Un pari contre l’optimisme
Au Moyen-Orient, Israël continue sa campagne contre l’Iran tandis que le monde des affaires se mêle de la politique en pariant sur la paix. Sans rien gagner.
Dans la presse israélienne, les nouvelles sont moroses ce lundi matin : à commencer par les timides avancées des négociations de paix, le peu d’influence que le gouvernement Netanyahu exerce sur les accords avec Téhéran. Mais aussi, le fait qu’il est difficile de devenir député quand on est arabe israélien, ou encore l’éventualité pour Israël de faire l’objet d’un nouveau boycott.
Le Yedioth Ahronoth consacre un grand article sur ce dernier point, dans lequel 100 personnalités du monde des affaires lancent un avertissement à Israël, exigeant de régler rapidement le conflit avec les Palestiniens. D’après le quotidien, cet appel se fera directement auprès du Premier ministre Benjamin Netanyahu lors du Forum économique de Davos d’ici la fin de la semaine.
Pour Sever Plotzker, analyste économique, le phénomène est remarquable : le secteur des affaires se rend enfin compte de l’impact qu’il peut prétendre avoir dans la diplomatie israélienne.
« Parmi les membres de ce groupe représentant le monde des affaires, il y a des personnes tous azimuts, avec des allégeances politiques et des points de vue différents. Ce qui les unit, c’est leur inquiétude pour l’avenir d’Israël. Les leaders de ce secteur savent qu’il n’y a pas de croissance économique véritable sans accord de paix, sans une paix qui serait pragmatique. Quand les autres groupes finiront-ils aussi par ouvrir les yeux ? A présent, il faut se concentrer sur la plus grande priorité de l’agenda politique israélien : une solution au conflit. »
Une solution est peut-être envisageable, mais le président américain Barack Obama n’en a pas l’air convaincu. C’est en tout cas l’opinion de David Remnick, rédacteur en chef du magazine américain The New Yorker, utilisée comme point d’ancrage d’un reportage à la Une du quotidien Israel Hayom. « Concernant les trois accords en cours dans la région – avec l’Iran, Israël et les Palestiniens, et la Syrie – les chances de parvenir à une signature sont inférieures à 50% », a-t-il écrit.
L’article établit ensuite un lien avec le discours du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas dimanche soir. Ce dernier affirme qu’il refuse toujours de reconnaître Israël comme un Etat juif. L’auteur de l’article en déduit donc que suite à ce discours, Obama aura probablement encore moins de chances de réussir.
« Une solution est peut-être envisageable, mais Obama n’en a pas l’air convaincu » David Remnick, Israel Hayom
De son côté, Haaretz met en lumière une campagne lancée par les membres de l’opposition, visant à proposer une loi qui rendrait plus difficile l’accès à la fonction de député à la Knesset. Si ses partisans pensent qu’une telle loi serait un gage d’efficacité, pour d’autres, elle porterait atteinte à la démocratie. Conséquence : cela pourrait réduire le nombre de députés arabes ou alors encourager des coalitions entre députés issus de minorités. D’après l’article, le slogan de la campagne sera le suivant : « Ce n’est pas de la gouvernance, c’est du racisme ». L’opposition s’attend à mener un combat rude, le projet de loi ayant déjà obtenu le soutien de la coalition actuellement à la tête du gouvernement.
Néanmoins, un député a déclaré qu’au moins un parti de la coalition pourrait avoir du mal à digérer ce projet de loi. « Il serait curieux de voir le parti Hatnua [dirigé par Tzipi Livni, actuelle ministre de la Justice] soutenir ce texte de loi, car ce serait un suicide politique pour eux. Pour l’instant, il est impossible de se prononcer sur le nombre de votes qu’obtiendra le parti aux prochaines élections », a-t-il souligné.
Quant à Maariv, le quotidien se concentre sur les accords avec l’Iran. Il avance que les services secrets israéliens font tout leur possible pour trouver un élément qui prouverait que Téhéran ne tient pas ses engagements.
D’après le journaliste Elie Berdenstein, même si Israël n’a pas mené d’autre campagne contre l’accord signé la semaine dernière, Benjamin Netanyahu campe toujours sur ses positions. Il est en effet déterminé à maintenir les sanctions contre Téhéran et n’a pas écarté le recours à la force. « Netanyahu ne pense pas que le régime iranien ait l’intention de mettre fin à son programme nucléaire. En conséquence, il s’efforce de convaincre les Américains de l’utilité d’une frappe militaire, même si cela doit avoir lieu une fois que les Etats-Unis auront pris conscience qu’ils se sont fait avoir par l’Iran », a-t-il écrit. Le journaliste cite également un haut responsable de la défense, selon qui, toute action militaire ne mènera pas à une guerre de grande ampleur. Il affirme que les Américains ont été prévenus qu’en cas de recours à la force, celui-ci resterait ciblé.
D’après le journaliste Alex Fishman du Yedioth Ahronoth, le recours à la force est de loin la dernière option, étant donné les négociations actuelles entre Américains et Iraniens. Les relations entre Téhéran et Washington se sont tellement « améliorées » que la Russie s’en inquiète et tente de ramener l’Iran sous sa coupe. La donne a changé, écrit le journaliste. « Si vous voulez savoir ce qui se passe actuellement au Moyen-Orient, c’est en Jordanie qu’il faut aller. Quand [le ministre des Affaires étrangères iranien] Mohammed Javad Zarif se rendra en Iran, on saura comment le vent va tourner. En Jordanie, ils comprennent que nous sommes en ce moment dans une ère de coopération et d’intérêts communs entre les Etats-Unis et l’Iran, celle notamment de la lutte contre certains mouvements sunnites en Irak, en Syrie et en Afghanistan. Israël ne fait pas partie de l’équation. De la même façon que l’on peut remettre en état un masque à gaz, on peut réinitialiser des plans militaires. »
« Quelqu’un aurait dû parler des morts que Sharon a laissés derrière lui », Yitzhak Laor, Haaretz
Cela fait désormais une semaine qu’Ariel Sharon est décédé. Mais dans les pages du quotidien Haaretz, le journaliste Yitzhak Laor prolonge le débat et se demande pourquoi personne n’a mentionné les massacres de Sabra et Shatila. « Quelqu’un aurait dû parler au nom des morts que Sharon a laissés derrière lui – même si cela allait à l’encontre de l’image qu’on avait de lui – et du fait qu’il n’a pas respecté la loi lorsqu’il a fait construire des implantations dans tout le pays pour imposer sa solution au conflit. », a-t-il écrit. « Quelqu’un aurait dû en parler et dire que l’armée n’est pas homogène, qu’elle est traversée par différents courants, et que Sharon faisait partie de ces hommes les plus violents. Mais cela n’a pas eu lieu. Les morts du côté arabe n’ont pas été invités à rejoindre la mémoire collective du pays. Quant au souvenir qu’ont gardé les vétérans juifs de la guerre du Liban, il restera à jamais avec eux, tel un cauchemar. »
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