David Greenberg, spécialiste des maladies infectieuses, au Times of Israël.
Un médecin de premier plan de l’Organisation mondiale de la Santé s’est toutefois prononcé contre de telles allégations.
« Nous devons être prudents : il s’agit toujours d’un virus mortel », a déclaré Michael Ryan, directeur des urgences de l’OMS, lors d’une conférence de presse en ligne le 1er juin, suite à des affirmations antérieures selon lesquelles le virus s’affaiblissait. « Nous devons faire attention à ne pas donner l’impression que, tout d’un coup, le virus, de sa propre initiative, a décidé d’être moins pathogène. Ce n’est pas du tout le cas. »
Mais Greenberg, chef du service de pédiatrie et de l’unité des maladies infectieuses pédiatriques au centre médical universitaire Soroka à Beer Sheva, rejette cette analyse et pense qu’il existe une logique solide expliquant pourquoi un virus peut faire face à un amenuisement.
« Il semble s’adapter à l’être humain, et ne veut pas tuer les hôtes mais vivre en eux et s’épanouir. Nous pouvons le voir partout dans le monde, pas seulement en Israël », a-t-il déclaré.
Greenberg estime que cela permettrait d’expliquer pourquoi la proportion de personnes âgées parmi les individus nouvellement infectés en Israël était faible par rapport au début de la pandémie – alors qu’il s’attendrait à ce qu’elle soit plus élevée car, après le confinement, les personnes âgées ont désormais davantage de contacts avec les enfants. Il pense qu’un amenuisement du virus signifierait que les personnes âgées sont plus sujettes à être atteinte par le virus, mais qu’elles ne le savent pas, ne présentant pas de symptômes.
« Beaucoup de personnes âgées rencontrent des enfants, mais le virus mute ; [il pourrait y avoir] beaucoup de parents et grands-parents qui ne savent pas qu’ils l’ont », a-t-il déclaré.
Stern, qui analyse cette théorie, est plus circonspecte. Elle suggère que l’hypothèse que le virus s’affaiblit serait valable à long terme, et qu’une série d’autres facteurs, y compris une connaissance médicale accrue, pourraient améliorer les statistiques.
Néanmoins, elle se dit « optimiste » et explique que « si cela est vrai, il est important de le réaliser, car cela affecterait l’élaboration des politiques » futures.
« De nombreux modèles qui tentent de prédire la propagation du virus, comme le nombre de personnes atteintes par la maladie qui auront besoin d’être hospitalisées et placées sous respirateur, se basent sur ce que nous avons connu jusqu’à présent. Si le virus devient moins virulent, c’est important de comprendre [pourquoi]. »